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L'Irlande au cœur d'un projet d'interconnexion atlantique

Un projet de câbles sous-marins acheminant de l'électricité entre l'Irlande à l'Amérique du Nord est en cours de développement (image d'illustration). [AFP - Jeffrey Groeneweg - ANP]
Brancher l'Irlande et l'Amérique du Nord pour sécuriser l'approvisionnement / Tout un monde / 3 min. / le 12 novembre 2024
Un projet de câbles sous-marins acheminant de l'électricité entre l'Irlande et l'Amérique du Nord est en cours de développement. L'objectif est de renforcer la sécurité énergétique des Etats membres de l'Otan en établissant un lien physique entre ses deux blocs.

Ce plan ambitieux d’interconnexion atlantique permettrait d’envoyer de l’électricité produite par des sources renouvelables dans les deux sens de façon quasi continue en partageant les productions éoliennes et solaires produites à la fois en Europe et en Amérique du Nord. Les éoliennes de la mer du Nord pourraient ainsi, un jour, alimenter New York en électricité.

Cette énergie serait acheminée par des câbles, dont le diamètre ne dépasserait pas celui d’une pizza, qui s’étendraient sur 3500 kilomètres à travers l’océan Atlantique.

"Un pont entre les continents européen et américain"

Ce n'est pas un hasard si l'Irlande est au coeur de ce projet. Après l’Islande, il s'agit du pays européen le plus proche des côtes américaines. "Nous sommes vraiment le pont physique entre les continents européen et américain", affirme le député irlandais Cathal Berry dans l'émission Tout un monde de la RTS.

"Il est arrivé à de nombreuses reprises, au cours du siècle dernier, que l'Irlande fasse le lien avec l'Amérique du Nord, pour des câbles transatlantiques, mais aussi par rapport au stockage de données et, initialement, pour les télécommunications", poursuit-il "C’est donc très bien de maintenir ce lien."

Une grande partie de notre énergie est perdue, parce que nous n'avons pas cette interconnexion. Cela n'a aucun sens d'avoir toute cette énergie si elle est gaspillée

Cathal Berry, membre du Parlement irlandais

Cathal Berry rappelle également que l'Irlande dispose d'une abondance d'énergies renouvelables, "notamment grâce au vent, mais aussi aux vagues". "Mais une grande partie de notre énergie est perdue, parce que nous n'avons pas cette interconnexion", ajoute-t-il. "Cela n'a aucun sens d'avoir toute cette énergie si elle est gaspillée."

Renforcer la sécurité énergétique

Sur son site internet, le projet est présenté comme un moyen "d'autonomiser les communautés, de stimuler la croissance économique et d'atténuer les effets du changement climatique".

Il permettrait également de renforcer la sécurité énergétique parmi les membres de l’Otan, "à une époque où l’énergie est instrumentalisée par des régimes hostiles". Les fondateurs du projet d’interconnexion atlantique ont d'ailleurs assuré qu'aucun financement russe ou chinois ne sera accepté.

Les coûts de la construction du câble sont estimés entre 20 et 40 milliards d’euros. Les travaux pourraient quant à eux prendre jusqu'à 15 ans.

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Une neutralité pas remise en cause

L'implication de l'Irlande dans ce projet soulève donc certaines interrogations. Le pays a en effet toujours refusé de rejoindre l'Otan, dont était membre le Royaume-Uni. Mais l'origine de la neutralité irlandaise remonte en fait essentiellement à sa lutte pour l’indépendance vis-à-vis de son voisin anglais, explique Cathal Berry.

Vous pouvez toujours être un pays neutre, militairement non aligné, et coopérer avec vos voisins et amis.

Cathal Berry, membre du Parlement irlandais

"Nous avons été coincés dans un grand empire pendant un certain temps. Nous tenons donc beaucoup à notre indépendance et nous en sommes fiers", indique-t-il. "Mais vous pouvez toujours être un pays neutre, militairement non aligné, et coopérer avec vos voisins et amis. Et c'est ce qu'il se passe là."

Si l'élu irlandais estime que ce type de coopération informelle "va probablement augmenter de manière significative dans les années à venir", il n'envisage toutefois pas une adhésion de l'Irlande à l'Otan. Malgré tout, les fondateurs ont choisi d’appeler le projet le North Atlantic Transmission One Link (NATO-L), utilisant ainsi le même acronyme que la désignation anglaise de l'Otan.

Il s'agit peut-être d'une simple coïncidence, mais une chose est sûre: l’invasion de l’Ukraine par la Russie a rebattu les cartes de la diplomatie. D’autres Etats européens historiquement neutres comme l’Irlande ont en effet revu leur positionnement et décidé depuis de rejoindre l'Alliance atlantique, à l'image de la Suède et de la Finlande.

>> Lire aussi : Finlande et Suède, de la neutralité historique aux bras de l'Otan

Clémence Pénard/edel

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