Évènements annulés, activistes inquiétés: des ONG s'inquiètent de la "répression" des pro-palestiniens en Europe
"Les lois contre les discours de haine et les lois antiterroristes sont instrumentalisées pour s'attaquer" aux propos pro-palestiniens, pourtant "légitimes selon les normes internationales", dénonce Julia Hall, chercheuse d'Amnesty international.
Selon elle, l'Europe a connu "une avalanche d'annulations et de ciblages de manifestants pacifiques, d'universitaires" ou de personnes solidaires des droits des Palestiniens et critiques envers Israël.
Certes, le nombre d'actes jugés antisémites a fortement augmenté dans plusieurs pays, dont l'Autriche ou la France, selon les autorités. Mais invoquer la lutte contre l'antisémitisme pour museler des critiques du gouvernement israélien a d'autant moins de "sens" que celles-ci émanent parfois de personnalité juive, dénonce Julia Hall.
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Accusations d'antisémitisme
Alors que l'invasion militaire israélienne se poursuit à Gaza, les voix pro-palestiniennes sont souvent accusées de complaisance vis-à-vis du Hamas, et leurs revendications antisionistes - parfois virulentes - sont souvent renvoyées à de l'antisémitisme. Des actes ou propos réellement antisémites, constatés parfois lors de manifestations pro-palestiniennes, alimentent ces accusations.
Dans l'Union européenne, au moins 12 Etats ont "pris des mesures disproportionnées, y compris l'interdiction de manifestations sur la base d'un risque apparent pour l'ordre public et la sécurité", pointe un rapport du Forum civique européen (ECF). Pour cette organisation basée à Bruxelles, cette "répression de la solidarité pro-palestinienne" s'explique par le "soutien massif" de l'Europe à Israël, lié à la Shoah.
Particulièrement tendu en France et en Allemagne
En France, pays européen comptant les plus grandes communautés juive et musulmane, les mesures se sont multipliées. Dernièrement, deux figures de gauche radicale, Rima Hassan et Mathilde Panot, cheffe du groupe La France insoumise à l'Assemblée nationale, ont même été convoquées par la police pour "apologie du terrorisme".
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Les autorités françaises ont mis en place "un dispositif administrativo-judiciaire" visant "les personnes s'exprimant en soutien aux Palestiniens", mais pas celles "soutenant Israël", a observé l'avocat d'origine juive Arié Alimi, membre de la Ligue des droits de l'Homme. Une situation qu'il juge "regrettable".
En Allemagne, l'ex-ministre grec Yanis Varoufakis s'est vu interdire d'entrée mi-avril "afin d'empêcher toute propagande antisémite et anti-israélienne", selon les autorités allemandes. À Berlin, la police a fermé le "Congrès palestinien" auquel il devait participer, une heure à peine après son ouverture.
Annie Ernaux ciblée en Autriche
En octobre, la psychothérapeute Iris Hefets a été arrêtée à Berlin pour une pancarte: "En tant que juive et israélienne, arrêtez le génocide à Gaza", tandis que l'association Judische Stimme, qui dénonce "la coopération allemande" avec "l'apartheid politique de l'Etat d'Israël en Cisjordanie", affirme avoir eu ses comptes gelés.
Enfin, en Autriche, c'est la prix Nobel française de littérature Annie Ernaux qui a été visée. Le président conservateur du parlement demande le retrait de son invitation au Wiener Festwochen. Mais le directeur artistique du festival, le dramaturge Milo Rau, refuse de s'exécuter. Qualifier l'écrivaine d'"antisémite" pour sa critique d'Israël est "aussi absurde" que la juger "francophobe" parce qu'elle critique son gouvernement, a-t-il observé.
jop avec afp