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Face à l'épidémie de mpox, "la coordination internationale est absolument nécessaire"

La Suisse ne prévoit pas pour l'instant de livrer de vaccins aux pays fortement touchés par le mpox. [Keystone]
C'est quoi ce virus MPox et pourquoi une "urgence internationale"? Interview de Marie-Paule Kieny / Tout un monde / 7 min. / le 19 août 2024
La semaine dernière, l'OMS a décrété le niveau d'alerte le plus élevé en raison de la propagation du mpox dans plusieurs pays d'Afrique. Ce décret d'"urgence de santé public" devrait permettre aux autorités du monde entier de se coordonner, explique lundi la virologue Marie-Paule Kieny dans Tout un monde.

"L'OMS a émis ce décret parce qu'il s'agit d'une maladie très grave, qui se propage de plus en plus", explique la virologue et ancienne sous-directrice générale de l’Organisation mondiale de la santé Marie-Paule Kieny au micro de l'émission de la RTS Tout un monde.

L'Afrique fait face à la propagation d'une nouvelle souche du virus, détectée en République démocratique du Congo (RDC) en septembre 2023 et baptisée "Clade 1b", plus mortelle et plus transmissible que les précédentes. Des premiers cas de mpox ont également été répertoriés en Suède, au Pakistan, ainsi qu'aux Philippines. "Avec la globalisation des échanges, il est fort à parier qu'on verra des cas essaimer dans d'autres pays", estime Marie-Paule Kieny.

Avec la globalisation des échanges, il est fort à parier qu'on verra des cas essaimer dans d'autres pays

Marie-Paule Kieny, virologue et ancienne sous-directrice générale de l’OMS

Coordination internationale

Avec son décret d'urgence de santé public, l'OMS enjoint donc tous les pays à travailler ensemble afin d'éviter une épidémie globale. Pour Marie-Paule Kieny, il s'agit également d'une décision politique, car "s'il n'y a pas de politique, il n'y a pas de coordination". Or, "cette coordination est absolument nécessaire pour prendre en charge cette urgence". L'OMS a donc mis en place un plan stratégique visant à harmoniser les pratiques.

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"Ce plan est basé sur la surveillance, pour que tous les pays mettent en place des outils pour savoir s'ils ont des cas, protéger les communautés, coordonner la réponse et regarder quelles sont les stratégies de prise en charge qui marchent le mieux pour éviter la mortalité", indique la virologue.

La coordination est absolument nécessaire pour prendre en charge cette urgence

Marie-Paule Kieny, virologue et ancienne sous-directrice générale de l’OMS

De nombreux défis

Jusqu'à présent, la gestion de l'épidémie n'a en effet pas toujours été optimale, notamment en RDC, épicentre de l'épidémie. "Il n'y a pas suffisamment de surveillance, les contacts des malades ne sont pas suffisamment suivis, les échantillons sont difficiles à transporter vers des laboratoires et la prise en charge n'est pas non plus appropriée pour le mpox", explique Marie-Paule Kieny.

Le pays, qui a enregistré au moins 16'000 cas, dont 548 mortels, doit toutefois faire face à de nombreux défis. "C'est un pays très pauvre, il y a des difficultés d'accès à certaines zones du pays, une partie du pays est en guerre, il y a des invasions de voisins dans une partie du territoire", énumère l'experte.

Pas assez de vaccins

Le but de l'alerte de l'OMS est également d'augmenter l'accès aux contre-mesures que sont les diagnostics, les médicaments ou les vaccins. S'il n'existe pour le moment aucun médicament dont l'efficacité est démontrée, les vaccins existants ont obtenu des résultats satisfaisant en termes de protection.

"Ces vaccins ont été développés au départ contre la variole, puisque le mpox est un très proche cousin de la variole humaine", précise Marie-Paule Kieny. Aujourd'hui, il n'en existe toutefois pas suffisamment. L'OMS a donc demandé aux pays disposant de stocks de vaccins de les distribuer aux pays touchés par l'épidémie. Les fabricants devraient en outre augmenter leur production.

La Suisse a acheté 40'000 doses de vaccin qui ont été distribuées dans les cantons, mais elle ne prévoit pas pour l'instant de livrer de vaccins aux pays fortement touchés par le mpox. Jusqu'ici, 13'000 doses ont été administrées, selon l'Office fédéral de la santé publique.

Propos recueillis par Eric Guevara-Frey

Adaptation web: Emilie Délétroz

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