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En 2024, plus de la moitié de la population mondiale votera

La moitié de la population mondiale va se rendre aux urnes pour des élections en 2024, à l'image de ces citoyens Zimbabwéens pour les élections présidentielle du 23 août 2023. [Reuters - Philimon Bulawayo]
Le monde vote en masse alors que la démocratie recule / Tout un monde / 7 min. / le 4 janvier 2024
Des élections se dérouleront dans plus de 70 pays en 2024. Mais toutes ne se valent pas et toutes ne riment pas avec démocratie. Les évolutions de ces dernières années ont plutôt montré un recul démocratique. Le développement de l'intelligence artificielle a rebattu les cartes. Tour d'horizon.

De l'Inde à l'Indonésie, en passant par la Russie, les Etats-Unis ou le Mexique, huit des Etats les plus peuplés du monde organisent cette année des élections, sans oublier le renouvellement du Parlement européen.

D'autres pays, du Mali à l'Ukraine, pour des raisons différentes, renoncent aux scrutins prévus. Et les nouveaux outils, comme l'intelligence artificielle, ajoutent leur grain de sable dans les machines électorales.

Les enjeux électoraux sont donc nombreux et importants, d'autant plus que l'idée même d'élection est de plus en plus contestée.

Loïc Blondiaux, politologue à l'Université Paris 1, estime qu'il faut différencier deux types de défiance face aux élections. "La première composante, c'est la mise en doute, relativement récente dans les pays occidentaux, de la procédure même de l'élection, de son déroulement, de son caractère équitable, du fait que le décompte des votes puisse être manipulé", indique-t-il dans l'émission Tout un monde.

"La deuxième renvoie à l'idée que l'élection elle-même a peu d'influence sur les politiques qui sont menées. Que ce soit la gauche ou la droite, ce sont les mêmes politiques qui seront prises. Il y a un doute sur la puissance même du pouvoir politique, sur sa capacité à changer le destin des citoyens. Ce doute conduit à ce que beaucoup n'aillent plus voter", déplore-t-il.

Autre ombre au tableau, alors que débute cette année record en termes d'élections au niveau mondial, c'est la victoire de candidats prêt à remettre en cause les fondements de la démocratie, une fois élu.

  • Election présidentielle aux Etats-Unis

Le 5 novembre 2024 se déroulera l'élection présidentielle américaine. Ce pourrait être l'occasion d'un match retour entre Donald Trump et Joe Biden.

L'ancien président Donald Trump pourrait à nouveau contester la légitimité du processus électoral et encourager un nombre encore plus grand de concitoyens à le faire. Plus d'un tiers des Américains estiment que la victoire de Joe Biden en 2020 n'était pas légitime.

>> Sur le sujet, lire : Donald Trump jugé "inapte" à la présidence par un deuxième Etat américain

  • Elections du Parlement européen

Les citoyens de l'Union européenne renouvelleront leur Parlement du 6 au 9 juin 2024. Les députés sont élus au suffrage universel direct à un tour pour un mandat de 5 ans. Ces élections européennes sont les premières organisées depuis le départ du Royaume-Uni le 31 janvier 2020.

  • Elections législatives en Europe

L'enjeu démocratique se situe aussi autour des élections nationales prévues dans différents pays de l'Union européenne cette année.

La Belgique votera pour la Chambre des représentants et les Parlements de Région et de Communauté le 9 juin 2024. Les élections communales se dérouleront le 13 octobre 2024.

Les élections législatives autrichiennes qui auront lieu le 30 septembre 2024 pourraient s'avérer l'une des plus cruciales alors que l'Europe s'efforce de contenir la poussée de l'extrême droite. Le Parti de la liberté d'Autriche (FPÖ), parti d'extrême droite, rassemble actuellement selon les sondages 30% des voix.

Les Anglais aussi voteront pour les législatives. Le Premier ministre Rishi Sunak a annoncé jeudi que les élections du Royaume-Uni se tiendront au second semestre, sans préciser de date précise, car elle est encore en consultation. Le parti travailliste séduit à nouveau, après 13 années des conservateurs au pouvoir, et une situation économique très difficile.

  • Elections dans les anciens territoires soviétiques

En Moldavie, où la présidente pro-européenne Maia Sandu termine son mandat à l'automne, il va falloir décider de poursuivre ou non sur cette voie pro-occidentale, sachant que le pays est divisé et que la Russie tente d'y retrouver son influence.

Moscou essaie aussi de le faire en Géorgie, où des élections doivent se tenir en octobre 2024.

