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La CEDH condamne la Russie pour sa loi sur les "agents de l'étranger"

Laurent Vinatier, photographié le 3 septembre à Moscou. [AFP - ALEXANDER NEMENOV]
La CEDH condamne la Russie pour sa loi sur les "agents de l'étranger" / Le Journal horaire / 35 sec. / le 22 octobre 2024
La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a condamné mardi la Russie pour sa loi sur les "agents de l'étranger". Elle a jugé qu'elle était "arbitraire" et créait un "climat de méfiance" envers les associations. Le dernier en date à avoir fait les frais de cette loi est le Français Laurent Vinatier.

La juridiction avait été saisie par 107 ONG, médias et membres de la société civile russe au sujet de cette loi réminiscente de l'Union soviétique adoptée en 2012.

Dernier en date: le Français Laurent Vinatier, qui travaillait pour une association suisse de médiation diplomatique, a été condamné le 14 octobre à trois ans de prison pour ne pas s'être enregistré en tant qu'agent de l'étranger. Il a fait appel de sa condamnation, selon un tribunal moscovite (lire encadré).

>> Lire aussi : Laurent Vinatier, employé français d'une ONG suisse, a été condamné à trois ans de prison en Russie

Pour la CEDH, "la législation actuellement en vigueur est stigmatisante, trompeuse et appliquée de manière trop extensive et imprévisible".

"Principes violés"

La Cour a aussi estimé que "cette législation avait pour but de punir et d'intimider plutôt que de répondre à un besoin allégué de transparence ou à des impératifs légitimes de sécurité nationale".

Elle a conclu que les principes de liberté d'expression, liberté d'association et de droit au respect de la vie privée et familiale étaient violés par cette loi à l'égard des requérants.

Parmi les dizaines de requérants figurent International Memorial et le Centre des droits de l'Homme Memorial, Radio Free Europe/Radio Liberty, des journalistes, mais aussi des défenseurs des droits de l'Homme, des militants écologistes et des observateurs électoraux.

Ils ont attaqué cette législation qui les contraint à s'inscrire comme des "agents de l'étranger" avec comme conséquences: inspections, amendes, et restrictions de leurs activités.

"Les obligations de mentions pour les 'agents étrangers' ont été élargies au fil du temps pour s'appliquer aussi aux comptes de réseaux sociaux, aux sites internet et, enfin, à toutes les communications, y compris les pièces produites devant les tribunaux", a rappelé la Cour.

Charge financière et administrative importante

Les requérants ont aussi pointé du doigt la charge financière et administrative importante qu'impose cette législation, qui a conduit à la dissolution de certaines ONG, dont International Memorial et le centre des droits de l'Homme Memorial.

Dans sa décision, la Cour a évoqué "des sanctions manifestement disproportionnées, y compris des amendes arbitraires voire la dissolution" et a estimé que "de telles restrictions ont un effet dissuasif sur le discours public et sur l'engagement civique".

"Elles créent un climat de suspicion et de méfiance envers les voix indépendantes et sapent les fondements mêmes d'une société démocratique", selon la CEDH.

ats/fgn

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Laurent Vinatier a fait appel de sa condamnation à trois ans de prison

Le Français Laurent Vinatier a fait appel de sa condamnation à trois ans de prison en Russie pour ne pas s'être enregistré en tant qu'"agent de l'étranger", a indiqué mardi un tribunal de Moscou. L'avocat de Laurent Vinatier, arrêté le 6 juin et condamné le 14 octobre, a confirmé l'appel, mais s'est refusé à tout autre commentaire.

Laurent Vinatier, un chercheur spécialiste de l'espace post-soviétique, était employé sur le sol russe par le Centre pour le dialogue humanitaire, une ONG suisse qui fait de la médiation dans des conflits hors des circuits diplomatiques officiels.

Les services de sécurité russes ont affirmé que l'accusé avait recueilli "des informations militaires et techniques pouvant être utilisées par des services de renseignement étrangers à l'encontre de la sécurité de la Russie".

Ces accusations avaient fait redouter une inculpation plus grave, pour "espionnage", un crime passible de 20 ans de prison en Russie.