A moins d'un mois des élections européennes pour lesquelles les sondages prédisent une poussée des partis anti-immigration, le pacte migratoire, un ensemble d'une dizaine de législations âprement négociées pendant des années, a été formellement adopté par le Conseil de l'UE (représentant les Etats membres). Le Parlement avait donné son aval en avril.
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Cette vaste réforme, qui ne s'appliquera qu'à partir de courant 2026, doit durcir le contrôle de l'immigration dans l'Union européenne (voir encadré). Le pacte s'imposera à tous les pays de l'UE, sous peine de procédures d'infraction. Mais les détails de mise en oeuvre pratique de cette réforme complexe restent encore à préciser.
L'UE fait face à une hausse des demandes d'asile: elles ont atteint 1,14 million en 2023, soit leur plus haut niveau depuis 2016, selon l'Agence européenne pour l'asile. Les entrées "irrégulières" dans l'UE sont aussi en augmentation, à 380'000 en 2023, selon Frontex.
A côté de cette réforme, l'UE multiplie les accords, controversés, avec les pays d'origine et de transit des exilés (Tunisie, Mauritanie, Egypte) pour tenter de réduire le nombre d'arrivées à ses frontières.
Cinq actes contraignants pour la Suisse
Cinq des dix nouveaux actes législatifs adoptés sont contraignants, au moins en partie, pour la Suisse, avait indiqué fin avril le Département fédéral de justice et police. Il s'agit notamment de nouvelles règles pour la procédure Dublin, d'un cadre normatif pour les situations de crise et de modifications du règlement concernant la base de données commune Eurodac.
La Suisse a deux ans pour reprendre ces dispositions. La mise en oeuvre du pacte ne nécessitera toutefois pas de chamboulement complet des procédures suisses, avait précisé le conseiller fédéral Beat Jans. Le Bâlois avait jugé que ce pacte constitue un "progrès", même s'il n'est pas parfait.
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Le nouveau mécanisme de solidarité, qui prévoit des relocalisations ou le versement de contributions financières aux Etats qui subissent une forte pression migratoire, n'est lui pas contraignant pour la Suisse. Elle peut néanmoins décider de s'y associer.
La Suisse n'est pas non plus liée par les nouvelles procédures aux frontières extérieures de l'espace Schengen.
juma avec agences
Durcir le ton face à l'immigration
Le pacte voté mardi met en place une procédure de "filtrage" des migrants aux frontières de l'UE pour les identifier et distinguer plus rapidement ceux qui ont des chances d'obtenir l'asile de ceux qui ont vocation à être renvoyés vers leur pays d'origine. Elle établit aussi un mécanisme de solidarité entre les 27 pays dans la prise en charge des demandeurs d'asile.
La règle en vigueur selon laquelle le premier pays d'entrée dans l'UE d'un migrant est responsable de sa demande d'asile est maintenue avec quelques aménagements.
Mais pour aider les pays où arrivent de nombreux exilés, comme l'Italie, la Grèce ou l'Espagne, un système de solidarité obligatoire est organisé. Les autres Etats membres doivent accueillir un certain nombre de demandeurs d'asile ou apporter une contribution, financière ou matérielle, au profit du pays sous pression migratoire.
Cette réforme se fonde sur une proposition de la Commission présentée en septembre 2020, après l'échec d'une précédente tentative de réforme au moment de la crise des réfugiés de 2015-2016.
>> Lire à nouveau : L'UE veut être "plus efficace" en matière de migration et d'asile
Oppositions et mécontentement
La Hongrie et la Pologne, qui avaient manifesté leur opposition lors d'un sommet de l'UE en octobre 2023, ont voté mardi contre tous les textes, qui ont été adoptés à la majorité qualifiée (55% des Etats membres représentant au moins 65% de la population de l'UE). L'Autriche et la Slovaquie ont voté contre certains.
Les organisations de défense des droits humains, de même que des élus de gauche et écologistes, n'ont eu de cesse de dénoncer ce pacte, fustigeant la possibilité de placer en détention les familles avec enfants et une "criminalisation" des exilés. A l'inverse, l'extrême droite a dénoncé la "faiblesse" de la réforme.
Certains Etats de l'UE veulent aller plus loin
Des Etats membres de l'Union européenne ont déjà signalé leur volonté d'aller plus loin dans l'externalisation de la gestion migratoire.
L'Italie a conclu récemment avec l'Albanie un accord pour envoyer dans ce pays candidat à l'UE des migrants secourus dans les eaux italiennes, afin que leurs demandes d'asile y soient traitées.
Un groupe de pays, emmenés par le Danemark et la République tchèque, s'apprêtent à envoyer une lettre dans laquelle ils plaident pour transférer des migrants hors de l'UE. Ces nouvelles propositions, dont la version définitive n'a pas été dévoilée, sont destinées à la prochaine Commission, qui prendra ses fonctions après les élections européennes.