A propos des enquêteurs pakistanais, le rapport dévoilé jeudi soir affirme que "des responsables, craignant notamment l'implication des services de renseignement, ne savaient pas vraiment jusqu'où ils pouvaient aller dans l'enquête, même s'ils savaient pertinemment, en tant que professionnels, que certaines mesures auraient dû être prises".
"L'assassinat de Benazir Bhutto aurait pu être évité si des mesures de sécurité adéquates avaient été prises", poursuit le document rédigé par des experts emmenés par l'ambassadeur du Chili à l'ONU. Le rapport de 65 pages souligne que la responsabilité de la sécurité de Bhutto reposait sur "le gouvernement fédéral, le gouvernement du Punjab et sur la police de Rawalpindi".
Sécurité insuffisante
"Aucune de ces entités n'a pris les mesures pour répondre aux risques urgents, extraordinaires et récents qui menaçaient" Mme Bhutto. Il est ainsi noté que le gouvernement pakistanais n'est pas parvenu à fournir à Benazir Bhutto un service de sécurité aussi rigoureux que celui qui avait été mis en place en octobre 2007 pour deux autres anciens Premiers ministres qui appartenaient au parti politique soutenant le président Pervez Musharraf.
"Ce traitement discriminatoire est profondément troublant vu les tentatives d'assassinat auxquelles elle a été confrontée trois jours avant et les menaces spécifiques qui pesaient sur elle et qui avaient été identifiées" par les services de renseignement pakistanais. Le document ajoute que l'enquête pakistanaise "a manqué d'instructions, était inefficace et manquait d'implication pour identifier les criminels et les traduire en justice".
L'ambassadeur du Pakistan à l'ONU Abdullah Hussain Haroon, qui devait rencontrer la presse après avoir reçu une copie du rapport, a finalement annulé le rendez-vous. L'ONU avait annoncé le 30 mars que la remise du rapport, initialement prévue le 31 mars, serait reporté au 15 avril, à la demande d'Islamabad. La Pakistan "veut un rapport complet étayé par des faits", avait expliqué le ministre de l'Intérieur, Rehman Malik. Il n'a pour l'instant pas réagi (lire ci-contre).
Tuée par une explosion
Avant le report de la remise du rapport, l'ONU avait prévu, par mesure de sécurité, de fermer pendant trois jours tous ses bureaux au Pakistan, ensanglanté depuis trois ans par une vague d'attentats islamistes. La commission d'enquête était chargée "d'enquêter sur les faits et circonstances de l'assassinat" et non de déterminer "la responsabilité criminelle des auteurs" qui reste du ressort des seules autorités pakistanaises.
Benazir Bhutto, Premier ministre à deux reprises dans les années 1990, a été assassinée le 27 décembre 2007, alors qu'elle sortait d'un meeting électoral à Rawalpindi, dans la banlieue d'Islamabad. Alors qu'elle saluait la foule, le haut du corps hors de sa voiture blindée, un homme a ouvert le feu sur elle avant de faire exploser la bombe qu'il portait sur lui.
Une équipe de Scotland Yard a conclu que le souffle de l'explosion avait projeté sa tête contre la poignée du toit ouvrant alors qu'elle se baissait, provoquant une blessure mortelle. Les autorités pakistanaises soutiennent cette version que l'entourage de Mme Bhutto conteste.
afp/ps
Le Pakistan "étudie le rapport"
Le Pakistan ne réagira à l'enquête de l'ONU sur l'assassinat de l'ex-Premier ministre Benazir Bhutto en 2007 qu'après avoir étudié le rapport remis dans la nuit, a annoncé Islamabad.
"Nous lisons le rapport et une réaction détaillée sera rendue publique après", a déclaré à l'AFP vendredi matin Farhatullah Babar, le porte-parole de la présidence pakistanaise, rappelant que le gouvernement, issu en 2008 du parti de Benazir Bhutto, mène sa propre enquête.