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26 avril 1986, le jour où Tchernobyl a traumatisé l'Europe

Le 26 avril 1986 à 1h23 et 44 secondes du matin, le réacteur no4 de la centrale de Tchernobyl, en Ukraine, explose. Il s'agit de l'une des pires catastrophes industrielles du 20e siècle, en raison de l'explosion elle-même, du nuage radioactif qui s'est répandu sur l'Europe et de la volonté soviétique de cacher les faits.

Trente ans après, certaines conséquences restent visibles en Ukraine et ailleurs en Europe, de la radioactivité qui subsiste dans certains sols à la zone d'exclusion qui fait de la ville voisine Pripyat une cité fantôme.

>> Retour chronologique sur cette catastrophe, tout d'abord heure par heure puis jour par jour, avec des photos, des vidéos, des audios et des témoignages de l'époque. Les heures sont parfois approximatives en raison d'un manque de documentation. Les faits incertains ou contestés sont signalés dans le texte.

Frédéric Boillat

25 avril 1986

Un jour comme un autre à Pripyat

En ce 25 avril, les 49'360 habitants de Pripyat, en République socialiste soviétique d'Ukraine, une région de l'Union soviétique, vaquent à leurs occupations habituelles. Située à 3 kilomètres du réacteur nucléaire de Tchernobyl et à 110 kilomètres de Kiev, cette ville a été construite dans les années 1970 en même temps que la centrale, en vue d'y accueillir les ouvriers et leurs familles.

La ville de Pripyat et la centrale toute proche, avant la catastrophe.

D'importants espaces verts et des forêts ont été préservés en nombre pour effacer la présence de la centrale. Cinémas, cafés, écoles de musique, crèches, piscines ou plan d'eau navigable, les autorités soviétiques ont voulu offrir aux habitants un cadre de vie agréable.

25 avril - 12h

Un test de routine prévu à Tchernobyl

Un test de l'alimentation électrique est prévu à la centrale de Tchernobyl, même s'il est périlleux de l'effectuer alors que le réacteur no 4 est en production. Dans ce cadre, la puissance thermique du réacteur doit être fortement réduite. Le système d'alarme du refroidissement doit être arrêté pour faciliter l'opération.

Le réacteur no 4 de la centrale de Tchernobyl est un réacteur de type RBMK. C’est un système conçu en Union soviétique dans les années 1960. Son coeur est composé d'un gros bloc de graphite traversé par des canaux verticaux dans lesquels sont placés des tubes de force renfermant du combustible nucléaire. Le refroidissement est assuré par de l'eau circulant dans des tubes.

Selon les experts, ce type de réacteur, qui n'est pas utilisé en Europe occidentale, présente des faiblesses significatives du point de vue de la sécurité: instabilité importante du réacteur à certains niveaux de puissance, temps de réaction du système d’arrêt d'urgence, absence d'enceinte de confinement.

Comme une autre centrale du pays est tombée en panne ce jour-là, le test est finalement reporté en soirée et le réacteur est maintenu à mi-puissance.

25 avril - 23h

La puissance du réacteur est réduite en vue du test

L'autorisation de procéder au test de l'alimentation électrique est donnée par le centre de régulation et la réduction de la puissance de la centrale reprend. Il faut abaisser la puissance de 1600 à 700 megawatts pour procéder à l'essai.

Mais comme ce type de réacteur peut devenir instable à certains niveaux de puissance, le coeur de la centrale devient vite instable et difficile à contrôler. Selon les experts de l'Institut français de sûreté nucléaire, il aurait fallu procéder à une stabilisation du réacteur et arrêter l'essai, mais les opérateurs de la centrale sont pressés de rattraper le retard pris durant la journée et ils décident de réaliser l'essai malgré les alertes émises par le système.

Le centre de contrôle de la centrale de Tchernobyl, ici en novembre 1985.

26 avril - 0h28

L'engrenage fatal est lancé

Un opérateur fait chuter par erreur la puissance du réacteur à 30 megawatts, ce qui provoque selon les spécialistes un empoisonnement du réacteur au xénon, soit une accumulation de xénon 135, ce qui perturbe le processus de fission nucléaire.

Les opérateurs essaient de rétablir la puissance, mais le xénon 135 qui a été accumulé entretemps atteint la limite à 200 megawatts. Ils décident alors de retirer les barres de commande qui servent à piloter la température du réacteur. La puissance remonte, ce qui rassure le chef opérateur, même si les techniciens sont toujours inquiets d'un possible emballement du réacteur.

26 avril - 1h23'04"

Le test technique démarre

Malgré toutes les incertitudes, l'essai proprement dit démarre comme prévu. Le chef d'équipe souhaite l'interrompre, mais son supérieur s'y oppose. Les vannes d'alimentation en vapeur de la turbine sont arrêtées, ce qui fait augmenter la pression dans le réacteur.

Alors que la température monte dans le coeur, le réacteur se met à diverger de manière incontrôlable. Le réacteur devient trop puissant pour sa capacité. Et sa température dépasse vite les seuils de tolérance.

26 avril - 1h23'40"

L'arrêt d'urgence est ordonné, sans effet

Le chef opérateur prend conscience de la gravité de la situation et ordonne l'arrêt d'urgence du réacteur no 4. La totalité des barres de commande qui servent à réguler la température commencent à descendre dans le coeur. Sans succès car le réacteur est déjà bien trop chaud, ce qui a déformé les canaux destinés aux barres de commande. La réaction en chaîne ne peut plus être stoppée.

26 avril - 1h23'44"

L'explosion

Le pic de puissance est atteint, passant de 200 megawatts à 100'000, plus de 100 fois la puissance normale du réacteur. Selon les simulations, de nombreuses barres de contrôle se disloquent et les blocs de graphite prennent feu.

