Le déblocage de l'autoroute A64 au niveau de Carbonne (Haute-Garonne), premier barrage d'agriculteurs à avoir été installé il y a 10 jours, était en cours à la mi-journée.
"On a été entendu, on a eu quelques réponses" même si "tout ne sera pas parfait de suite", a jugé Joël Tournier, l'un des porte-parole du mouvement à Carbonne, avec l'éleveur Jérome Bayle.
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Diminution des blocages
Selon la gendarmerie, le nombre de blocages diminue fortement: samedi à 06h00, il y avait moins de 40 actions touchant 28 départements sur 101 au total.
Mais le mouvement reste diffus, avec des situations qui varient localement à travers la France et des autoroutes restaient coupées notamment dans le Sud.
Pour tenter d'éteindre la révolte, le Premier ministre français Gabriel Attal a dévoilé vendredi des mesures d'urgence dont l'abandon de la hausse de la taxe sur le gazole non routier et des sanctions lourdes contre trois industriels ne respectant pas la loi sur les prix.
"Il faut aller plus loin"
La circulation a repris samedi à 11h00 sur l'A9 dans l'Hérault mais l'autoroute reste coupée dans le Gard. Sur place, Sébastien Gimenez, agriculteur à Redessan (Gard) fulmine : "hier soir, ce qu'a dit Gabriel Attal était, pour nous, du chinois. Il ne parle pas la même langue que nous...".
Ces annonces ne calment pas "la colère", a également insisté vendredi le président de la FNSEA Arnaud Rousseau, "il faut aller plus loin".
La Confédération paysanne, troisième syndicat agricole, classé à gauche, veut "continuer la mobilisation".
Accident mortel
Les agriculteurs ont exprimé un mélange de passion et de désespoir, les cortèges exhibant ici un pendu de paille, là affichant le slogan "Enfant on en rêve, adulte on en crève".
La mobilisation a été endeuillée mardi par la mort accidentelle d'une agricultrice et de sa fille sur un barrage à Pamiers (Sud-Ouest) où une marche blanche aura lieu samedi à partir de 13h30.
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afp/hkr
Sylvie Mermillod, agricultrice et maire: "Nous attendons une refonte de la politique agricole commune"
Un barrage a aussi été organisé en France voisine vendredi, sur la A41, principale artère entre Genève et Annecy.
Sylvie Mermillod, agricultrice et maire de la commune de Cruseilles, située à une dizaine de kilomètres de la frontière, se trouvait parmi les protestataires. Samedi, l'émission Forum l'a invitée à réagir aux annonces du Premier ministre Gabriel Attal, notamment la suppression de la hausse de la taxe sur le gazole non routier agricole.
Ces concessions ne sont pas suffisantes aux yeux de Sylvie Mermillod: "D'autres demandes ne sont pas satisfaites. Nous attendons une refonte de la politique agricole commune, pour revoir le libre-échange et avoir davantage d'équité entre les pays", déclare l'élue.
Les agriculteurs français doivent "enfin pouvoir vivre de leurs produits", lance-t-elle.
Sylvie Mermillod demande également des mesures pour épauler les jeunes agriculteurs et compenser les départs à la retraite. "En France, l'avenir des exploitations est loin d'être assuré. De nombreux jeunes sont très motivés pour s'installer en agriculture. Mais les conditions sont très difficiles", argumente-t-elle.
La mobilisation commence aussi en Suisse
Les agricultrices et agriculteurs suisses commencent aussi à se mobiliser. Mercredi, Arnaud Rochat, 23 ans, employé agricole à Bonvillars (VD), a lancé un groupe Facebook "Révolte agricole Suisse". "Je me suis dit, si maintenant personne ne fait rien, si on ne bouge pas, quand est-ce qu'on pourra le faire ", raconte-t-il.
Le groupe privé rassemble déjà plus de 1500 membres - trois jours à peine après son ouverture. Arnaud Rochat, lui-même, reconnaît qu’il ne pensait pas que ça irait si vite, mais pour lui "ça montre l'intérêt des agriculteurs suisses, leur soutien et leur envie de changement".
Dans la description du groupe, Arnaud Rochat propose de ressortir "bonhommes de paille et banderoles sur le devant des fermes avec des messages forts" pour alerter sur le taux de suicide très élevé chez les agriculteurs, la baisse des revenus agricoles, les marges excessives ou encore le manque de main d’oeuvre.
Pour l’instant, il n’envisage pas d’actions aussi spectaculaires qu’en France "avec des tracteurs et des tas de fumier", mais se dit néanmoins prêt à aller jusqu’au bout pour améliorer la "condition agricole" en Suisse aussi.
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