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La droite française se déchire sur une possible alliance avec le RN en vue des législatives

La droite française se déchire sur une possible alliance avec le Rassemblement National en vue des élections législatives
La droite française se déchire sur une possible alliance avec le Rassemblement National en vue des élections législatives / 19h30 / 2 min. / le 11 juin 2024
Deux jours après la convocation d'élections législatives, le président des Républicains Eric Ciotti a défendu mardi un accord avec le Rassemblement national, soulevant une vague d'indignation au sein de la droite qui pourrait faire imploser son parti. De son côté, la gauche a décidé de s'unir sous la bannière "Front populaire".

"Nous avons besoin d'une alliance [...] avec le Rassemblement national", a affirmé Eric Ciotti au 13h de TF1, estimant que "le pays n'a jamais été autant à droite" et souhaitant que "tous les députés LR sortants s'allient avec le RN pour préserver un groupe puissant à l'Assemblée nationale".

L'initiative a été aussitôt désavouée par le chef des députés Les Républicains (LR) Olivier Marleix, pour qui Eric Ciotti "n'engage que lui" et "doit quitter la présidence" du parti. Le président du Sénat Gérard Larcher a de son côté prévenu qu'il "n'avalisera jamais, sous aucun prétexte, un accord avec le RN", tandis que deux influents membres de son groupe, la vice-présidente Sophie Primas et le rapporteur général du Budget Jean-François Husson, ont annoncé quitter le parti.

"Je condamne [cette décision] sur le fond et sur la forme, car c'est une décision individuelle prise sans concertation. De plus, nous n'avons jamais franchi le Rubicon. Il y a toujours eu une ligne rouge très claire [sur le fait] qu'il n'y aurait aucune alliance avec le Rassemblement national dans notre famille politique", a aussi dénoncé Virginie Duby-Muller, députée LR en Haute-Savoie, mardi sur le plateau du 19h30. "Nous demandons qu'Eric Ciotti quitte le parti."

Malgré une avalanche d'appels à la démission au sein de son parti, Eric Ciotti a de son côté martelé qu'il "ne cédera pas" aux pressions et que "seuls les militants pourraient [lui] enlever son mandat".

>> L'interview complète de Virginie Duby-Muller dans le 19h30 :

Virginie Duby-Muller, députée de Haute-Savoie et membre des Républicains, revient sur l'appel d'Éric Ciotti concernant une alliance avec l'extrême-droite
Virginie Duby-Muller, députée de Haute-Savoie et membre des Républicains, revient sur l'appel d'Éric Ciotti concernant une alliance avec l'extrême-droite / 19h30 / 3 min. / le 11 juin 2024

L'extrême droite ravie

Le patron des Républicains a déclenché un torrent d'indignation bien au-delà de son camp. Tenant d'une ligne dure sur l'immigration, Eric Ciotti a fait tomber une digue qui avait jusque-là tenu son parti, héritier déclaré du général de Gaulle, à l'écart de tout accord avec le Rassemblement national (RN), dont l'ancêtre a été cofondé par un ancien Waffen-SS.

"Eric Ciotti signe les accords de Munich et enfonce dans le déshonneur la famille gaulliste", a ainsi réagi le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin. "Eric Ciotti vient d'assassiner la droite républicaine", a renchéri la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet.

A l'inverse, galvanisée par le succès de son parti aux élections européennes, Marine Le Pen a salué "le choix courageux" et "le sens des responsabilités" du président des Républicains, et espéré "qu'un nombre conséquent de cadres LR le suivent". Même satisfaction chez Jordan Bardella, ravi qu'Eric Ciotti ait répondu à son "appel au rassemblement".

Au Journal de France 2, le chef de file du RN a ensuite annoncé qu'"il y aura un accord" pour les législatives, en avançant que "plusieurs dizaines" de députés républicains seront "investis" ou "soutenus" par son parti. Le matin, il avait assuré vouloir "bâtir une majorité la plus large possible".

Le RN a par la suite précisé qu'il investira "des dizaines de candidats LR", dont "des [députés] sortants", mais sans préciser le nombre de ces derniers. Or, une consultation menée au sein du groupe de députés LR sortants de l'Assemblée n'a enregistré, sur 61 membres, que deux votes favorables à cet accord dont celui d'Eric Ciotti, a indiqué une source du parti.

>> Les républicains ont toujours maintenu leur distance avec l'extrême droite :

Retour sur l'évolution du barrage républicain de la droite française vis-à-vis du Front national.
Retour sur l'évolution du barrage républicain de la droite française vis-à-vis du Front national. / 19h30 / 2 min. / le 11 juin 2024

Pas d'alliance entre le RN et Reconquête!

Le RN a en revanche renoncé à nouer une alliance vers sa droite en refusant un accord avec le parti Reconquête! fondé par le polémiste d'extrême droite Eric Zemmour, plusieurs fois condamné pour incitation à la haine raciale.