Une première explosion retentit, immédiatement suivie d'une seconde, soulevant le plafond de protection du réacteur, d'un poids de 2000 tonnes. Son coeur en fusion devenu incontrôlable est exposé à l'air libre. Des débris du bâtiment sont projetés jusqu'à plusieurs kilomètres d'altitude. Plusieurs foyers s'allument dans l'installation nucléaire.

>> Les images du réacteur pulvérisé par l'explosion :

Les images des dégâts juste après l'accident nucléaire de Tchernobyl
Les images des dégâts juste après l'accident nucléaire de Tchernobyl / L'actu en vidéo / 40 sec. / le 19 avril 2016

26 avril - 1h30

On ne saisit pas l'ampleur de la catastrophe

Un employé est tué sur le coup et un autre est très grièvement blessé lors de l'explosion. Les techniciens réveillent le directeur de la centrale, mais tous ne voient pas au-delà du simple accident, ne comprenant pas immédiatement l'ampleur de la catastrophe.

Dans la nuit, le ministère de l'Energie est aussi averti, puis tout le gouvernement. Par négligence ou souci de cacher l'ampleur du drame, tout le monde semble minimiser les dégâts.

26 avril - 4h

Des émissions radioactives immédiates et importantes

Ce sont de grosses quantités de produits radioactifs contenus dans le coeur du réacteur qui sont rejetées dans l'atmosphère. Les émissions les plus importantes ont lieu immédiatement après l'explosion. On évoque une intensité équivalente à 200 bombes comme celle d'Hiroshima.

En dix jours, ce sont au total 12 milliards de milliards de becquerels qui sont envoyés dans l'air, soit 30'000 fois l'ensemble des rejets radioactifs atmosphériques émis en une année par les installations nucléaires alors en exploitation dans le monde.

>> Les quantités de rejets radioactifs jour par jour, selon l'IRSN : Les rejets radioactifs hors de la centrale au jour le jour.

26 avril - 6h

Des pompiers envoyés à la mort

Pour éteindre l'incendie, les responsables appellent simplement les pompiers de Pripyat. Une quinzaine d'entre eux sont envoyés sur le site et 200 employés de la centrale interviennent à des niveaux mortels de radioactivité. La plupart sont finalement évacués avec de premiers symptômes comme des malaises, des vomissements et des brûlures.

Après d'intenses souffrances, plusieurs d'entre eux trouvent la mort durant l'intervention et de nombreux autres meurent dans les mois suivants des suites des irradiations.

En fin de nuit, la plupart des feux sont éteints. Le site est enveloppé d'une épaisse vapeur toxique et recouvert d'une masse d'eau tout aussi toxique, provenant à la fois du réacteur et de l'eau déversée par les pompiers.

Quand vous êtes sur le toit, vous comptez 1,2,3 jusqu'à 90. Après vous jetez vos outils et revenez en courant

Un responsable aux liquidateurs

>> Les images des premières interventions (extrait de Temps Présent, 25 avril 1996) :

Les liquidateurs de Tchernobyl
Les liquidateurs de Tchernobyl / Info en vidéos / 1 min. / le 11 avril 2016

26 avril - 7h

Les habitants de Pripyat se réveillent, ignorant tout

Les populations des alentours, ignorant tout des dangers, entament leur journée au travail, à l'école ou à la maison. Ils sont tout d'abord exposés au panache fortement chargé en fines poussières radioactives. Ils sont ensuite exposés aux rayonnements émis par les dépôts au sol. Et ils ingéreront vite de la nourriture contaminée, comme le lait et les légumes.

26 avril - 10h

Silence des autorités

Durant toute la journée du 26 avril, les autorités soviétiques ne communiquent rien et il semble que le chef du Kremlin Mikhaïl Gorbatchev n'est lui-même pas mis au courant avant le lendemain. Les responsables qui étaient informés ont semble-t-il jugé que la panique était nettement plus dangereuse que la radioactivité.

26 avril - 21h

L'incendie reprend

La chaleur dans le réacteur demeure très importante et elle finit par provoquer la combustion spontanée des gaz libérés par le coeur. D'importantes flammes sortent à nouveau de la centrale. Les pompiers n'arrivent pas à éteindre le feu.

27 avril - 10h

L'armée intervient avec des hélicoptères

Devant l'impuissance des pompiers au sol, les autorités décident de mobiliser l'armée et une trentaine d'hélicoptères pour maîtriser le feu. Pour l'étouffer, 5000 tonnes de matériaux divers (sable, argile, plomb...) sont déversés sur le réacteur au cours de 1800 missions héliportées durant une dizaine de jours. Là aussi, les pilotes sont exposés à des doses de radiation mortelles.

Un hélicoptère intervenant à Tchernobyl.

27 avril - 14h

Les habitants de Pripyat évacués

Plus de 24 heures après l'explosion, les habitants de Pripyat sont prévenus de la catastrophe via la radio locale à 13h10 et on leur dit de se réunir devant leur maison pour une évacuation à partir de 14h. Les autorités distribuent des comprimés d'iode, mais ne donnent que peu d'informations.

Vingt autobus et cinq camions sont acheminés sur place. On dit aux habitants de n'emporter que le strict minimum car ils seront de retour dans 2 ou 3 jours. Ils sont dans un premier temps emmenés dans une ville voisine, elle-même aussi contaminée. Les premiers symptômes des radiations sont visibles chez beaucoup d'entre eux.

Plusieurs heures plus tard, la police fait du porte-à-porte dans la ville déserte pour déloger les personnes qui ont voulu éviter l'évacuation. Au final, les autorités décident d'évacuer tout le monde dans un rayon de 30 km autour du réacteur.

