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Complot, ingérence électorale, actrice X ou documents confidentiels: comment Donald Trump joue la montre pour repousser ses procès

Donald Trump durant une audience à New York consacrée à l'affaire Stormy Daniels, le 25 mars. [Getty Images via AFP - POOL]
Donald Trump durant une audience à New York consacrée à l'affaire Stormy Daniels, le 25 mars. - [Getty Images via AFP - POOL]
Comment peut-on viser la présidence des Etats-Unis tout en se débattant avec trois inculpations pénales et une condamnation? Tel est tout l'enjeu de cette année électorale pour Donald Trump, qui joue la montre à coups de recours afin de reporter au maximum ses procès, voire les différer après le vote de novembre.

Le 5 novembre, les Etats-Unis devront choisir qui de Joe Biden ou Donald Trump sera le prochain chef de l'Etat. Si le premier est critiqué pour son âge, le second doit faire face à un écueil autrement plus important: il est le premier ancien président américain à faire l'objet de poursuites pénales, en l'occurrence quatre procédures distinctes pour lesquelles il encourt de lourdes peines de prison si elles aboutissent.

Jusqu'ici, la popularité de Donald Trump, qui a occupé la Maison Blanche entre 2017 et 2021, n'a pas été entamée par ces accusations et elle a même été renforcée chez une partie de la population. Résultat, il a rapidement écrasé tous ses adversaires durant la primaire du Parti républicain et les récoltes de dons pour son parti et sa campagne sont en hausse. Pour le volubile républicain, les audiences constituent aussi autant d'occasions de prendre la parole haut et fort devant d'innombrables médias pour dénoncer un système qui a tendance à le persécuter à ses yeux et pour critiquer son rival démocrate.

Ces accusations risquent toutefois de perturber sa campagne, car pour beaucoup il n'est pas de bon ton de voir un présidentiable sur le banc des accusés. Et tout le temps que le candidat passera dans les tribunaux n'est pas utilisé pour tenter de convaincre sur le terrain.

En attendant, Donald Trump, 77 ans, et ses équipes cherchent par tous les moyens à repousser les procès et surtout les jugements le plus tard possible. La tactique est simple, mais jusqu'ici très efficace: jouer la montre et aligner les recours pour des motifs les plus divers. Et les mois passés à discuter le rapprochent toujours plus de son objectif: échapper à la plupart de ses procès au pénal avant l'élection présidentielle. En outre, s'il devait retourner à la Maison Blanche, il pourrait entamer des démarches pour stopper la majorité des procédures.

>> Réécouter le podcast Democratie! Democraty! consacré à Donald Trump et au paradoxe républicain :

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Trump ou le paradoxe républicain / Democracy ! Démocratie ! / 20 min. / le 8 mars 2024

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Première procédure pénale: l'affaire Stormy Daniels

Après avoir réussi à repousser l'échéance, Donald Trump n'a pas pu échapper au procès dans l'affaire des paiements dissimulés à une actrice de films X. Le 30 mai, l'ex-président a été déclaré coupable par le jury de son procès historique à New York. Sa peine sera fixée ultérieurement par le juge Juan Merchan.

Dans cette affaire, le républicain était sur le bancs des accusés pour des paiements présumés à une ancienne star de films pornographiques, Stormy Daniels, avec laquelle il aurait eu une liaison. Donald Trump a nié cette relation et a plaidé non coupable des accusations de maquillage des comptes de la Trump Organization en vue de cacher les 130'000 dollars qui ont été versés à Stormy Daniels en 2016, juste avant la campagne présidentielle, afin qu'elle taise un rapport sexuel dix ans plus tôt, alors qu'il était déjà marié avec Melania Trump.

Après deux jours de délibéré, les 12 jurés ont déclaré à l'unanimité Donald Trump coupable des 34 délits de falsifications de documents comptables. L'ex-chef d'Etat encourt jusqu'à quatre ans de prison ferme, possiblement assortis d'une amende, mais le juge peut aussi prononcer une peine de prison avec sursis probatoire, voire des travaux d'intérêt général. Quelle que soit la peine, elle ne l'empêchera pas de se présenter à la présidentielle.

Le milliardaire a dans la foulée qualifié l'issue de ce procès de "très injuste" et a annoncé qu'il allait faire appel. Selon un sondage effectuée après ce verdict, 10% des électeurs républicains se disent désormais moins susceptibles de voter pour Donald Trump à l'élection présidentielle.

