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La gauche française dévoile son programme, la droite continue de se déchirer

Les gauches unies du nouveau ‘‘Front populaire’’ proposent une rupture politique en France. [Keystone/EPA - Yoan Valat]
Les gauches unies du nouveau ‘‘Front populaire’’ proposent une rupture politique en France. - [Keystone/EPA - Yoan Valat]
La nouvelle coalition de gauche en France a détaillé vendredi son programme de "rupture totale" pour les législatives, négocié au prix de compromis sur l'Ukraine ou le Proche-Orient, l'extrême droite promettant de son côté un gouvernement "d'union nationale" en cas de victoire en juillet. 

Après la déroute du camp présidentiel aux élections européennes et la dissolution de l'Assemblée décidée par le président Emmanuel Macron, les principaux partis de gauche se sont retrouvés vendredi pour célébrer leur union.

Ils ont promis des mesures sociales, hausse du salaire minimum, abandon du relèvement de l'âge de la retraite, rétablissement de l'impôt sur la fortune..., en cas de succès aux élections législatives prévues les 30 juin et 7 juillet.

Aussi sur des questions de politique internationale

Fruit de difficiles négociations, le programme commun de ce "Nouveau Front Populaire" dessine également un compromis sur des questions de politique internationale qui ont profondément divisé la gauche ces derniers mois.

Sur le Proche-Orient, il appelle ainsi "à agir pour la libération des otages détenus depuis les massacres terroristes du Hamas, dont nous rejetons le projet théocratique, et pour la libération des prisonniers politiques palestiniens". Principale force à gauche, le parti de La France insoumise (LFI, gauche radicale) a jusqu'à présent refusé d'assimiler le Hamas palestinien à un mouvement terroriste, en rupture avec la position de la France et de l'Union européenne.

Cette divergence entre LFI et ses partenaires avait d'ailleurs fait éclater à l'automne dernier, la précédente union des partis de gauche, la Nupes, acronyme de Nouvelle Union populaire écologique et sociale, créée en vue des législatives de 2022.

Sur la guerre en Ukraine, autre point de crispation à gauche, la coalition s'engage à "défendre indéfectiblement la souveraineté et la liberté du peuple ukrainien" et à assurer à Kiev les livraisons d'armes "nécessaires".

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Plusieurs débats encore ouverts

Reste toutefois ouvert le débat sur l'identité de celui ou celle qui, à gauche, pourrait devenir Premier ministre. "Il faut une personne qui fasse consensus", a déclaré l'eurodéputé social-démocrate Raphaël Glucksmann, arrivé en tête des européennes à gauche, disqualifiant Jean-Luc Mélenchon, tribun de la gauche radicale et personnalité clivante, accusé de proximité avec la Russie et de positions ambigües sur l'antisémitisme.

D'autres sujets de désaccord persistants ont toutefois été laissés de côté, comme l'Otan.

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jfe avec les agences

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"Principal adversaire" estime Jordan Bardella

A droite, au contraire, Les Républicains n'en finissent pas de se déchirer. Après avoir exclu leur président Eric Ciotti mercredi, les membres du bureau national se sont à nouveau réunis en visioconférence tôt vendredi matin pour "valider" cette décision.

Juste avant que le tribunal judiciaire de Paris examine le recours d'Eric Ciotti contre son éviction, dont il conteste la légalité. Répudié pour avoir conclu un accord électoral avec le Rassemblement national, le député sortant des Alpes-Maritimes a déjeuné jeudi avec ses nouveaux alliés Marine Le Pen et Jordan Bardella.

Ce dernier a estimé vendredi que le "Nouveau Front populaire", coalition de gauche qui réunit notamment LFI, PCF, EELV et PS, était son "principal adversaire" pour les élections législatives des 30 juin et 7 juillet, lors d'un déplacement dans le Loiret.

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Le président du RN a annoncé sur BFMTV que le parti d'extrême droite présentera "un candidat commun" avec LR "dans 70 circonscriptions".

Il faudra s'attendre à "un certain nombre de surprises dimanche" lors du dépôt des listes, a prévenu Marine Le Pen lors d'un déplacement dans son fief d'Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais). "Nous avons la possibilité de gagner ces élections et de faire un gouvernement d'union nationale", a-t-elle insisté, renvoyant sur son poulain Jordan Bardella la responsabilité de "choisir son équipe".

Attal dénonce des "accords boutiques"

Le Premier ministre Gabriel Attal était, lui, à La-Chapelle-sur-Erdre (Loire-Atlantique), où il a dénoncé "des accords de boutique" à droite comme à gauche.

Parfois coupé par des militants de gauche qui scandaient "Assez des 49.3", il a dit préférer se concentrer sur le pouvoir d'achat ou la sécurité, sujets sur lesquels il entend "aller beaucoup plus fort" durant la campagne.

La veille, Emmanuel Macron a lui convoqué l'argument des Jeux olympiques pour défendre sa majorité. Les Français "n'ont pas envie d'avoir des Jeux olympiques qui se présentent mal", a ajouté le chef de l'Etat, en marge du G7 en Italie. Le chef de l'Etat ne "croit pas", par ailleurs, être affaibli à l'international malgré la menace d'une cohabitation avec l'extrême droite.

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"Pari raté" pour Emmanuel Macron dont le parti est "pris en étau"

Invité dans Forum vendredi, Matthieu Gallard, directeur de recherche à l'institut de sondages Ipsos, a expliqué que l'enjeu de ce scrutin était "d'arriver uni" et d'être parmi les deux premiers partis sur le podium pour passer au second tour. Si tout est encore incertain pour les trois camps, celui du président Emmanuel Macron semble être en position plus difficile.

"On a un camp présidentiel pris en étau sur sa droite et sur sa gauche et qui va être probablement en grande difficulté, ne serait-ce que pour franchir le premier tour", analyse-t-il. Le pari du chef d'Etat semble donc "raté dès à présent", lui qui "espérait affronter une gauche divisée", poursuit-il.

Pour le premier tour, l'important, selon Matthieu Gallard, sera le nombre de voix obtenues par le Front populaire et pour le deuxième, ce sera de voir "qui fait le plus peur en France" entre la gauche et l'extrême droite.

"Il semble tout à fait envisageable qu'il n'y ait à nouveau pas de majorité absolue à l'Assemblée nationale, mais ça ne semble pas impossible que l'un des blocs" la remporte, dit encore l'invité de la RTS. "Toutes les options sont sur la table", la victoire du RN, comme celle de la gauche.