>> Les images de l'évacuation (extrait de Temps Présent, 25 avril 1996) :

L'évacuation de Pripyat après la catastrophe de Tchernobyl
L'évacuation de Pripyat après la catastrophe de Tchernobyl / Info en vidéos / 1 min. / le 11 avril 2016

27 avril - 15h

Silence des autorités

Près de 40 heures après l'explosion, le gouvernement soviétique russe n'a toujours pas annoncé l'accident au public ou aux gouvernements étrangers.

28 avril - 10h

Première alerte en Suède

Soixante heures après l'explosion, les autorités suédoises font savoir que la centrale nucléaire de Forsmark, à 60 km de Stockholm, a été évacuée après la découverte de niveaux de radioactivité plus élevés que la normale. Quelque 600 travailleurs sont priés de s'en aller pendant que 100 autres restent sur place pour en chercher la cause.

28 avril - 15h

Radioactivité en Scandinavie, l'URSS mise en cause

Plusieurs stations scandinaves annoncent un taux de radioactivité anormalement élevé, sans danger pour l'homme disent-elles. La Suède et le Danemark font état de niveaux de radioactivité 5 fois plus forts que la normale, la Finlande 10 fois et la Norvège 60 fois.

Pour la première fois, les experts pensent que cela provient d'un accident nucléaire en URSS. Un diplomate suédois en poste à Moscou téléphone à plusieurs agences gouvernementales pour avoir des éclaircissement. Il n'obtient aucune explication.

28 avril - 19h

Moscou sort de son silence

Près de trois jours après le drame, l'Union soviétique admet l'accident nucléaire et l'annonce au monde via l'agence officielle Tass:

Un accident s'est produit dans la centrale nucléaire de Tchernobyl et l'un des réacteurs atomiques a été endommagé. Des mesures ont été prises pour éliminer les conséquences de l'accident. Les personnes blessées ont été prises en charge

L'agence Tass

Tass ajoute que cet accident est le premier de ce type à se produire en Union soviétique et énumère une série de catastrophes comparables survenues dans divers autres pays.

>> Le communiqué a ensuite été lu à la télévision russe (extrait de Temps Présent, 25 avril 1996) :

L'annonce de l'accident a la TV russe
L'annonce de l'accident de Tchernobyl la TV russe / Info en vidéos / 24 sec. / le 11 avril 2016

A commencer par UPI et AFP, toutes les agences de presse mondiales reprennent et diffusent rapidement l'information. Seul ajout de leur part: des diplomates présents à Moscou pensent que cette annonce inhabituelle pour l'URSS signifie que l'accident est grave.

28 avril - 22h

Les Suisses apprennent la nouvelle à la radio

En Suisse comme ailleurs, personne ou presque n'avait jamais entendu parler de Tchernobyl. On découvre donc subitement l'existence de cette centrale et le drame qui s'y est joué.

29 avril - 9h

On cherche des explications

Alors que Moscou demeure très économe en informations, plusieurs gouvernements dénoncent cette opacité. Un diplomate soviétique à Helsinki admet ainsi que cet accident est "le pire jamais survenu dans le monde", mais n'en dit pas plus.

Washington déclare de son côté espérer que les victimes et les dommages matériels soient réduits et offre son aide technique et humanitaire à l'URSS. Les Etats-Unis demandent la meilleure coordination possible entre tous les pays concernés et espèrent que l'URSS fournira des informations sur l'accident en temps opportun.

Selon l'agence UPI, les experts suédois indiquent que l'accident à la centrale pourrait avoir conduit à l'effondrement du réacteur. La composition des particules indique par ailleurs de possibles dommages dans le coeur de la centrale.

>> Le sujet n'est pas encore en Une du New York Times le 29 avril : La Une du New York Times du 29 avril 1986.

29 avril - 11h

Au moins 2000 morts, selon un témoin

Un résident de Kiev en contact avec les hôpitaux et les secours indique à l'agence UPI par téléphone qu'entre 10'000 et 15'000 personnes ont été évacuées de Pripyat. Selon lui, 80 personnes sont mortes immédiatement et 2000 sur le chemin de l'hôpital. Tous les hôpitaux sont remplis de personnes souffrant de blessures dues aux radiations. UPI dit ne pas pouvoir dans l'immédiat confirmer ce témoignage.

29 avril - 13h

En ouverture du TJ Midi

>> Le point avec Abraham Zisyadis dans le TJ Midi de la TSR:

Les informations ne nous parviennent qu'au compte-gouttes

Abraham Zisyadis
L'annonce de l'accident au TJMidi
L'annonce de l'accident de Tchernobyl au TJ Midi du 29 avril / Info en vidéos / 48 sec. / le 11 avril 2016

29 avril - 14h

Moscou demande de l'aide

Le feu consume toujours le centre de la centrale et les responsables de la sécurité soviétiques sont incapables de l’arrêter. L'URSS fait appel à la Suède et à l'Allemagne de l'Ouest pour l'aider. Moscou demande des conseils sur la manière de venir à bout d'un feu de graphite dans une centrale nucléaire.

La ville de Kiev ne serait pas menacée, annoncent par ailleurs des sources occidentales à Moscou. Le pouvoir central ferme Kiev aux diplomates et aux journalistes étrangers.

29 avril - 16h

La modélisation du panache radioactif

Même si les autorités suisses se montrent rassurantes, aucune mesure radioactive n'ayant été mesurée, la simulation du déplacement du nuage radioactif est claire: le panache est tout proche d'atteindre la Suisse. C'est l'Institut français de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) qui a réalisé cette modélisation en 2005.

29 avril - 18h

Moscou admet deux morts

"Les informations diffusées en Occident faisant état de milliers de morts (...) sont largement exagérées, les victimes se comptent en dizaines", déclare le vice-ministre soviétique de l'aviation civile lors d'une conférence de presse à Washington.

