Dans les zones rurales de Côte d'Ivoire, l'accès à l'électricité reste un luxe rare. Ce manque se fait particulièrement sentir dans des villages isolés comme Anziéssahou, dans le sud-est du pays, où vivent environ 300 habitants sans raccordement au réseau électrique.
Plutôt que d’attendre de coûteux projets d’infrastructures, un programme financé par le Royaume-Uni, "Zero Emission Generators", vise à donner aux populations locales les moyens de produire leur propre énergie à partir de petits ateliers de fabrication d’éoliennes artisanales. Ce projet, coordonné par Karana Olivier, offre des solutions énergétiques adaptées aux réalités locales, comme l’explique ce dernier: "Une éolienne, c’est quelque chose qui tourne avec le vent pour créer l’électricité. Ça charge les batteries et les batteries vous donnent de la lumière", explique-t-il mardi dans le 19h30.
Une formation pratique pour électrifier les villages
Baptisée Energy in a Box, l'initiative propose des ateliers ouverts à tous pour enseigner aux habitants comment fabriquer des éoliennes à partir de matériaux recyclés. Ces formations, dirigées par des étudiants d’Abidjan et Karana Olivier, montrent que des matériaux modestes peuvent suffire pour générer de l'électricité, et pour un coût de production très faible. "Le but de l’atelier, ce n'est pas de vous donner quelque chose, mais de vous apprendre comment faire vous-même", précise le formateur. Les éoliennes créées lors de ces sessions permettent d’alimenter des lampes ou des appareils simples, répondant à des besoins essentiels.
Pour des habitants comme Agnès Lafiba, ce projet représente une avancée précieuse: "Si on avait de l’électricité, on pourrait utiliser une télé, on pourrait nous-mêmes charger nos téléphones", témoigne-t-elle.
Pour Olivier Karana, ces batteries offrent également des perspectives d’amélioration des conditions de vie, notamment par des petites activités génératrices de revenus: "Ils peuvent, par exemple, avoir de la lumière le soir pour faire des activités, comme cette femme qui me disait qu’elle aimerait bien faire marcher sa machine à coudre. Ces batteries pourraient aussi permettre d’assister les femmes lors des accouchements, avec de la lumière, et non dans le noir lorsqu’il fait nuit", détaille-t-il.
Recycler pour innover
Ce programme repose aussi sur l’utilisation de pièces récupérées, notamment dans les déchetteries d’Abidjan, où les composants nécessaires sont collectés. "C’est là qu’on prend les aimants [...] Tous les moteurs à aimant permanent, c’est notre trésor", explique Karana Olivier, soulignant l’importance de trouver des solutions locales, à défaut de pouvoir se procurer du matériel importé: "Tous mes amis me disent d’aller sur Amazon, c’est moins cher et disponible en grande quantité. Mais on n’a pas Amazon ici. Donc on cherche à faire d’abord avec ce qui est disponible ici en Côte d'Ivoire."
Ce projet pilote, encore modeste, a déjà permis à une vingtaine de villages de Côte d’Ivoire de commencer leur transition énergétique grâce à ces éoliennes improvisées. "Il y a des choses comme ça qui commencent à devenir de l’espoir dans les villages", conclut Karana Olivier, avec la conviction que cette approche de "do it yourself" pourrait, à terme, offrir une indépendance énergétique à de nombreuses communautés rurales.
Reportage TV: Pierre Morel
Adaptation web: Tristan Hertig