La gauche propose Lucie Castets pour Matignon, Emmanuel Macron dit qu'il ne nommera personne avant mi-août
Après 16 jours de négociations qui ont failli faire imploser l'union de la gauche, les partenaires du Nouveau Front populaire - socialistes, écologistes, La France insoumise et communistes - ont réussi à s'accorder sur un nom de Premier ministre potentiel, ont-ils fait savoir dans un communiqué.
La haute fonctionnaire Lucie Castets a accepté la proposition "en toute humilité mais avec beaucoup de conviction", estimant être une candidate "crédible et sérieuse" pour Matignon. Le NFP revendique le poste de Premier ministre depuis qu'il est arrivé en tête des législatives, mais sans majorité absolue.
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Une candidate surprise de 37 ans
La candidate surprise du NFP, âgée de 37 ans et issue de la société civile, a déclaré avoir parmi ses "grandes priorités" l'"abrogation de la réforme des retraites" d'Emmanuel Macron, une "grande réforme fiscale pour que chacun, individus et multinationales, paie sa juste part", une "amélioration du pouvoir d'achat" par la revalorisation des salaires et le relèvement des minima sociaux, ainsi que la "fin de la régression des services publics".
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Le NFP juge que Lucie Castets sera "forte de (son) engagement complet à ses côtés dans le gouvernement qu'elle dirigera". Inconnue du grand public, elle est actuellement directrice des finances et des achats à la ville de Paris. Elle est une des figures de proue du collectif "Nos services publics", résolument opposé à la politique du gouvernement sortant pour la fonction publique.
"Elle a un parcours professionnel au service de l'Etat et des collectivités territoriales remarquable, avec des engagements forts sur la justice fiscale, la lutte contre l'évasion fiscale", souligne le cofondateur de "Nos Services publics" Arnaud Bontemps. "C'est une personne très engagée sur l'école, l'hôpital, la justice sociale", a-t-il ajouté. "Elle va très vite sur des sujets parfois très complexes, elle est très humaine, proche des gens", a-t-il assuré.
Le NFP n'a pas de majorité, rétorque Macron
Cette annonce est intervenue juste avant une interview accordée à France 2 par Emmanuel Macron, la première depuis les législatives. Le chef de l'Etat a martelé que le Nouveau Front populaire n'avait "pas de majorité" à l'Assemblée, rejetant de facto la proposition de la gauche de nommer Lucie Castets à Matignon.
"Il est faux de dire que le Nouveau Front populaire aurait une majorité, quelle qu'elle soit", a déclaré le président. "La question n'est pas un nom. La question, c'est quelle majorité peut se dégager à l'Assemblée pour qu'un gouvernement de la France puisse passer des réformes, passer un budget et faire avancer le pays", a-t-il ajouté.
Emmanuel Macron a aussi déclaré que le gouvernement démissionnaire resterait en place au moins jusqu'à la mi-août. "Jusqu'à la mi-août, nous ne sommes pas en situation de changer les choses", a-t-il ajouté. "De manière évidente, jusqu'à la mi-août, on doit être concentré sur les Jeux. Et puis à partir de là, en fonction de l'avancée de ces discussions, ce sera ma responsabilité de nommer un Premier ministre ou une Première ministre et lui confier la tâche de constituer un gouvernement et d'avoir le rassemblement le plus large qui lui permette d'agir et d'avoir la stabilité."
Le président a en outre exhorté les forces politiques du front républicain anti-RN à être "à la hauteur de ce qu'elles ont fait dans l'entre-deux-tours" des élections législatives et à faire "des compromis".
La gauche dénonce un "déni de démocratie"
Plusieurs figures de la gauche ont dénoncé la réponse du président et l'ont appelé à nommer Lucie Castets à Matignon, et en premier lieu le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon. "Il doit la nommer et respecter les règles de la démocratie. Le pays est impatient de voir sa décision s'appliquer!", a-t-il écrit sur X. Emmanuel Macron "veut nous imposer de force son front républicain", a-t-il ensuite déploré, après la prise de parole du président.
Le coordinateur de LFI Manuel Bompard a lui dénoncé un "déni de démocratie insupportable". Et d'ajouter: "En France, il n'y a pas de droit de véto présidentiel quand le peuple s'exprime."
Le Premier secrétaire du PS Olivier Faure a pour sa part accusé Emmanuel Macron de faire "la politique du pire" en ne respectant pas le résultat des législatives. "Le front républicain n'est pas un programme, mais un réflexe démocratique. Macron tente un détournement coupable."
Le chef des communistes Fabien Roussel a jugé Emmanuel Macron "très dangereux", "enfermé dans sa bulle, coupé du peuple". "Il refuse de nommer la candidate au poste de Premier Ministre proposée par la coalition arrivée en tête des élections. Violence extrême pour notre démocratie", a-t-il martelé sur X.
Pour la cheffe des Ecologistes Marine Tondelier, le chef de l'Etat est "en décalage total avec la réalité", a-t-elle déploré, ironisant sur un président qui "pourrait se qualifier sans problème pour toutes les épreuves à la rame des JO".
edel/boi avec afp