Dans la foulée, l'agence Tass donne davantage de détails: l'URSS admet que cet accident est un désastre et que deux personnes ont trouvé la mort. L'agence précise que les habitants de trois quartiers autour de la centrale ont été évacués. Et d'ajouter que la situation au niveau des radiations est contrôlée régulièrement.

>> Le point avec le correspondant à Moscou Jürg Bissegger dans le Journal de la Radio Suisse romande:

Le Soviétique moyen commence à deviner lentement que quelque chose d'important s'est produit mais l'information officielle ne lui permet en aucune manière de se faire une idée de l'ampleur du drame

Jürg Bissegger

30 avril - 6h

Le nuage radioactif arrive en Suisse

Descendu de Scandinavie vers l'Allemagne et l'Autriche, le nuage atteint la Suisse le 30 avril dans la nuit. Si une partie des particules radioactives se sont dissoutes durant son trajet, il contient encore des doses radioactives importantes.

Selon l'Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN), un poste d'alerte grison a tout d'abord enregistré une faible hausse de la radioactivité. Celle-ci a ensuite augmenté peu à peu durant la matinée, atteignant des valeurs deux à quatre fois supérieures à la normale vers 10h. Il s'agit surtout d'iode 131, de césium 134 et 137 et plus faiblement de strontium 90.

Dans les zones montagneuses où les pluies sont plus abondantes, l'activité des dépôts est plus importante, ce qui explique des concentrations très différentes à l'intérieur même du territoire suisse.

Selon les valeurs communiquées par le Conseil fédéral en 2002, les régions les plus touchées sont le Tessin, la Suisse orientale et quelques zones du Jura: "La quantité de césium 137 par m2 atteignait environ 40'000 becquerels au mètre carré au Tessin, 15'000 en Suisse orientale et 5000 dans le Jura le long d'une ligne Chasseral-Chasseron-Vallée de Joux-La Dôle. Dans des régions inhabitées, situées à une altitude allant de 1500 à 2500 mètres, des valeurs ponctuelles plus élevées ont été observées."

>> Les zones les plus touchées en Suisse : Les zones les plus touchées en Suisse (source IFSN).

30 avril - 14h

Un nouveau bilan de 2 morts et 197 blessés

Deux morts et 197 personnes hospitalisées, tel est le nouveau bilan du gouvernement soviétique. "Le niveau de radiations à la centrale de Tchernobyl et alentours s'améliore. L'état de l'air dans le reste de la région de Kiev et à Kiev ne présente pas de danger", affirme un communique diffuse par l'agence Tass. Et 49 des 197 personnes hospitalisées ont déjà quitté l'hôpital.

Dans le même temps, un radio-amateur soviétique relayé par les agences occidentales affirme que l'accident a "certainement fait des centaines de morts, mais peut-être beaucoup, beaucoup plus". Et il précise que les sauveteurs ne peuvent pas s'approcher des cadavres à cause de la radioactivité.

>> Le point dans le journal de 13h d'Antenne 2:

Il y avait au cinéma le syndrome chinois, la réalité dépasse aujourd'hui la fiction, il y a désormais un syndrome soviétique

Noël Mamère

30 avril - 16h

Les critiques du DFAE à l'ambassadeur russe

L'ambassadeur d'URSS en Suisse Ivan Hippolitov demande un rendez-vous au Département fédéral des affaires étrangères pour l'informer officiellement de la catastrophe. Il est reçu au Palais fédéral par le secrétaire d'Etat Edouard Brunner.

En réponse, selon le détail fourni par l'ats, Edouard Brunner exprime ses condoléances pour les victimes, mais aussi l'étonnement et les regrets de Berne que l'URSS ait attendu quatre jours pour annoncer un accident de cet ampleur.

30 avril - 19h

Premières mesures en Europe

Alors que le président américain Ronald Reagan a appelé Moscou à informer le monde des conséquences de la catastrophe pour "minimiser le danger", plusieurs pays européens prennent des mesures. La première, pour la plupart d'entre eux, est de rapatrier leurs ressortissants.

En Suède, où la radioactivité mesurée dépasse de 200 fois les niveaux habituels, les autorités recommandent aux parents de ne pas laisser sortir leurs enfants et suspendent provisoirement toute importation de produits alimentaires frais en provenance de régions ayant pu être contaminées. En Pologne, un traitement anti-radiation est administré à tous les enfants de moins de 16 ans dans plusieurs régions.

Le nuage venu d'Ukraine s'est arrêté net à la frontière

Autorités nucléaires françaises

En France en revanche, les autorités nucléaires publient un communiqué affirmant que la hausse de la radioactivité dans l'Hexagone est "non significative pour la santé publique". Et d'ajouter que le nuage s'est arrêté à la frontière. Le ministère de l'Agriculture assure lui que la France a été "totalement épargnée" par les retombées radioactives. Il s'avérera plus tard que c'était totalement faux, que le lobby nucléaire et le pouvoir politique avaient délibérément caché la vérité.

>> Le point sur le "mensonge français" dans la rubrique Comme si c'était hier de l'émission Mise au Point :

Comme si c'était hier
Comme si c’était hier / Mise au point / 4 min. / le 24 avril 2016

30 avril - 20h

Propos plus que rassurants d'un diplomate soviétique

La radioactivité mesurée dans la région élargie de Tchernobyl est plus élevée que la normale, mais pas considérablement

Youli Kvitsinsky, ambassadeur soviétique à Bonn

L'ambassadeur soviétique en Allemagne assure que la situation s'est stabilisée et que les autorités la maîtrisent. Selon sa déclaration, des radiations ont atteint des secteurs situés au nord, au sud et à l'ouest de la centrale et la population locale a été évacuée. Le diplomate ajoute que la radioactivité n'est pas si élevée qu'on le dit et que des mesures supplémentaires pour protéger la population "ne sont donc pas nécessaires".

