Dans une vidéo publiée lundi, Ioulia Navalnaïa a assuré qu'elle allait continuer la lutte contre Vladimir Poutine menée par son mari et a appelé ses partisans à la rejoindre, trois jours après le décès en prison de l'opposant dans des conditions obscures. Elle est aussi revenue sur le parcours et les souffrances de son époux.
"Il y a trois jours, Vladimir Poutine a tué mon mari, Alexeï Navalny. Poutine a tué le père de mes enfants (...) Avec lui, (Poutine) a voulu tuer notre espoir, notre liberté, notre avenir", a asséné Ioulia Navalnaïa.
"Je poursuivrai l'oeuvre d'Alexeï Navalny. Je continuerai pour notre pays, avec vous. Et je vous appelle tous à vous tenir près de moi (...) Ce n'est pas une honte de faire peu, c'est une honte de ne rien faire, c'est une honte de se laisser effrayer", a-t-elle martelé. "Nous devons nous unir pour frapper d'un seul coup Poutine, ses amis, les voyous en épaulettes, les courtisans et les tueurs qui veulent paralyser notre pays", a-t-elle encore lancé.
Résistance familiale
Economiste de formation, Ioulia Navalnaïa, qui vit en exil, est devenue aujourd'hui l'une des leaders de la contestation au Kremlin. "On a vraiment très confiance en elle", affirme Oleg Mikhaïlov, membre de la section suisse de l'association "Russie du futur", dans le 19h30 de la RTS.
Pour cet activiste russe contre le régime de Vladimir Poutine, "Ioulia, c'est presque Alexeï". "Elle était toujours avec lui. On ne la voyait pas sur les caméras mais on savait qu'elle était derrière lui. On savait que c'était ses idées à elle qu'il défendait aussi", poursuit-il. "L'opposition n'aura aucun problème à l'accepter comme leader".
Et l'opposition à Vladimir Poutine est une affaire de famille chez les Navalny. A moins d'un mois des élections présidentielles russes, la fille d'Alexeï Navalny et de Ioulia Navalnaïa, Dasha, 24 ans, a elle aussi repris le flambeau de la résistance.
Etudiante aux Etats-Unis, elle était déjà en 2021 au Parlement européen la porte-parole de son père. Aujourd'hui, c'est sur les réseaux sociaux qu'elle est la plus active.
Longuement applaudie à Bruxelles
Ioulia Navalnaïa s'est aussi rendue en milieu de journée à Bruxelles, où elle a fait une brève allocution et été longuement applaudie lors d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'UE.
"Nous avons exprimé les plus profondes condoléances de l'UE à Ioulia Navalnaïa", a commenté le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell après la rencontre. "Vladimir Poutine et son régime devront rendre des comptes pour la mort d'Alexeï Navalny", a-t-il ajouté.
Selon plusieurs diplomates, Ioulia Navalnaïa a aussi réaffirmé son engagement à poursuivre le combat. "Alexeï Navalny était un héros et il est mort en héros", a-t-elle également dit, selon ses propos rapportés par un diplomate européen.
Elle a également réclamé de l'Union européenne qu'elle cible davantage l'entourage de Vladimir Poutine et "les oligarques corrompus" qui le soutiennent, selon cette source.
L'accès à la dépouille refusé à la famille
Alexeï Navalny, opposant numéro un du président Vladimir Poutine, est mort vendredi à 47 ans dans une prison de l'Arctique, dans le district autonome de Iamalo-Nénétsie, où il purgeait une peine de 19 ans, suscitant une émotion internationale.
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Depuis trois jours, ses proches, qui accusent le Kremlin d'avoir tué l'opposant et de chercher à maquiller ses traces, cherchent en vain à accéder à son corps.
L'équipe d'Alexeï Navalny a affirmé lundi que les enquêteurs mèneraient pendant au moins 14 jours une "expertise" sur sa dépouille avant de la rendre. "Les enquêteurs ont dit aux avocats et à la mère d'Alexeï qu'ils ne rendront pas son corps sur lequel sera réalisé pendant 14 jours une soi-disante 'expertise chimique'", a écrit sur X la porte-parole de l'opposant, Kira Iarmich.
"Ils cachent le corps de Navalny pour dissimuler les traces du meurtre", a-t-elle fustigé, dénonçant un "mensonge éhonté" des autorités.
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Elle avait affirmé plus tôt dans la journée que la mère d'Alexeï et ses avocats étaient arrivés à la morgue lundi matin tôt. Ils n'ont toutefois pas été autorisés à entrer, avait-elle aussi dit.
"Enquête en cours", selon le Kremlin
L'enquête sur la mort d'Alexeï Navalny est "en cours" et n'a pas permis d'arriver à des conclusions "pour le moment", a indiqué le porte-parole du Kremlin. "Dans ces circonstances, en l'absence d'informations, nous pensons qu'il n'est absolument pas permis de faire des déclarations aussi odieuses", a-t-il ajouté.
Selon les services pénitentiaires russes (FSIN), Alexeï Navalny est mort vendredi, victime d'un soudain malaise "après une promenade". Il était emprisonné depuis son retour en Russie début 2021, après un grave empoisonnement, et sa santé s'était détériorée. Lors de sa détention, il avait passé près de 300 jours en cellule disciplinaire, aux conditions de détention épuisantes.
Vladimir Poutine, qui ne prononçait jamais le nom d'Alexeï Navalny, n'a fait aucun commentaire sur sa mort, qui intervient un mois avant l'élection présidentielle, laquelle devrait voir le président russe se maintenir au pouvoir pour un nouveau mandat de six ans.
kkub/edel avec afp
Joe Biden dit envisager de nouvelles sanctions
Le président des Etats-Unis Joe Biden a dit "envisager" des sanctions supplémentaires contre la Russie de son homologue Vladimir Poutine, trois jours après la mort de l'opposant Alexeï Navalny.
"Nous avons déjà des sanctions mais nous sommes en train d'en considérer des supplémentaires", a répondu à des journalistes le dirigeant démocrate qui a déjà jugé le président Poutine "responsable" de la mort de Navalny annoncée vendredi dans une prison de l'Arctique.
Les Etats-Unis et l'Union européenne appliquent déjà une batterie de sanctions contre Moscou depuis le déclenchement de la guerre consécutive à l'invasion russe en Ukraine le 24 février 2022.