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"La peine de mort, une forme de torture qu'il faut abolir maintenant", plaide le rapporteur spécial de l'ONU

La Suisse est engagée contre la peine de mort dans le monde. Notamment à l’ONU, où le rapporteur spécial met tout en œuvre pour son abrogation définitive
La Suisse est engagée contre la peine de mort dans le monde. Notamment à l’ONU, où le rapporteur spécial met tout en œuvre pour son abrogation définitive / 12h45 / 2 min. / le 12 octobre 2024
La Journée mondiale contre la peine de mort a eu lieu jeudi 10 octobre. La Suisse s'engage notamment auprès de l'Organisation des Nations unies (ONU), pour laquelle le rapporteur spécial met tout en œuvre en vue de l'abrogation définitive de la peine de mort dans le monde.

Après une votation populaire, la Suisse abroge officiellement la peine de mort en 1942, bien que plusieurs militaires helvétiques furent fusillés durant les deux années qui ont suivi le vote. Ce n'est qu'à partir de 1992 que la Suisse ratifie un premier traité international contre la peine de mort, l'abrogeant également du droit militaire.

Aujourd'hui, la Suisse est engagée auprès des Nations unies pour se battre contre la peine de mort. Et à l'ONU, Morris Tidball-Binz, le rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, estime que la peine de mort n'a pas d'effet dissuasif.

Dans les pays fédéralistes, il n'y a pas de différence de criminalité entre les Etats qui appliquent la peine de mort et ceux qui l'ont abrogée

Morris Tidball-Binz, rapporteur spécial de l'ONU

"Si certains pays fédéralistes appliquent la peine de mort," - à l'instar des Etats-Unis, ndlr - "il n'y a pas de différence de criminalité entre les Etats qui appliquent la peine de mort et ceux qui l'ont abrogée. La majorité des pays qui ont aboli la peine de mort n'ont pas enregistré d'augmentation des crimes, mais plutôt le contraire", étaye-t-il.

Processus long et complexe

Morris Tidball-Binz - également médecin criminaliste et ancien activiste sous la dictature militaire en Argentine - rappelle qu'en 1957, seulement neuf pays avaient renoncé à la peine de mort. Aujourd'hui, 122 Etats l'ont abolie, notamment grâce aux efforts de pays comme la Suisse, souligne cet ancien du CICR.

Par ailleurs, 56 pays pratiquent un moratoire, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas recours à la peine de mort, mais ne l'ont pas officiellement abolie. Et quinze Etats la pratiquent toujours, parmi lesquels la Chine, l'Arabie saoudite, l'Iran, les Etats-Unis, ou encore le Vietnam et la Corée du Nord.

Abolir la peine de mort est un processus long et complexe. Il faut tenir compte des paramètres internes au pays, comme la situation de la société

Morris Tidball-Binz, rapporteur spécial de l'ONU

Mais les démarches se poursuivent. "Plusieurs Etats africains ont aboli récemment la peine de mort, mais c'est un processus long et complexe. Il faut tenir compte des paramètres internes au pays en question, comme la situation politique du pays, l'engagement de la société civile ou des ordres d'avocats," explique Laurent Schaffner, collaborateur diplomatique au Département fédéral des affaires étrangères.

Outil de torture

Le rapporteur spécial de l'ONU souligne qu'il n'y a pas d'exécution qu'on puisse qualifier "d'humaine", expliquant son engagement personnel et bénévole.

"Une des méthodes de torture les plus courantes, c'est de menacer quelqu'un de la peine mort. Et ça impacte l'individu condamné ou les membres de sa famille," explique Morris Tidball-Binz. "D'un point de vue médical, je vois la peine de mort comme une forme de torture qui doit être abolie maintenant."

Sujet TV: Chloé Steulet

Adaptation web: Raphaël Dubois

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