1er mai - 6h

Arrivée en Suisse romande

Le nuage se déplace vers l'ouest durant la nuit, touchant la Suisse romande. Les autorités précisent que la radioactivité est restée stable, "bien en dessous du seuil dangereux", avec des taux de 20 à 30% plus élevés que la normale. Dans tout le pays, la radioactivité devrait cependant diminuer en raison des conditions météorologiques favorables.

L'Association suisse pour l'énergie atomique assure pour sa part qu'aucun accident similaire ne pourrait avoir lieu dans les centrales suisses, car elles sont de conception différente, sans modération au graphite et avec une enceinte de confinement en acier et béton.

>> Le point sur la radioactivité avec l'expert Serge Prêtre dans le TJ Midi:

Les taux de radioactivité sont inquiétants, mais ne sont pas dangereux

Serge Prêtre
Interview de Serge Prêtre
Interview de Serge Prêtre / Info en vidéos / 2 min. / le 11 avril 2016

1er mai - 7h

Les liquidateurs

Célébrés comme des héros en Ukraine et ailleurs, ceux que l'on a appelé ensuite des liquidateurs sont intervenus dans les premiers mois et les premières années dans la centrale pour effectuer divers travaux comme la décontamination du site, l'enfouissement des déchets radioactifs ou la construction d'un sarcophage de protection.

Leur nombre est estimé à 600'000 personnes, civiles ou militaires. Les premiers à intervenir ont reçu des doses gigantesques de radioactivité. Par la suite, de nombreux cas de cancers et de nombreux décès sont constatés, même s'ils sont difficiles à chiffrer. Le traumatisme est aussi très vivace, avec des problèmes d'alcool et de drogue et des cas de suicide.

>> Le témoignage de liquidateurs:

J'avais 35 ans... et je suis invalide à vie

Piotr, liquidateur
Le témoignage d'un liquidateur
Le témoignage d'un liquidateur de Tchernobyl / Info en vidéos / 1 min. / le 12 avril 2016

C'est comme si on arrivait dans une fosse commune

Un liquidateur
Le témoignage d'un technicien de Tchernobyl
Le témoignage d'un technicien de Tchernobyl / Info en vidéos / 27 sec. / le 11 avril 2016

1er mai - 12h

Les militants anti-nucléaires réclament un moratoire

A l'occasion des défilés et discours pour la fête du travail, l'accident de Tchernobyl est évoqué en Suisse et en Europe, la gauche et les Verts demandant un arrêt du nucléaire.

A Lausanne, le conseiller national Dario Robbiani, président du groupe socialiste, déclare que "cet accident démontre notre bon droit de se méfier de la prétendue sécurité des centrales nucléaires, et notre devoir de réclamer un moratoire, de s'opposer à de nouvelles centrales et de soutenir, si nécessaire, la nouvelle initiative anti-atomique".

1er mai - 16h

Tests négatifs sur des personnes qui étaient en Ukraine

Une septantaine de femmes et enfants d'ouvriers autrichiens et ouest-allemands tout juste arrivés à Vienne en provenance de la région de Tchernobyl sont testés au centre de recherche atomique autrichien.

Certains ont souffert de vomissements et de diarrhées, mais toutes les mesures de radioactivité sont négatives. "Nous avons fait des tests et ils ne courent aucun risque de santé", indique un médecin.

1er mai - 20h

Moscou admet que la situation est grave

Pour la première fois, les Soviétiques reconnaissent "l'extrême gravité" de l'accident. Mais l'idée d'une commission d'enquête internationale est rejetée, car "il n'y a pas assez de place pour faire travailler des experts étrangers", fait savoir un haut responsable de l'énergie.

2 mai - 7h

Washington hausse le ton

Après que Moscou a dit ne pas avoir besoin de l'aide américaine, la Chambre des représentants adopte à l'unanimité une résolution condamnant l'Union soviétique pour n'avoir informé ni sa population, ni les Etats voisins de l'approche du nuage radioactif. Le texte demande aussi à Moscou d'ouvrir la région à des observateurs scientifiques internationaux et à la presse.

2 mai - 13h

Le nuage s'étend vers le nord

Le panache radioactif dévie vers le nord et évite la péninsule ibérique. De la radioactivité est mesurée en Belgique et aux Pays-Bas, dans des quantités jugées faibles, alors que le nuage atteint les Iles britanniques, annoncent les autorités de ces trois pays. Les valeurs enregistrées en France, touchée surtout à l'est, sont aussi très nettement en-deçà des seuils d'alerte.

En Suisse, les valeurs de contamination radioactives se sont sensiblement accrues, indiquent les autorités, atteignant jusqu'à dix fois les valeurs habituelles. Il pleut en certains endroits et c'est là que les pics sont enregistrés, sans que cela devienne préoccupant. Quatre voitures équipées d'instrument de mesure sont envoyées dans les zones davantage concernées: Tessin, Zurich-Bâle, Jura-Vaud et Suisse orientale.

>> La carte des dépôts de césium 137 : La carte des dépôts de césium 137 après Tchernobyl à l’échelle de l’Europe (source: Atlas européen EC-IGCE 1998 et IRSN). Aucune donnée n’est disponible sur les Balkans.

2 mai - 17h

Consommer du lait ou s'abstenir?

En Europe, les autorités divergent quant à l'attitude à adopter sur la consommation de produits agricoles. La Suisse indique par exemple que malgré une contamination effective, la consommation de lait et de denrées alimentaires ne représente aucun danger.

La RFA recommande elle "à titre de précaution" à ses citoyens de ne plus consommer de lait frais non contrôlé au préalable et provenant du sud du pays, où le taux de radioactivité est le plus important. Les autorités conseillent aussi aux mères de ne donner que du lait en poudre à leurs enfants et de laver tous les légumes frais. Quant aux agriculteurs, ils ne doivent plus nourrir leur bétail avec de l'herbe fraîche.

