Des centaines d'habitants se sont massés sous une tente pour la
réunion municipale extraordinaire organisée au début des cérémonies
commémorant le tremblement de terre qui a ravagé cette ville
médiévale et ses environs le 6 avril 2009. Il avait fait 308 morts
et privé de logement 80'000 personnes.
Des voix se sont élevées pour critiquer le maire Massimo Cialente
et son équipe qui se sont défendus en soulignant qu'il leur avait
fallu d'abord gérer l'urgence.
Ville "figée"
"La ville est restée figée, vidée de ses habitants, il y a eu
seulement quelques mises en sécurité", a critiqué Anna Colasanto.
Cette habitante est membre du comité des brouettes qui a manifesté
plusieurs dimanches de suite pour se réapproprier le centre
historique envahi par les décombres (voir ci-contre).
Certains ont protesté parce qu'il n'y
avait pas assez de place sous la tente: "comment voulez-vous
reconstruire la ville si vous n'êtes pas capables d'organiser un
conseil municipal", a dénoncé Eugenio Colasanto, responsable du
comité de sauvegarde de la vieille ville.
D'autres ont mis en avant le problème du logement alors que sur
les 120'000 habitants de L'Aquila et villages avoisinants, plus de
52'000 n'ont toujours pas réintégré leur habitation. Et quelque
14'000 ont reçu des logements flambant neufs surnommés les maisons
Berlusconi, mais au milieu de nulle part et sans transports
publics, ni services ni magasins.
Taxe de solidarité réclamée
Le maire a pour sa part appelé l'assistance "à regarder vers
l'avenir alors que jusqu'à présent c'était le temps de la douleur".
Il a demandé au gouvernement de créer une "taxe spéciale de
solidarité" pour financer la reconstruction comme pour d'autres
séismes.
Les esprits se sont calmés quand vers 22h00 sont parties les
premières marches aux flambeaux rassemblant des milliers de
citoyens mais aussi de volontaires (protection civile, croix rouge
et autres organisations italiennes) qui avaient participé aux
secours.
Quatre cortèges devaient converger vers la place de la cathédrale
où à 3h32, l'heure exacte du séisme, où ont été égrenés les noms
des défunts au son des cloches avant une messe solennelle.
D'autres cérémonies sont prévues ce mardi à L'Aquila, notamment
une grande chaîne humaine avec lâcher de ballons. Aucun déplacement
du président du Conseil Silvio Berlusconi ou du président de la
République Giorgio Napolitano n'était prévu pour cette
commémoration.
afp/cht
L'Aquila, toujours ville morte
Un an après le séisme, des tonnes de gravats rendent L'Aquila inhabitable.
Le centre historique la ville, cité médiévale au riche patrimoine artistique, est toujours une ville morte, au grand dam de nombreux citoyens de la capitale des Abruzzes. Ces derniers reprochent aux autorités d'avoir privilégié la construction en urgence et à un coût élevé de logements au milieu de nulle part, dépourvus de toute infrastructure (transports, services publics, magasins). Et ce, aux dépens de la remise en état du centre historique.
"Toutes les ressources ont été dépensées pour construire ex nihilo de nouveaux quartiers qui sont des cités dortoirs manquant de tout", confie le porte-parole de l'association de défense des victimes du séisme. "Cet argent aurait pu être utilisé autrement, d'autant plus que ces maisons ont coûté trois fois plus que prévu. Avec les mêmes coûts, on aurait pu loger 45'000 personnes, pas seulement 14'000", renchérit le cofondateur du Comité pour la sauvegarde du centre historique.
Au total, sur les 120'000 habitants de L'Aquila et des alentours touchés par le séisme, 52'275 n'ont toujours pas réintégré leur maison: logés dans des hôtels sur la côte adriatique ou des casernes, ils bénéficient d'une assistance financière.
"Il faudra des années pour restaurer certains monuments mais, pour les habitations, c'est une affaire de huit mois à deux-trois ans", estime le porte-parole. "Il faut maintenant remettre en état l'eau, l'électricité, le gaz... mais rien n'a été fait, pas même une étude de faisabilité".
La "révolte des brouettes", lancée par un groupe d'habitants venus plusieurs dimanches de suite dans le centre pour dégager eux-mêmes les décombres, a forcé l'administration à réagir. Selon la protection civile, il resterait encore entre 1,5 et 3 millions de mètres cubes de gravats à évacuer.
La réalisatrice Sabina Guzzanti, auteur de "Viva Zapatero!", est en train de monter un film-enquête à base de témoignages intitulé "Draquila - L'Italie qui tremble". Elle devrait y évoquer un vaste scandale de corruption pour des malversations lors de l'octroi de marchés publics concernant des chantiers prioritaires dont L'Aquila.