Israël n'a pas perdu de temps le 8 décembre, jour du renversement du dictateur syrien Bachar al-Assad. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a ordonné l'envoi de troupes dans la zone démilitarisée du plateau du Golan.
Le dirigeant a assuré que l'occupation ne serait que temporaire, le temps que la sécurité revienne à la frontière. Depuis, le ministre israélien de la Défense Israël Katz a demandé à l'armée de se préparer à rester tout l'hiver.
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Une annexion reconnue seulement par Washington
Cette bande terrestre sous surveillance de l'ONU est censée faire figure de tampon entre Israël et la Syrie, qui se disputent depuis des décennies ces hauteurs.
Pour bien comprendre, il faut remonter au début du mois de juin 1967, lors de la guerre des Six jours, qui oppose l'Etat hébreu à ses voisins arabes. A sa frontière avec la Syrie, Israël s'empare alors d'une bonne partie du plateau du Golan.
En 1974, après la guerre du Kippour de 1973, un accord entre les deux pays instaure la zone tampon sous surveillance de l'ONU. Puis, en décembre 1981, les députés de la Knesset votent à une courte majorité une loi annexant officiellement 1200 km carrés du plateau, soit une surface qui correspond dans les grandes lignes à celle du canton d'Uri.
Quelques jours plus tard, le Conseil de sécurité de l'ONU dénonce cette annexion et exige qu'Israël revienne sur sa décision, en vain.
Un seul Etat a reconnu — il y a peu — l'autorité israélienne au Golan: les Etats-Unis, lors de la présidence de Donald Trump.
Un lieu stratégique
Cette région représente un atout stratégique à plusieurs titres. A l'ouest, elle surplombe le nord d'Israël, la vallée du Jourdain et du lac de Tibériade. A l'est, elle s'ouvre sur la route qui mène à Damas, la capitale syrienne. Son sous-sol contient également de nombreuses sources d'eau, un atout dans ces contrées arides.
Israël contrôle désormais également le versant syrien du mont Hermon. Cette montagne revêt une importance significative. Le sommet, qui culmine à 2814 mètres d'altitude, est un poste d'observation de choix sur Damas, distante d'une quarantaine de kilomètres.
Le gouvernement israélien a annoncé dimanche avoir validé un plan pour doubler la population vivant dans le territoire annexé. Quelque 30'000 Israéliens y sont pour l'heure établis et vivent aux côtés d'environ 20'000 Druzes.
Quelques jours auparavant, Benjamin Netanyahu avait déclaré que le Golan "fera partie de l'Etat d'Israël pour l'éternité". Le Premier ministre a toutefois aussi assuré ne pas vouloir entrer en guerre contre son voisin.
La Syrie pas en état d'entrer en guerre
Pour de nombreux observateurs, la manœuvre israélienne a pour objectif d'intimider le nouveau pouvoir en Syrie et de l'inciter à se tenir tranquille.
Une tactique qui semble pour l'heure porter ses fruits. Les nouveaux maîtres de Damas ont montré qu'ils ne souhaitaient pas s'engager dans un conflit avec Israël. Leur chef Abou Mouhammad al-Jolani a certes dénoncé une poussée israélienne qui "menace d'une escalade injustifiée dans la région", mais le leader du groupe islamiste Hayat Tahrir al-Sham a dans le même temps déclaré que son pays était trop "épuisé" pour combattre l'Etat hébreu.
Et ailleurs, de nombreux territoires syriens échappent encore au contrôle de la coalition rebelle, qui n'a donc pas intérêt à se frotter au puissant voisin israélien.
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Antoine Michel