En Italie, la consommation de lait frais est interdite pendant 15 jours pour les enfants de moins de 15 ans et les femmes enceintes. La vente de tous les légumes à feuilles est interdite.

Certains pays occidentaux suspendent en outre temporairement leurs importations de produits alimentaires, viande, lait ou légumes d'URSS et d'Europe du nord.

3 mai - 10h

La Suisse annonce des mesures

D'entente avec l'Office fédéral de la santé publique, la commission fédérale de protection atomique et chimique annonce diverses mesures pour limiter au maximum les effets sur l'individu de l'augmentation de la radioactivité. Il ne s'agit pour elle que de recommandations et non de directives.

Les recommandations:

> La chaîne alimentaire est contaminée par la pollution au sol, mais cela ne nécessite pas de mesures restrictives.

> Il faut éviter de consommer l'eau des citernes.

> L'eau potable ne pose pas de problème.

> La consommation de lait frais n'est pas dangereuse, mais il vaut mieux remplacer le lait frais par du lait en poudre ou du lait condensé pour les enfants en dessous de 2 ans et les femmes enceintes.

> Les légumes frais doivent être bien lavés avant la consommation.

> La prise de tablettes d'iode ne se justifie pas.

> Le contrôle des denrées alimentaires en provenance de l'est est durci.

3 mai - 15h

Deux dirigeants du régime sur place

Tout en restant toujours très avare en détails, l'agence Tass annonce que deux dirigeants soviétiques se sont rendus dans "le secteur de la centrale". Le Premier ministre Nikolai Ryjkov et le numéro deux du régime Yegor Ligatchev ont "visité des agglomérations et y ont rencontré des travailleurs évacués temporairement de la zone de la centrale".

Boris Eltsine, chef du parti communiste de Moscou, déclare à la TV ouest-allemande ARD qu'une erreur humaine était a l'origine de l'accident, sans donner d'autres détails. Il confirme par ailleurs que la radioactivité a diminué mais reste encore forte autour de Tchernobyl. Et de conclure qu'une semaine après l'accident, on ne pouvait toujours pas pénétrer dans la centrale.

4 mai

La radioactivité en baisse à part au Tessin

Les autorités annoncent que la radioactivité est en baisse presque partout en Suisse. En Suisse orientale, les valeurs, dix fois supérieures à la normale une semaine auparavant, ont baisse à sept. Sur le Plateau, en Valais et aux Grisons, les taux sont égaux au rayonnement naturel ou à peine supérieurs. Dans le Jura, ils sont deux fois plus élevés que d'habitude.

En revanche au Tessin, les taux ont augmenté, surtout dans le sud du canton, à la suite des précipitations, et atteignent 8 à 9 fois la normale, mais ils demeurent sans danger pour la population.

Autriche, Allemagne, France, les pays voisins annoncent eux aussi une diminution de la radioactivité. Celle-ci augmente encore en Grande-Bretagne, mais sans présenter de danger.

5 mai

Les émissions cessent à Tchernobyl

L'incendie est totalement éteint

Boris Eltsine

Avec le déversement de sacs de sable et de bore, le coeur du réacteur perd de son activité chimique et se solidifie. Les émissions cessent donc, fait savoir le chef du PC de Moscou Boris Eltsine, assurant que les rejets sont désormais sans danger pour l'homme autour du réacteur. Le responsable précise que personne n'a toutefois pu pénétrer dans la centrale, car la température y est supérieure à 100 degrés.

Les évacuations des zones proches de la centrale sont terminées. Ce sont une soixantaine de localités, dont deux villes importantes, qui sont vidées de leurs habitants sur un rayon de 30 km auteur du réacteur. Au total, quelque 250'000 personnes ont dû quitter leurs maisons sur une superficie de 300'000 hectares.

7 mai

Une psychose de la radioactivité

Le passage du nuage radioactif continue d'attiser les inquiétudes en Europe occidentale, En RFA, les stades et les piscines découvertes ont été fermés jusqu'à nouvel ordre dans plusieurs régions, les autorités redoutant que les gazons radioactifs ne contaminent la population. Les joggeurs sont aussi priés de cesser leurs activités.

Aux Pays-Bas, deuxième exportateur agricole mondial, le gouvernement interdit de pâture les 2,4 millions de vaches qui produisent annuellement 13 millions de tonnes de lait, pour la première fois dans l'histoire du pays.

Un panneau signalant la radioactivité à Pripyat.

7 mai

Berne alarme et rassure à la fois

La catastrophe de Tchernobyl a provoqué dans certains cas la multiplication par deux de la dose annuelle de radiation généralement subie par la population, annonce Bernard Michaud, chef du service de la radioprotection. Pour les catégories critiques de la population (enfants de moins de deux ans, femmes enceintes ou qui allaitent), on s'approche des valeurs limites admises en Suisse.

S'il n'y a aucun risque décelable pour la population, cette situation justifie les recommandations de protection, ajoute l'expert, précisant que toute irradiation peut produire des effets différes. Des cas de leucémie pourraient ainsi apparaître d'ici 20 à 30 ans, proportionnellement aux doses reçues.

Le Conseil fédéral débat de la situation durant deux heures et estime qu'hormis quelques conseils pratiques, il n'y a pas lieu de prendre des mesures de protection spéciales pour la population.

8 mai

Des milliers de manifestants en Europe

A l'image de la Suisse, où plusieurs milliers de personnes participent à Bâle à une manifestation anti-nucléaire, d'autres défilés ont lieu à travers l'Europe. Ils sont ainsi 6000 près de Hambourg, en Allemagne, et 3000 à Salzbourg, en Autriche.

