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Appel à manifester pacifiquement jeudi après les heurts ayant fait 22 morts au Kenya

Des manifestants contre les taxes gouvernementales au Kenya. [Keystone/EPA/STR]
Des manifestations de la jeunesse ont été violemment réprimée au Kenya / La Matinale / 1 min. / le 26 juin 2024
Une des figures du mouvement de contestation antigouvernementale au Kenya a appelé à manifester à nouveau jeudi de manière pacifique en mémoire des victimes de la chaotique mobilisation de mardi. Elle a fait 22 morts selon l'organisme officiel de défense des droits humains.

Après la journée de violences et de pillages dans la capitale Nairobi, le président William Ruto a affiché mardi soir sa fermeté et assuré que la "violence et l'anarchie" seraient fermement réprimées.

"Demain, nous marchons à nouveau pacifiquement en portant du blanc, pour tous les nôtres tombés au combat. Vous ne serez pas oubliés", a écrit mercredi matin sur X la journaliste et militante Hanifa Adan, figure de la contestation, alors que le gouvernement a annoncé avoir déployé l'armée pour appuyer la police face à la contestation.

L'organisme officiel de défense des droits humains, la Kenya National Human Rights Commission (KNHRC), a recensé 22 morts dans le pays, dont 19 dans la capitale Nairobi, "plus de 300 blessés et plus de 50 arrestations", a indiqué sa présidente, Roseline Odede, en annonçant "ouvrir une enquête" sur ces morts.

>> Relire : De violents heurts durant une manifestation anti-gouvernementale font plusieurs morts au Kenya

Les autorités n'ont donné aucun chiffre sur le nombre de victimes de cette troisième journée de mobilisation en huit jours contre le projet de budget 2024-2025 prévoyant des hausses de taxes. Le texte voté mardi au Parlement doit encore être promulgué par le président.

Tirs à balles réelles

Le Kenya était encore mercredi sous le choc de ces violences, qui ont notamment vu des manifestants prendre d'assaut le Parlement, une première dans l'histoire du pays indépendant depuis 1963.

Les rassemblements contre les nouvelles taxes, principalement menés par des jeunes, avaient débuté la semaine dernière dans le calme, des milliers de manifestants défilant à Nairobi et dans d'autres villes du pays. La tension est brusquement montée mardi après-midi dans le centre de la capitale.

Selon des ONG, dont la branche kényane d'Amnesty International, la police a tiré à balles réelles pour tenter de contenir la foule, qui a forcé l'entrée de l'enceinte du Parlement. Des bâtiments y ont été saccagés et partiellement incendiés.

>> Revoir les images de la manifestation de mardi :

Au Kenya, une manifestation antigouvernementale a viré au chaos mardi
Au Kenya, une manifestation antigouvernementale a viré au chaos mardi / L'actu en vidéo / 50 sec. / le 25 juin 2024

"Enfants innocents"

La principale coalition d'opposition, Azimio, menée par le vétéran Raila Odinga, a accusé le gouvernement d'avoir "déchaîné sa force brute" contre les manifestants et exhorté la police à "cesser de tirer sur des enfants innocents, pacifiques et non armés".

Le groupe d'ONG mené par Amnesty Kenya a également souligné mardi avoir relevé 21 enlèvements de personnes par des "officiers en uniforme ou en civil" au cours des 24 heures précédentes. La police n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP sur le sujet.

Les scènes de chaos ont alarmé mardi les Etats-Unis et plus d'une dizaine de pays européens, ainsi que l'ONU et l'Union africaine, qui se sont déclarés "fortement préoccupés" et ont appelé au calme.

afp/edel

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Le projet de budget 2024-25 retiré

Le président kényan William Ruto a annoncé mercredi le retrait du projet de budget 2024-25 prévoyant des hausses de taxes, à l'origine d'une puissante contestation dans le pays qui a sombré mardi dans une violence meurtrière. "Le pays a été témoin d'une large expression de mécontentement à l'égard du projet de loi tel qu'il a été adopté, qui a malheureusement entraîné des pertes de vies humaines et des destructions de biens", a ajouté le chef de l'Etat.

Le président a ensuite appelé à une concertation nationale. "Puisque nous nous sommes débarrassés du projet de loi de finances 2024, il est nécessaire d'avoir une conversation en tant que nation à l'avenir. [...] Comment gérer ensemble notre situation d'endettement ? [...] Je proposerai un engagement avec les jeunes de notre nation, nos fils et nos filles", a-t-il affirmé.

Pour le gouvernement, ces mesures fiscales étaient nécessaires pour redonner des marges de manoeuvre au pays, lourdement endetté - la dette publique représentant environ 70% du PIB - et financer son ambitieux budget 2024-25 tablant sur 4000 milliards de shillings (29 milliards d'euros) de dépenses, un record.