>> Lire aussi : Le procès pénal de Donald Trump a été fixé au 25 mars

Deuxième procédure: complot contre l'Etat américain après la défaite de 2020

Donald Trump est parvenu à faire retarder sine die le procès fédéral à Washington qui devait débuter le 4 mars pour tentatives illicites d'inverser le résultat de l'élection de novembre 2020 qu'il avait perdue face à Joe Biden. Le républicain a invoqué pour sa défense l'immunité pénale dont il bénéficie en tant qu'ex-président.

Le 6 février, une cour d'appel fédérale a écarté cette immunité pénale et a estimé que Donald Trump n'était pas à l'abri de poursuites. L'homme d'affaires s'est donc tourné vers la Cour suprême des Etats-Unis pour obtenir la suspension de cette décision. La Haute cour a fixé les débats sur cette question au 25 avril et elle ne devrait pas se prononcer avant juin ou juillet. Il devient donc de plus en plus probable que le procès ne puisse pas se tenir avant la présidentielle.

>> Réécouter le sujet de Tout un monde sur la question de l'immunité de Donald Trump :

Une cour d'appel rejette la demande d'immunité pénale de Trump. [afp - Mike Segar]afp - Mike Segar
Pas d’immunité pour Donald Trump / Tout un monde / 3 min. / le 7 février 2024

>> Lire aussi : La Cour suprême se saisit de la question de l'immunité pénale de Donald Trump

Dans cette affaire, l'acte d'accusation fait état d'un complot contre l'Etat américain et affirme que Donald Trump et ses complices "ont tenté d'exploiter la violence et le chaos au Capitole en appelant les législateurs pour les convaincre [...] de retarder la certification" de l'élection. Il est également allégué qu'un co-conspirateur a poussé le vice-président de l'époque, Mike Pence, à "violer la loi" pour retarder la victoire du président Joe Biden. 

Donald Trump n'a toutefois pas été directement inquiété par la justice pour l'assaut du Capitole par une foule de ses partisans, bien que la commission parlementaire d'enquête sur le 6 janvier 2021 ait recommandé en décembre 2022 des poursuites pénales à son encontre, notamment pour appel à la rébellion et complot contre les institutions américaines.

Troisième procédure: l'ingérence électorale

En Géorgie, au sud-est des Etats-Unis, Donald Trump et 18 autres personnes sont poursuivis pour des tentatives illicites présumées d'inverser les résultats de l'élection de 2020 dans cet Etat-clé. Quatre des prévenus visés ont déjà plaidé coupable et ont été condamnés à des peines réduites, sans prison ferme, en échange de leur témoignage au futur procès des autres accusés. Parmi ceux-ci figurent Donald Trump et son ancien avocat personnel Rudy Giuliani. L'ex-président nie les faits et a plaidé non coupable.

Cette inculpation fait suite à la vaste enquête menée par la procureure du comté de Fulton Fani Willis, qui a fait état d'efforts manifestes déployés par l'ancien président et ses alliés pour s'immiscer dans l'élection présidentielle de 2020. L'acte d'accusation comprend notamment un appel téléphonique de Donald Trump au secrétaire d'État de Géorgie Brad Raffensperger au cours duquel il a demandé à ce dernier de "trouver" les votes dont il avait besoin pour gagner l'État.

Les équipes de l'ex-président ont toutefois réussi à obliger le tribunal à consacrer de longues semaines à examiner un éventuel conflit d'intérêts de la procureure en raison de sa relation intime avec un enquêteur. Le juge Scott McAfee a finalement conclu le 15 mars qu'il n'existait pas suffisamment de preuves, mais a exigé une réorganisation de l'équipe de la procureure, ce qui a abouti à la démission de l'enquêteur. Cette décision lève toutefois un obstacle majeur à la tenue du procès de l'ex-président et de ses 14 coprévenus, mais aucune date n'a encore été fixée, plus de sept mois après la publication de l'acte d'accusation.