9 mai

Le danger s'éloigne

Le nuage radioactif a quitté le pays

La commission fédérale chargée du dossier

Selon les autorités, aucune augmentation du danger d'irradiation en Suisse n'est plus à craindre et les taux de radioactivité dans l'air, qui reflètent pratiquement un retour à la normale, permettent de conclure que le nuage radioactif a quitté le pays. Les recommandations concernant la nourriture demeurent néanmoins en vigueur, car des particules contaminées s'y sont déposées.

Dans le lait de vache, de brebis et de chèvre, les valeurs mesurées sont restées stables, de même que dans l'herbe et les légumes. Pour les personnes à risque, la consommation reste déconseillée pour les épinards, la salade, la rhubarbe ou les poireaux. Et il faut de toute façon les laver soigneusement et les peler.

11 mai

"Fin de l'alerte rouge"

Reportage sur place à l'appui, Moscou annonce qu'il n'existe plus de possibilité de catastrophe à la centrale. Le réacteur est désormais refroidi et un affaissement n'est plus à l'ordre du jour.

13 mai

Les maraîchers mécontents

Les maraîchers suisses adressent leurs critiques aux autorités suisses pour, disent-ils, leur carence en matière d'informations, leurs décisions alarmistes et leurs mesures de radioactivité discutables. Selon eux, les ventes de légumes à feuilles ont reculé de moitié depuis la catastrophe et ils évoquent des pertes d'un demi-million de francs par jour.

14 mai

Le bilan s'alourdit à 9 morts

Après diverses annonces faisant état de 4 ou 6 morts, Moscou donne des précisions sur le bilan de la catastrophe.

Outre les deux employés tués juste après l'explosion, le Kremlin fait désormais état de sept autres décès de personnes irradiées. Le nombre de malades hospitalisés atteint 300 et leurs cas sont "plus ou moins graves".

>> Le mémorial dédié à ceux qui ont perdu la vie en éteignant l'incendie : Le mémorial dédié aux pompiers qui ont perdu la vie en tentant d'éteindre l'incendie.

14 mai

Gorbatchev sort de son silence

C'est la première fois que nous avons vu la force nucléaire échapper au contrôle

Mikhaïl Gorbatchev

Le leader du Kremlin Mikhaïl Gorbatchev sort pour la première fois de son silence et ne cherche pas à minimiser l'ampleur de la catastrophe. Il réaffirme toutefois que le pire est désormais passé.

Gorbatchev profite aussi de son discours pour envoyer quelques piques aux Occidentaux qui ont critiqué la gestion de la catastrophe par Moscou, estimant que le bilan de ce malheur "est exploité pour diffamer l'Union soviétique".

21 mai

La viande et le lait de brebis inquiètent

Si les mesures de radioactivité sont redevenues normales en plein air, la prudence reste de mise pour les autorités fédérales. Une seule recommandation reste en vigueur: ne pas boire de lait de brebis nourries à l'herbe fraîche.

En revanche, des particules de césium 137 ont été découvertes dans des échantillons de viande, ne nécessitant toutefois pas de nouvelles mesures.

26 mai

19 morts

Les autorités soviétiques revoient leur bilan à la hausse, parlant désormais de 19 morts et 300 blessés. Le docteur Robert Gale, spécialiste de la moelle osseuse qui a soigné les victimes de Tchernobyl, indique lui qu'il pense qu'un millier de personnes pourraient mourir d'un cancer résultant d'une irradiation.

16-18 juin

Débats extraordinaires aux Chambres fédérales

Tirer les leçons de l'accident, exercer une pression internationale pour garantir la sécurité de tous les réacteurs, abandonner ou maintenir le nucléaire, réexaminer la construction prévue d'une centrale à Kaiseraugst (BL), obtenir davantage d'informations sur la contamination, tels sont certains des points débattus lors de plusieurs séances spéciales au Conseil national et au Conseil des Etats, qui ont vu intervenir des dizaines d'élus.

Sommes-nous en mesure de maîtriser les démons?

Kaspar Villiger (PRD/LU)

On ne peut faire comme si de rien n'était après Tchernobyl

Victor Ruffy (PS/VD)

Il ne faut pas se lancer dans des décisions irréfléchies, mais il faut garder la tête froide.

Jean-Pierre Bonny (PRD/BE)

Qui dit qu'en 2010, on pourra faire sans le nucléaire?

Christoph Blocher (UDC/ZH)

Le président de la Confédération Alphons Egli s'exprime, estimant que le Conseil fédéral avait bien agi en matière d'informations et de précautions et que les centrales suisses étaient sûres. La session est perturbée par des activistes demandant l'interruption définitive de la production d'énergie nucléaire.

21 juin

20'000 personnes à Gösgen

Entre 20'000 et 30'000 personnes participent à Gösgen (SO) à une importante manifestation contre les centrales nucléaires, dont la plus grande partie se déroule dans le calme. La police intervient toutefois avec des gaz lacrymogènes lorsqu'un petit groupe de personnes masquées tentent de s'approcher de la centrale. Ailleurs en Europe, des manifestations anti-nucléaires ont aussi lieu régulièrement.

Des milliers de personnes manifestent devant l'une des centrales emblématiques de Suisse.

19 juillet

Un rapport accablant et des renvois

Près de trois mois après l'explosion, les autorités soviétiques rendent public un rapport révélant l'ampleur du drame. Elles pointent du doigt l'irresponsabilité, la négligence et l'indiscipline de plusieurs responsable et précisent que l'accident est dû à une suite d'erreurs humaines considérables et à des violations des règles du réacteur. Un ministre, deux vice-ministres et plusieurs hauts responsables sont renvoyés et certains seront traduits en justice, précise-t-on.

On a procédé à des expériences insuffisamment préparées et mal surveillées

Les autorités russes

Par ailleurs, le bilan communiqué par le Kremlin fait état de 26 morts et de 200 cas de leucémie avérés. Et on précise que les deux tiers des personnes déplacées ne retrouveront jamais leur domicile. Enfin, Moscou annonce une facture totale dépassant les 5 milliards de francs.

