La ministre de la Justice, Sabine Leutheusser-Schnarrenberger, a
reproché au Vatican d'avoir entravé les enquêtes sur les abus
sexuels dans des établissements scolaires catholiques, où régnait,
a-t-elle dit, "un mur de silence".
En vertu d'une directive de l'Eglise datant de 2001, "des abus
aussi graves sont soumis à la confidentialité du pape et ne doivent
pas être divulgués à l'extérieur de l'Eglise", a déploré la
ministre. Cette lettre aux évêques, qui déterminait les "délits les
plus graves" dont le Vatican doit être informé, émanait du cardinal
Joseph Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la doctrine
de la foi et qui devait devenir Benoît XVI.
Omerta de l'Eglise?
Sabine Leutheusser-Schnarrenberger y voit un signe que l'Eglise,
en cas de soupçons d'abus sexuels, examine d'abord l'affaire en
interne, sans saisir la justice, et qu'elle suggère aux coupables
présumés de se dénoncer. Faux, a rétorqué l'évêque de Trêves
Stephan Ackermann, chargé par la conférence épiscopale de faire la
lumière dans ce scandale qui secoue l'Allemagne depuis fin janvier.
Il fait valoir que dans "la pratique", l'Eglise réclame des
enquêtes du parquet.
Devant les dernières
révélations de pédophilie, la ministre a réitéré son invitation à
une "table ronde" avec des représentants de l'Eglise pour discuter
notamment de "certains dédommagements" à accorder aux victimes. La
conférence épiscopale allemande a rejeté à plusieurs reprises cette
proposition, au motif que les abus sexuels sur mineurs n'étaient
"pas un problème spécifique à l'Eglise catholique".
Le ministère de la Famille prévoit une table ronde le 23 avril
avec les représentants du secteur éducatif et des Eglises
catholique et protestante. Le président de la conférence épiscopale
allemande, Robert Zollitsch, doit rencontrer le pape le 12 mars au
Vatican.
afp/cab
Les révélations se succèdent
Dans la plupart des cas dévoilés ces dernières semaines, les faits sont prescrits et nombre des auteurs présumés sont décédés.
Mais lundi, l'évêché d'Augsburg, en Bavière, a annoncé avoir averti le parquet d'une affaire datant de 1999 "en raison de nouveaux indices".
Toujours dans la très catholique Bavière, l'évêché de Ratisbonne a reconnu vendredi deux anciens cas d'abus sexuels avérés (1958) et plusieurs soupçonnés dans l'institution millénaire des "petits chanteurs de Ratisbonne", où le frère du pape, Georg Ratzinger, était maître de chapelle de 1964 à 1993.
Celui-ci affirme n'avoir jamais été au courant.
Le même jour, un rapport révélait qu'une centaine d'enfants avaient été "massivement victimes de sévices" infligés pendant des décennies par une dizaine de prêtres dans l'établissement bénédictin d'Ettal, dépendant de l'évêché de Munich.
Josef Ratzinger "était archevêque de Munich et Freising de 1977 à 1982. La question est de savoir s'il était au courant à l'époque et comment il a réagi et s'il a agi", a déclaré à l'AFP Christian Weisner, du mouvement de catholiques contestataires "Nous sommes l'Eglise".
Ecole non religieuse aussi touchée
Samedi, une école allemande, non religieuse et associée à l'UNESCO, a reconnu samedi la pratique d'abus sexuels sur ses élèves dans les années 1970 et 1980. De 50 à 100 victimes seraient recensées.
L'établissement Odenwald (OSO) à Heppenheim (ouest de l'Allemagne), dont la pédagogie s'appuie sur "l'épanouissement libre de chaque enfant", a reconnu "des années d'abus commis par des pédagogues sur des élèves" dans le quotidien "Frankfurter Rundschau".
Le chef de file des écologistes au Parlement européen, Daniel Cohn-Bendit, y a été scolarisé entre 1958 et 1965, comme l'un des fils de l'ancien président allemand de la République fédérale d'Allemagne (RFA) Richard von Weizsäcker, Andreas, entre 1969 et 1976, selon le site internet de l'école.