Dans ce cas-ci, contrairement aux accusations d'ingérence électorale menées au niveau fédéral, Donald Trump ne pourra pas se gracier ou ordonner aux procureurs de l'Etat d'abandonner les poursuites s'il est élu en 2024, car l'affaire est du ressort de l'Etat de Géorgie

>> Revoir le sujet du 19h30 de août 2023 quand Donald Trump a été brièvement arrêté en Géorgie :

Donald Trump a été placé brièvement en état d'arrestation jeudi soir en Géorgie, pour ses pressions électorales en 2020
Donald Trump a été placé brièvement en état d'arrestation jeudi soir en Géorgie, pour ses pressions électorales en 2020 / 19h30 / 1 min. / le 25 août 2023

>> Lire aussi : Donald Trump plaide non coupable de tentative de manipulation de l'élection de 2020 en Géorgie

Quatrième procédure: les documents confidentiels

En juin 2023, un grand jury fédéral de Miami a inculpé Donald Trump pour avoir emporté des documents confidentiels relatifs à la défense nationale dans sa résidence privée de Floride après son départ de la Maison Blanche et pour avoir résisté aux tentatives du gouvernement de récupérer ces documents. L'ex-président et son assistant ont plaidé non coupable.

Parmi ces documents figurent certains papiers "top secret", selon l'accusation: des plans militaires ou encore des informations sur des armes nucléaires. Ils ont été conservés dans la résidence privée de Mar-a-Lago au lieu d'être remis aux Archives nationales comme l'exige la loi. Donald Trump est également accusé d'avoir tenté de détruire des preuves dans cette affaire, pour laquelle il est visé au total par 41 chefs d'accusation. D'après ses avocats, il avait le droit de conserver ces documents selon les termes d'une loi sur les archives présidentielles. Mais cet argument a été rejeté.

Le procès était initialement prévu en mai, mais il devrait également être reporté de plusieurs mois. Lors d'une audience à la mi-mars, Donald Trump a en effet demandé l'abandon des charges, invoquant notamment son immunité. La juge Aileen Cannon a de son côté dit souhaiter un calendrier suffisamment espacé pour permettre de la "souplesse", notamment en raison de la possibilité de chevauchement avec les autres affaires.

>> Lire aussi : Donald Trump plaide non coupable des nouvelles charges dans l'affaire des documents secrets

Frédéric Boillat avec les agences

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Deux condamnations au civil

En plus des quatre instructions pénales, Donald Trump a déjà été condamné cette année dans deux procès civils à de lourdes amendes contre lesquelles il a fait recours.

Le 16 février, l'ex-président a été sommé de verser 454 millions de dollars dans l'affaire des fraudes financières de la Trump Organization. Il a été reconnu responsable d'avoir exagéré sa fortune afin de tromper des banquiers et obtenir des prêts à des conditions plus favorables. A l'issue d'un procès de trois mois à Manhattan, le juge Arthur Engoron a aussi interdit pendant trois ans à Donald Trump d'exercer des fonctions de direction ou d'administrateur dans toute entreprise dont le siège est à New York. Il a également ordonné aux fils de l'ex-président, Donald Trump Jr. et Eric Trump, de verser chacun près de 4,7 millions de dollars.

>> Lire aussi : Donald Trump accusé d'avoir gonflé son patrimoine de "milliards de dollars" de 2011 à 2021

A la suite d'un recours, la justice de l'Etat de New York a accordé le 25 mars un répit financier à Donald Trump, qui aurait pu se retrouver dans l'incapacité de payer, en réduisant la caution à 175 millions de dollars et en lui donnant dix jours pour la régler. Cette décision éloigne le spectre d'une saisie du patrimoine immobilier et des comptes bancaires des trois hommes, une humiliation pour le clan Trump qui aurait écorné l'image de l'homme d'affaires qui s'est toujours affiché en milliardaire qui a réussi.

>> Les explications de La Matinale sur la situation financière de Donald Trump :

La justice de l'Etat de New York a largement réduit la caution de Donald Trump. [Keystone]Keystone
Les questions sur la situation financière de Donald Trump persistent / La Matinale / 1 min. / le 26 mars 2024

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Fin janvier, l'ex-président a été condamné à New York à une amende de 83,3 millions de dollars pour avoir diffamé l'autrice Elizabeth Jean Carroll, laquelle a porté plainte deux fois contre lui en 2019 et en 2022 pour diffamation et agression sexuelle et l'accuse de l'avoir violée dans une cabine d'essayage d'un grand magasin en 1996. Donald Trump a aussi fait appel.

>> Lire aussi : Donald Trump condamné à payer 83 millions de dollars pour diffamation

Enfin, début janvier, l'ex-président américain a été condamné à payer 392'638 dollars au New York Times et à des journalistes du quotidien au titre des frais de justice. Il a été débouté après les avoir accusés de "complot sournois" pour obtenir ses documents fiscaux.

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