2 août

Les délocalisés de Tchernobyl

Plus de 500 personnes sont relogées dans un village construit en 45 jours par 2000 volontaires à une centaine de kilomètres de la centrale accidentée.

>> Reportage dans ce village dans le téléjournal de la TSR:

C'est bien ici, mais ce n'est pas vraiment chez moi.

Une habitante relogée
Les délocalisés de Tchernobyl
Les délocalisés de Tchernobyl / Info en vidéos / 2 min. / le 11 avril 2016

1er septembre

Le lait et la viande consommables

L'Office fédéral de la santé publique annonce que le lait et la viande peuvent être consommés sans risque dans tout le pays, y compris au Tessin où les dernières restrictions restaient en vigueur. Seule la pêche reste interdite dans le lac de Lugano.

26 avril 2016

30 ans après à Pripyat

LE BILAN HUMAIN

Entre 47 et 100'000 morts

Dans les semaines qui ont suivi l'accident, outre les 2 personnes mortes immédiatement, 26 sont décédées et 19 entre 1987 et 2006, puis encore 15 autres. Les bilans officiels font ainsi état de 47 à 62 morts.

Mais au-delà de ces victimes, le bilan demeure difficile à établir, l'origine exacte des maladies étant impossible à établir, et des chiffres très différents sont avancés. Au final, le nombre de décès directement imputables à la radioactivité varie entre 9000 et 33'000 selon diverses agences de l'ONU et entre 100'000 et 200'000 selon Greenpeace.

En Biélorussie, en Ukraine et en Russie, près de 7000 cancers de la thyroïde ont été constatés entre 1991 et 2006, surtout chez les moins de 18 ans. Les cas de leucémies ont aussi fortement augmenté. Dans le reste de l'Europe, une hausse des cas de cancers est aussi enregistrée, mais il est difficile de l'attribuer directement à Tchernobyl.

En Suisse, des estimations font état de près de 200 décès supplémentaires par cancer après Tchernobyl. Basées sur un facteur de risque de la Commission internationale de protection radiologique, elles ne sont toutefois que théoriques.

>> Le témoignage d'une femme qui retourne dans son ancien appartement à Pripyat (extrait de Temps Présent, 25 avril 1996) :

Le témoignage d'une ancienne habitante de Pripyat
Le témoignage d'une ancienne habitante de Pripyat / Info en vidéos / 4 min. / le 12 avril 2016

LA RADIOACTIVITE AUJOURD'HUI

Des zones encore très contaminées

C'est évidemment autour de la centrale que la radioactivité demeure très importante. La zone d'exclusion de 30 km a été maintenue, en raison de la haute contamination du sol et des déchets qui y sont entreposés.

Mais au-delà de ces 30 km, de nombreuses régions sont encore très contaminées et rien n'a été fait pour assainir. Dans certaines zones, les taux de radioactivité suffiraient normalement à interdire l'accès, mais les gens s'y promènent librement. Au final, selon Greenpeace, plus de 5 millions de personnes vivent encore dans des zones contaminées en Ukraine, en Russie et en Biélorussie.

>> Le reportage d'Isabelle Cornaz à Novozybkov (Russie), à 180 km de la centrale :

Les taux de radioactivité sont particulièrement élevés dans la forêt de Zlynka. [RTS - Isabelle Cornaz]RTS - Isabelle Cornaz
30 ans après Tchernobyl, la région est toujours en partie contaminée / Le Journal du matin / 5 min. / le 25 avril 2016

Mais cette zone abandonnée est aussi devenue paradoxalement un paradis pour les animaux. S'ils ont une espérance de vie plus courte en raison de la radioactivité, oiseaux, rongeurs, loups, ours ou même chevaux sauvages ont prospéré.

Les chevaux sauvages de Tchernobyl.

LES CONSEQUENCES EN EUROPE

Une contamination qui a presque disparu

En Europe, après une exposition directe puis via la nourriture durant les premiers mois, la radioactivité dans le sol a régulièrement décru avec les années

Aujourd'hui, la plupart des dépôts radioactifs ont disparu, mais il reste des zones de contamination. Par exemple, le césium 137 a une demi-vie de 30 ans et la radioactivité restante devrait être cette année deux fois inférieure à celle mesurée en 1986. Mais les analyses montrent qu'elle a diminué davantage que prévu. Au final, l'activité radiologique des produits agricoles est aujourd'hui 10 à 30 fois plus faible qu'en 1987 et 1000 à 10'000 fois plus faible qu’immédiatement qu'après les dépôts de mai 1986. Mais les restes de césium occasionnent encore des pics de radioactivité sur les sangliers ou les champignons par exemple, ainsi qu'au fond des lacs.

>> L'évolution de la contamination en France : L'évolution de la contamination au césium en France (source: IRSN).

LE SARCOPHAGE ACTUEL

Achèvement prévu en 2017

Un sarcophage de béton a été placé sur le réacteur dans les six mois qui ont suivi l'explosion, mais il menaçait de s'écrouler et de libérer des substances radioactives. Un fonds a ainsi été créé par la communauté internationale pour financer une nouvelle chape.

Les premiers travaux ont été lancés en 2010 pour mettre en place une gigantesque arche en acier lourde de 18'000 tonnes haute de 110 mètres.

Cette nouvelle structure étanche, d'un coût estimé à 2,1 milliards d'euros, est déjà assemblée et doit être glissée au-dessus de la vieille chape afin de devenir opérationnelle fin 2017. Sa durée de vie prévue est de 100 ans au minimum

>> La visite du nouveau sarcophage par un drone :

Images aériennes de l'arche de confinement de Tchernobyl
Images aériennes de l'arche de confinement de Tchernobyl / L'actu en vidéo / 54 sec. / le 19 avril 2016