Pour la première fois depuis de nombreuses années, une majorité de l'opposition serbe pro-européenne est parvenue à s'unir pour tenter de faire barrage au Parti progressiste serbe (SNS) d'Aleksandar Vucic. Leur objectif: éradiquer la corruption, obtenir des élections libres, développer un pluralisme des médias et adhérer à l'Union européenne.
Huit partis, de la droite, du centre droit et de gauche, affichent une liste commune: "La Serbie contre la violence". Leur coalition est née au lendemain des manifestations qui avaient émaillé le pays, après deux fusillades meurtrières.
Le 3 mai dernier, 8 enfants et le gardien de l'école Vladislav Ribnikar à Belgrade succombaient sous les balles d'un adolescent. Dusan est encore sous le choc, ses deux enfants s'en sont sortis mais ils étaient dans l'école: "dans les cortèges, les gens avaient besoin de se rassembler avec les familles des victimes".
Une campagne électorale tendue
Dans les rues de Belgrade, on observe une majorité de pancartes électorales pour le parti au pouvoir. Mais c'est dans les médias que le président Vucic est omniprésent: 40% du temps d'information sur les chaînes nationales, selon une étude du Bureau pour la recherche sociale (BIRODI), un think tank qui étudie notamment les temps d'antenne.
La chaîne de télévision N1 est le partenaire local de CNN International, et l'un des rares médias indépendants. "On est marqués comme "mercenaires étrangers", "ennemis d'Etat", simplement parce que l'on a un regard critique chaque fois qu'il y a un problème causé par le régime autoritaire", explique Igor Bozic, directeur de la chaîne.
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Dans les rangs de l'opposition, Biljana Djordjevic, co-leader du Front de la gauche verte (ZLF), affirme: "il y a des électeurs du Parti progressiste qui subissent du chantage ou qui se voient offrir des avantages. Les officiels utilisent aussi des ressources publiques pour faire pression sur ces électeurs". Elle qualifie la présidence d'un "régime hybride, un mélange de démocratie et d'autocratie: on peut participer aux élections, mais on ne peut pas les gagner".
"Vucic, un dictateur? Ce sont des bêtises", conteste Zoran, retraité et partisan du président serbe. "Il a créé des emplois, ouvert des usines et amené de l'investissement".
Contactés, les responsables du SNS, le Parti progressiste serbe, n'ont pas répondu à nos sollicitations.
Belgrade, le principal objectif
Selon les sondages, les partis au pouvoir devraient maintenir leur position au niveau de l'Assemblée nationale. La bataille politique se situera plutôt autour de la mairie de Belgrade, où l'opposition pro-européenne a des chances de l'emporter.
"Le parti au pouvoir contrôle presque toute la vie politique au niveau local, et une victoire dans la capitale serait bien plus que symbolique: elle pèse sur le plan économique et démographique", explique Daniel Bochsler, politicien suisse à l'Université de Belgrade.
"Cela permettrait aussi à l'opposition d'obtenir des responsabilités politiques et des tâches administratives, de prouver que leurs politiciens sont capables de gouverner".
Cédric Guigon, Aleksandra Planinic