"Malgré mes tentatives de négociation, le regrettable argument qui m'a été avancé [est] qu'ils ne souhaitent aucune association directe ou indirecte avec Eric Zemmour", a expliqué dans un communiqué Marion Maréchal, qui dirigeait la liste zemmouriste aux européennes.

Le président d'Horizons Édouard Philippe a lui indiqué qu'il "tendait la main" aux membres des Républicains opposés à l'alliance avec le Rassemblement national, une initiative qualifiée de "consternante" et "contre-nature" par l'ancien Premier ministre.

>> Voir les explications d'Alexandre Habay concernant la crise chez Les Républicains :

Les Républicains sont en crise après l’annonce d’Emmanuel Macron sur la dissolution de l’Assemblée nationale
Les Républicains sont en crise après l’annonce d’Emmanuel Macron sur la dissolution de l’Assemblée nationale / Forum / 2 min. / le 11 juin 2024

Emmanuel Macron temporise

Pendant qu'une partie de la droite règle ses comptes, Emmanuel Macron fait lui jouer la montre. Sa conférence de presse, initialement annoncée mardi après-midi, se tiendra finalement mercredi à la mi-journée, a fait savoir l'Elysée.

Le président français y indiquera "l'orientation qu'il croit juste pour la Nation", à seulement 18 jours du premier tour de la plus courte campagne législative dans l'histoire de la Ve République. Emmanuel Macron a déjà déclaré qu'il excluait de démissionner "quel que soit le résultat" du 7 juillet. "J'y vais pour gagner", a assuré le dirigeant, malgré sa popularité en berne.

En attendant, le Premier ministre Gabriel Attal a fait savoir sur TF1 qu'il mènerait personnellement la campagne des législatives, avec son identité, "c'est-à-dire toujours écouter les Français, même quand ça ne fait pas toujours plaisir ce qu'on entend, essayer de prendre des décisions concrètes, régler les problèmes".

Selon un sondage réalisé par Toluna Harris Interactive et paru lundi, le RN est crédité de 34% d'intentions de vote pour le scrutin du 30 juin, ce qui lui permettrait, selon l'institut, d'obtenir une majorité relative à l'Assemblée nationale une semaine plus tard, avec 235 à 265 députés.

>> Lire aussi : La dissolution de l'Assemblée nationale pourrait propulser le Rassemblement national à Matignon

Les macronistes, avec 19%, ne pourraient tabler que sur 125 à 155 sièges, contre 115 à 145 pour la gauche, créditée de 22% sous sa nouvelle bannière unitaire, le "Front populaire" (lire l'encadré à ce sujet).

>> Participez à la discussion avec "dialogue", une offre de la SSR :

agences/iar

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La gauche s'unit sous la bannière "Front populaire", malgré des crispations

Les quatre principaux partis de gauche - La France insoumise (LFI), le Parti socialiste (PS), Les Ecologistes et le Parti communiste français (PCF) - ainsi que le mouvement Place publique de Raphaël Glucksmann et Générations, ont trouvé un terrain d'entente lundi soir et appelé à "des candidatures uniques dès le premier tour" des législatives le 30 juin.

Les tractations ont repris mardi matin, pour affiner un programme commun et répartir les 577 circonscriptions. Mais le choix d'un chef de file reste en suspens. "Ce ne sera clairement pas Jean-Luc Mélenchon", a estimé Raphaël Glucksmann, excluant également d'être lui-même candidat au poste de Premier ministre en cas de succès, pour mieux suggérer le nom de l'ex-secrétaire général de la CFDT Laurent Berger.

Le cas Mélenchon crispe aussi les chefs de partis, à l'instar du socialiste Olivier Faure, qui a estimé sur TF1 qu'"il n'y a pas de logique" à ce que le leader insoumis "soit le candidat" de la gauche pour Matignon. "Il n'était pas dans les discussions" lundi, a souligné Fabien Roussel du PCF sur France 2, ajoutant que les partis sont "en train de construire autre chose".

"La question [de Jean-Luc Mélenchon] n'est pas consensuelle dans cet accord", a reconnu l'écologiste Sandrine Rousseau sur LCI, évoquant, elle aussi, l'option Laurent Berger, mais aussi celle de l'insoumis François Ruffin.

Les candidatures devront être déposées entre mercredi et dimanche, alors que la campagne électorale pour le premier tour débutera lundi prochain.

>> L'interview dans Forum de Sandrine Rousseau sur l'union de la gauche française :

Le "Front populaire" de la gauche française, une alliance solide ou de façade? Interview de Sandrine Rousseau
Le "Front populaire" de la gauche française, une alliance solide ou de façade? Interview de Sandrine Rousseau / Forum / 7 min. / le 11 juin 2024