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Des milliers de petites mains de familles libanaises piégées au cœur de la guerre

Les employées de maison étrangères sont régulièrement victimes d'abus (image d'illustration). [Jamal Saidi]
Guerre au Liban: reportage au sein des travailleuses africaines abandonnées / La Matinale / 4 min. / le 12 novembre 2024
Esclaves modernes exploitées depuis des années, des milliers d'Africaines se retrouvent piégées au Liban. Elles ont été abandonnées par leurs employeurs libanais qui ont fui les bombardements. Reportage à Beyrouth.

Originaires de Côte d’Ivoire, du Togo, du Bénin ou de Sierra Leone, ces femmes sont venues au Liban pour envoyer de l’argent à leur famille, souvent très pauvre.

Dans un garage désaffecté dans une banlieue de Beyrouth, des travailleuses africaines discutent, alignées sur des bancs en bois. Près de 180 femmes et 5 bébés vivent ici. Elles ont été jetées à la rue par les familles pour lesquelles elles travaillaient dans des zones bombardées par l’armée israélienne. Ce hangar géré de jeunes Libanaises est leur dernier refuge.

Parmi ces laissées-pour-compte, Marion passe ses journées sur son téléphone pour tenter de récupérer le corps de sa cousine tuée dans une frappe aérienne au sud du Liban. Marion raconte l'histoire de Hawa, 22 ans: elle a été enfermée par ses employeurs dans la maison lorsqu'ils ont fui le Liban.

Plus de salaire ni de maison

Dans un quartier pauvre de Beyrouth, une dizaine de travailleuses africaines s’entassent dans un appartement insalubre. Ces femmes ont échappé à la mort dans le sud du pays. Avant, elles gagnaient en moyenne 200 dollars par mois, en travaillant presque 24 sur 24 h dans des familles libanaises. Aujourd’hui, elles se retrouvent sans salaire ni maison.

Nos vies n'ont pas de valeur. Nous sommes exclues de leur société, ils ne nous connaissent même pas

Tatiana, qui héberge plusieurs femmes originaires de pays africains

Selon les autorités locales, au moins 300'000 étrangers travaillaient au Liban avant la guerre, en majorité des femmes. Mais impossible de dire combien sont désormais piégées sous les bombes. Certaines n’ont plus de passeport, confisqué par les anciens employeurs ou périmé. Les autres n’ont pas les moyens d’acheter un billet d’avion, devenu hors de prix.

"Aujourd'hui, avec les bombardements, c'est la panique totale. J'ai envie de rentrer dans mon pays", témoigne Micha, une jeune Camerounaise. Elle s’inquiète aussi de voir de nouvelles Africaines atterrir au Liban ces derniers jours, piégées par des trafiquants d’êtres humains qui mentent sur leur destination. La plupart de ces femmes ne savent pas qu’elles arrivent dans un pays en guerre.

Sujet radio: Céline Martelet et Noé Pignède

Adaptation web: Julie Liardet

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