Publié

En Israël, une enquête complexe sur des crimes sexuels commis le 7 octobre

Israël annonce vouloir enquêter sur des "crimes sexuels" commis par le Hamas le 7 octobre (vidéo)
Israël annonce vouloir enquêter sur des "crimes sexuels" commis par le Hamas le 7 octobre (vidéo) / Forum / 2 min. / le 8 décembre 2023
Les témoignages de violences sexuelles commises par le Hamas lors de l'attaque du 7 octobre se multiplient dans la presse israélienne. La police a ainsi indiqué avoir ouvert une enquête mi-novembre pour documenter les faits. Mais les ONG dénoncent la réaction tardive des organisations internationales face à ces crimes.

Les enquêteurs disent avoir recueilli environ 1500 témoignages, provenant notamment de survivants du festival de musique Nova et de secouristes. Ils ont été lus par une policière devant les parlementaires israéliens et lors d’une session spéciale des Nations unies qui s'est déroulée en début de semaine.

Une femme raconte notamment avoir vu une autre festivalière être violée par plusieurs hommes, tirée par les cheveux avant d’être abattue d’une balle dans la tête par un terroriste alors qu’il était toujours en train de la violer.

Des secouristes, parmi les premiers à être arrivés sur les lieux, ont décrit des scènes apocalyptiques. L’un d’eux raconte avoir trouvé deux femmes dénudées et les jambes écartées dans une maison.

La police, qui a annoncé l'ouverture de l'enquête le 14 novembre, indique également que des corps présentent des traces de sévices sexuels: des corps à moitié nus et des pelvis brisés.

>> Le suivi de la situation au Proche-Orient : Les combats continuent dans le nord et le sud de Gaza, avant un vote à l'ONU sur un cessez-le-feu

Enquête difficile

L'enquête est difficile, car les preuves n’ont pas été recueillies le 7 octobre et les jours suivants, ces zones étant encore des zones de guerre.

Le fait que les secouristes de l’organisation Zaka, qui sont intervenus sur place, soient formés à travailler avec la police après des attaques terroristes et qu'ils veillent surtout à l’intégrité des corps et à ce qu’ils soient traités selon le rite religieux, est une autre entrave à l'enquête.

Réactions internationales tardives

En Israël, juristes et militantes féministes ont dénoncé la réaction tardive des organisations internationales face à ces crimes.

Interrogée par la RTS plus tôt vendredi, ONU Femmes a fait part de "la honte" des organisations internationales de ne pas avoir réagi dès les premiers témoignages. Un slogan est apparu dans ce sens: "Metoo à moins que vous ne soyez juive".

L'organisation dit être consciente des inquiétudes et avoir rencontré des organisations de femmes israéliennes pour écouter les récits de ce qu’il s’est passé le 7 octobre. Aucune femme ne devrait se penser négligée ou abandonnée par l’ONU, assure-t-elle.

Pour Céline Bardet, juriste, enquêtrice criminelle internationale et directrice de l'ONG We Are Not Weapons of War, cette colère des ONG est légitime, mais elle remet les choses dans le contexte: "On ressent cette colère très fortement, mais je pense qu'elle est à nuancer, car l'ONU, en général, a besoin d'éléments et de temps avant de se prononcer", fait-elle remarquer dans Forum vendredi soir.

"Néanmoins, je m'aligne avec le fait que rien n'a été dit pendant un mois et demi, voire deux mois", ajoute-t-elle en précisant que son ONG a dénoncé ces crimes sexuels tout de suite. "Pour moi, ils (les ONG et les dirigeants internationaux, ndlr) ont loupé le coche."

Plusieurs raisons à ce délai

L'invitée de la RTS donne plusieurs raisons à ce délai de réactions. "Les crimes sexuels sont toujours la dernière roue, la chose que l'on regarde en dernier", avance Céline Bardet. Elle explique qu'il est difficile d'en parler à cause de la "stigmatisation" et du fait que le Hamas détient des otages. "Si des choses sortent, que va-t-il se passer pour eux?".

Elle évoque aussi la "sidération de la part d'Israël". "Je pense qu'ils ne comprennent pas encore ce qu'il s'est passé le 7 octobre", donc "tous ces éléments font que c'est difficile de parler de ces crimes sexuels".

Pour connaître l'ampleur de ces viols, Céline Bardet confie qu'il faudra attendre "plusieurs mois", pour une "documentation et une enquête plus précises". D'autant que, comme elle le rappelle, "la plupart des personnes qui en auraient subi sont mortes. C'est un obstacle compliqué".

Enfin, elle note qu'il sera "important de comprendre qui a commis ces crimes sexuels", car vu le mode opératoire, elle ne pense pas que le Hamas soit le seul coupable.

>> Ecouter son interview complète dans Forum vendredi :

La documentation des crimes sexuels lors de violences politiques: interview de Céline Bardet (vidéo)
La documentation des crimes sexuels lors de violences politiques: interview de Céline Bardet (vidéo) / Forum / 6 min. / le 8 décembre 2023

Sujet radio: Charlotte Derouin

Adaptation web: juma

Publié