Emmanuel Macron accepte la démission du gouvernement, qui reste chargé des "affaires courantes"
"Afin que cette période s'achève le plus rapidement possible, il appartient aux forces républicaines de travailler ensemble pour bâtir un rassemblement autour de projets et d'actions au service des Françaises et des Français", a indiqué l'Elysée.
Selon des sources proches de l'Elysée, Emmanuel Macron a laissé entendre que cette situation pourrait "durer un certain temps", vraisemblablement au moins jusqu'à la fin des Jeux olympiques qui se tiennent du 26 juillet au 11 août à Paris. Il n'a pas exclu que le Conseil des ministres puisse se réunir à nouveau ponctuellement durant cette période.
Emmanuel Macron aurait par ailleurs fait un "discours de remerciement" à l'égard des ministres, tandis que Gabriel Attal a fait part de sa "reconnaissance" envers les membres de son gouvernement et le chef de l'Etat. "Il n'y a eu ni tensions ni effusions", a expliqué un autre participant, malgré les divergences désormais flagrantes entre les deux têtes de l'exécutif depuis la dissolution surprise de l'Assemblée, désapprouvée par le Premier ministre.
Même si Gabriel Attal a dû donner sa démission, il n'est pas ressorti cassé de son mandat de 6 mois. Au contraire, celui qui fut à 34 ans le plus jeune Premier ministre de la 5e République a révélé une redoutable maturité politique.
Élections importantes à venir à l'Assemblée nationale
Cette démission doit notamment permettre à tous les ministres élus députés de participer jeudi à l'élection de la présidence de l'Assemblée nationale, puis à l'attribution des postes clés du législatif vendredi et samedi.
En parallèle, le Nouveau Front populaire (NFP), arrivé en tête des élections législatives, n'est toujours pas parvenu à s'accorder sur une proposition commune pour le poste de Premier ou Première ministre (voir encadré). Et les tractations sont désormais reléguées au second plan alors que l'alliance de gauche souhaite également proposer une candidature unique à la présidence de l'Assemblée nationale, un poste clé qui sera attribué jeudi.
Selon le maître de conférences en sciences politiques à l'Université de Franche-Comté Vincent Lebrou, le NFP est toutefois encore en mesure de proposer un nom unique pour la présidence de l'Assemblée nationale. "C'est possible, mais cela prend du temps et crée des tensions", dit-il dans La Matinale de la RTS. "Pour ce qui est du Premier ministre, l'enjeu est encore plus important, poursuit-il. C'est plus complexe et cela révèle des tensions politiques et idéologiques assez fortes au sein de cette coalition".
Divisions à gauche
Ces divisions au sein de la gauche sont symptomatiques "du jeu politique français, qui continue de se fragmenter", estime Vincent Lebrou. "La gauche arrive à s'entendre ponctuellement quand il faut faire barrage ou quand il faut remporter une élection, mais sur la longueur, les partis de gauche ont des difficultés à s'entendre sur le plan stratégique et sur le plan politique", explique-t-il.
Le politologue rappelle également que le NFP est une nouvelle coalition, "qui est fragile dès le départ". "Elle s'est formée pour remporter une élection et le succès a été plutôt au rendez-vous, mais on voit bien que c'est difficile de s'entendre sur la longueur", indique-t-il. "Donc ce qu'il va se passer ces prochains jours va déterminer la suite du Nouveau Front populaire. S'ils arrivent à s'accorder sur quelques noms, ça pourrait continuer. Et sinon, ce sera assez difficile".
Emmanuel Macron joue la montre
Cette latence pourrait en effet desservir la gauche en laissant le temps à ses adversaires de mener des tractations sur le ou la future occupante de Matignon. Emmanuel Macron pourrait en effet décider de nommer une personnalité issue de ses rangs, au détriment de la gauche. Par ailleurs, il n'a aucun délai formel à respecter.
"Il a tout à fait intérêt à jouer la montre", affirme Vincent Lebrou. "Le temps qui passe fait apparaître des tensions assez fortes à gauche et cela va être plutôt profitable à Emmanuel Macron", ajoute-t-il. "C'est-à-dire que La France insoumise risque de continuer à s'isoler sur le plan politique et pendant ce temps-là, lui va pouvoir tisser doucement des alliances en vue de construire une nouvelle majorité".
Vers une coalition de droite?
Dans ce contexte, les regards se tournent vers Les Républicains et leur quarantaine de députés. Même si leur nouveau chef de groupe Laurent Wauquiez se refuse à toute "coalition gouvernementale", il élabore actuellement un "pacte législatif" autour de plusieurs mesures sur le travail et l'autorité.
Et une partie de la macronie adhère à la manœuvre, notamment Gérald Darmanin. Dans un message à ses collègues députés Renaissance, le ministre de l'Intérieur sortant a jugé que ces propositions étaient "très intéressantes et méritent que nous en discutions".
Mais ce "bloc central" reste tiraillé: en cas de coalition trop droitière, une partie de ses députées et des députés pourraient être tentés par un virage à gauche.
De son côté, le Rassemblement national (RN) est resté plutôt discret depuis l'issue des législatives. Selon Vincent Lebrou, cette décision est stratégique pour le RN, qui attend son heure en faisant profil bas. "En restant silencieux, le Rassemblement national met en lumière les dissensions à gauche et dans le camp présidentiel" affirme le politologue. "Et pendant ce temps-là, il reste, en apparence au moins, assez uni et donc prêt pour la prochaine législature".
Propos recueillis par Aleksandra Planinic
Adaptation web: jop/edel avec ats
Socialistes et Insoumis ne parviennent pas à s'accorder sur une candidature
Le NFP n'est toujours pas parvenu à s'accorder sur une proposition commune pour former un gouvernement. Durant le week-end, le nom de la communiste réunionnaise Huguette Bello, proposée par le chef du parti communiste Fabien Roussel, avait circulé et reçu un large soutien, mais avait été bloquée par le Parti socialiste.
À l'inverse, le PS a suggéré lundi le nom de Laurence Tubiana, économiste spécialiste du climat, également validée par les communistes et les écologistes. Mais l'idée a rapidement été balayée par La France insoumise, l'intéressée ayant notamment cosigné une tribune appelant le NFP à nouer des alliances à droite et accepter de renoncer à son programme de campagne.
"Si c'est sur ce genre de profils que travaillent nos partenaires, je tombe de ma chaise", a commenté le coordinateur de LFI Manuel Bompard mardi matin sur France 2. "Depuis huit jours, le PS a mis des véto systématiques à nos propositions. S'il s'agit désormais de revenir avec une proposition qui vise à (...) faire revenir par la fenêtre les macronistes qui ont été chassés par les électrices et les électeurs lors des législatives, c'est une proposition qui ne paraît pas sérieuse."
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De son côté, le chef de file du PS Olivier Faure a déploré à son tour sur France Inter que "la parole d'un seul" groupe du Front populaire "s'impose à tous les autres". Enfin, l'électron libre François Ruffin a fait part de son exaspération face aux atermoiements de son camp qui "donnent raison à Emmanuel Macron". "On ne fait qu'entériner le découragement, entériner le ressentiment" a-t-il affirmé sur RTL.