  • Elections législatives en Inde

L'Inde, le pays le plus peuplé au monde devant la Chine depuis 2023, tiendra ses élections législatives au printemps. Presque un milliard d'habitants sont appelés à voter.

>> Lire : L'Inde détrône la Chine et devient le pays le plus peuplé du monde

La démocratie y est fragilisée par les tendances de plus en plus illibérales du parti au pouvoir de Narendra Modi, explique Christophe Jaffrelot, chercheur au centre CERI de Sciences Po.

"La compétition électorale n'est plus aussi équitable qu'elle l'était", explique-t-il. "D'abord parce que la couverture médiatique y est complètement déséquilibrée. Les grandes chaînes de télévision ont toutes été rachetées par des amis du pouvoir."

"Aussi parce que les ressources financières sont fortement déséquilibrées. Des estimations montrent que pour les élections de 2019, le parti au pouvoir, le BJP (Bharatiya Janata Party), avait dépensé 3,5 milliards de dollars dans sa campagne électorale, soit plus que toutes les autres forces réunies", argumente-t-il.

En échange de ces soutiens financiers, les hommes d'affaires obtiennent des passe-droits de la part de l'Etat.

"Droit sacré"

Mais l'appétit pour les élections est bien présent en Inde, et la participation généralement élevée, constate Christophe Jaffrelot.

"Le droit de vote est sacré en Inde. C'est une société hyper hiérarchique en termes de classes et de castes, avec une pauvreté de masse qui continue à être absolument inédite. Le droit de vote, c'est quelque chose que l'on fait valoir comme étant justement une façon d'exister, une façon d'être l'égal de l'autre."

"Longtemps, les pauvres ont davantage voté que les riches. Ce qui est unique dans les démocraties du monde. Maintenant, les riches votent plus parce qu'ils se reconnaissent en Narendra Modi", note-t-il encore.

  • Elections présidentielle et législatives à Taïwan

Parmi les scrutins de ce début d'année très attendus, il y a aussi les élections du président et du vice-président de Taïwan. Elles ne seront pas sans conséquence au niveau géopolitique, avec la pression de la Chine voisine.

>> Relire le sujet de l'émission Tout Un Monde sur les tensions entre la Chine et Taïwan : Taïwan de retour au centre de l'attention avant une présidentielle sous tension

Le 13 janvier, les 23 millions de Taïwanais se rendront aux urnes pour élire le successeur de la présidente de la République Tsai Ing-wen, en fonction depuis 2016, ainsi que les membres du Parlement et de nombreuses instances régionales.

  • Elections présidentielle et législatives au Mexique

Au Mexique, les citoyens voteront le 2 juin pour leur nouveau président, les membres de la Chambre des députés et ceux du Sénat de la république. Les deux principales candidates à la succession du président López Obrador sont des femmes, une tendance encore très minoritaire au niveau mondial.

Sujet radio: Isabelle Cornaz

Texte web: Julie Marty avec agences

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Des élections justes et libres dans une quarantaine de pays seulement

Mais en parallèle de ces élections, certains pays comme la Russie ou le Rwanda ne garantissent pas de scrutin libre et démocratique. Les présidents sortants ont en effet modifié la Constitution pour pouvoir se représenter en 2024.

Selon The Economist, les élections devraient être justes et libres dans une quarantaine de pays seulement, sur les 70 environ amenés à voter cette année.

L'arrivée de l'IA rebat les cartes

Le développement de l'intelligence artificielle (IA) va certainement s'imposer dans ces scrutins, comme c'était déjà le cas lors de la présidentielle en Argentine en 2023. Les deux principaux candidats ont créé des spots de campagne ressemblant à des super-productions hollywoodiennes afin de marquer l'esprit des électeurs sans dépenser beaucoup d'argent pour produire ces vidéos.

>> Sur le sujet, lire : L'ultralibéral et "antisystème" Javier Milei élu président de l'Argentine

Désinformation

Il y a donc un aspect financier, mais aussi des conséquences en termes de désinformation. Les deep fake, qui recréent l'apparence et la voix des candidats à l'identique, permettent par exemple de leur faire dire des propos qu'ils n'ont pas tenus et discréditer ainsi leur adversaire.

L'IA est utilisée aussi pour contourner la censure ou les différentes restrictions.

Au Pakistan, où des législatives se tiendront en février, l’ancien Premier ministre a utilisé l'intelligence artificielle pour diffuser un discours alors qu'il est détenu en prison. Il a écrit cette intervention lui-même mais sa voix a été clonée pour permettre de diffuser ce discours audio devant ses partisans sur les réseaux sociaux.