Décès "inattendus", surmortalité: que se passe-t-il dans les services d'urgences en France?
Mercredi dernier, à Toulouse, un patient s'est suicidé après plusieurs jours sur un brancard, dans une zone d'attente des urgences psychiatriques. Il était placé dans un bureau, faute de place.
En octobre dernier, Lucas, 25 ans, est mort aux urgences de Hyères d'un choc septique, selon ses parents, après 10 heures d'agonie à se tordre de douleur sur un brancard.
D'autres plaintes de familles ont été médiatisées début 2024, comme à Nantes ou Eaubonne, dans le Val-d'Oise.
Un système extrêmement fragilisé
Face à la multiplication de ces cas, une question se pose: ces drames "évitables" sont-ils en augmentation en France? "Difficile à dire, car aucun recensement n'est fait", relève Marc Noizet, président de Samu-Urgences de France. "Mais il y a une sensibilité accrue. Tout le monde a compris que le système de santé, extrêmement fragilisé, ne fonctionne pas comme il le devrait".
Tout le monde a compris que le système de santé, extrêmement fragilisé, ne fonctionne pas comme il le devrait
Seule donnée disponible, le nombre "d'événements indésirables graves associés aux soins - à savoir les dysfonctionnements mettant en jeu un pronostic vital ou déficit fonctionnel - reste "largement sous-déclaré", selon la Haute autorité de Santé.
Entre janvier 2022 et mars 2023, 136 "événements" de ce type, liés aux services d'urgences, ont conduit à un décès.
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Commission d'enquête réclamée
Face à la gravité de la situation, des députés, syndicats et associations ont réclamé mercredi auprès de la présidente de l'Assemblée nationale la création rapide d'une commission d'enquête sur la crise des urgences. A l'été 2023, le nombre de fermetures la nuit par manque de personnel a atteint une ampleur inédite.
Cette pénurie de personnel oblige certains patients à rester des heures sur des brancards, parfois même plusieurs jours, en attente d'hospitalisation faute de lits disponibles dans les services spécialisés. Des situations qu'on appelle "zones de danger", car impossibles à surveiller correctement.
Selon les services statistiques des ministères sociaux, près de 40'000 lits d'hospitalisation complète ont été supprimés entre fin 2013 et fin 2022.
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Risque de mortalité en hausse
La dégradation de la situation des urgences en France n'est pas nouvelle. En septembre dernier, le syndicat Samu-Urgences alertait déjà sur la dégradation continue de la situation des urgences et Smur dans le pays. "La sécurité sanitaire n’est parfois plus assurée, y compris pour l’urgence vitale", indiquait l'organisation.
Selon une étude menée fin 2022, une nuit passée sur un brancard augmente de 40% le risque de mortalité des patients âgés de plus de 75 ans.
Hélène Krähenbühl avec afp