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Le FPÖ d’extrême droite espère remporter ses premières législatives en Autriche

Alors que les élections législatives autrichiennes se tiendront dimanche, focus sur le parti d’extrême droite FPÖ de Herbert Kickl, annoncé en tête par les sondages
Alors que les élections législatives autrichiennes se tiendront dimanche, focus sur le parti d’extrême droite FPÖ de Herbert Kickl, annoncé en tête par les sondages / 19h30 / 2 min. / samedi à 19:30
Avec la montée des partis d'extrême droite en Europe, le FPÖ autrichien espère bien confirmer cette tendance lors des élections législatives dimanche. Les sondages le donnent gagnant pour la première fois, avec 30% des intentions de vote.

Le Parti de la Liberté (FPÖ) a déjà goûté au pouvoir mais n'a encore jamais fini en tête d'un scrutin national. Cette fois il veut y croire, fort de sa victoire aux élections européennes de juin dans un contexte de montée de l'extrême droite en Europe.

Le FPÖ, touché de plein fouet par le scandale de corruption de l'Ibizagate en 2019, a en effet opéré une remontée spectaculaire ces derniers mois sous la houlette de son chef Herbert Kickl.

Herbert Kickl est toujours agressif, il attaque sans cesse. Auparavant, ce type d'attitude l'aurait empêché de devenir chef, mais aujourd’hui cela correspond à notre époque

Robert Treichler, journaliste auteur d'une biographie-enquête sur Herbert Kickl

>> Pour en savoir plus sur le scandale du Ibizagate, lire : Le vice-chancelier autrichien démissionne à cause d'une vidéo compromettante

Discours radical

Herbert Kickl, personnalité clivante et secrète, a été la plume de Jörg Haider, le leader du FPÖ de 1986 à 2000. Pas destiné à reprendre les rênes du parti, il s'est imposé pendant la pandémie de coronavirus en se faisant le porte-voix des anti-vaccins dont le mouvement était important en Autriche.

Depuis qu’il est chef du parti, il a imposé un discours extrêmement radical, bien loin d’une stratégie de dédiabolisation. Il use de termes qui sont des références à peine voilées au langage national-socialiste, ne fait pas mystère de ses positions prorusses et fait de l'"orbanisation" de l’Autriche un programme politique.

Son discours revendiqué anti-élite place évidemment au centre la question migratoire, avec des propositions toujours plus extrêmes, comme l’installation de "centres de départ" pour les demandeurs d’asile. Cette radicalité semble fonctionner, car le FPÖ est en tête des sondages depuis de nombreux mois désormais.

>> L'interview de l'historien et politologue Patrick Moreau dans Forum :

L’extrême droite est aux portes du pouvoir en Autriche. [Keystone - EPA/Filip Singer]Keystone - EPA/Filip Singer
L’extrême droite est aux portes du pouvoir en Autriche: interview de Patrick Moreau / Forum / 6 min. / samedi à 18:05

"Autre époque"

Le journaliste Robert Treichler, auteur d'une biographie-enquête sur Herbert Kickl, explique cette popularité par le changement dans l'attitude politique en Europe. "Herbert Kickl est toujours agressif, il attaque sans cesse. Auparavant, ce type d'attitude l'aurait empêché de devenir chef, mais aujourd’hui cela correspond à notre époque", constate-t-il dans l'émission Tout Un Monde jeudi.

"Là où Marine le Pen a besoin (...) d’une stratégie de dédiabolisation pour dépasser les 50%, Herbert Kickl, lui, n’a nul besoin de cela. Il doit s’assurer de garder ses 30% (de voix), ce qu'il peut faire avec agressivité."

Liens avec le mouvement identitaire

Depuis qu'Herbert Kickl est à la tête du FPÖ, les liens du parti avec le mouvement identitaire autrichien d'extrême droite sont désormais pleinement assumés. Et cela des deux côtés: le leader de ce parti, Martin Sellner, qui a été refoulé par la police suisse en mars dernier alors qu’il voulait participer à une réunion d’extrême droite dans le pays, appelle ouvertement à un gouvernement FPÖ. Herbert Kickl a même repris le concept des identitaires de "remigration".

Ces liens inquiètent, au vu de l'augmentation de 30% en 2023 des actes violents attribuables à l'extrémisme de droite en Autriche, selon un rapport des services de renseignement. Une tribune récemment parue dans le journal Der Standard, signée par la prix Nobel de littérature Elfriede Jelinek, appelait à s’engager haut et fort contre ce parti afin de ne pas le laisser remporter les législatives.

>> Les précisions dans l'émission Tout un monde :

Herbert Kickl, chef du parti d'extrême-droite Freiheitliche Partei Österreichs (FPÖ). [Keystone - EPA/FILIP SINGER]Keystone - EPA/FILIP SINGER
En Autriche, le parti d’extrême droite FPÖ pourrait pour la première fois remporter les élections législatives / Tout un monde / 5 min. / mardi à 08:14

Coalition avec l'ÖVP?

Toute la question est de savoir si les conservateurs de l'ÖVP au pouvoir actuellement accepteraient de gouverner avec le FPÖ d'Herbert Kickl, eux qui ont déjà gouverné deux fois avec l’extrême droite, rappelle la chercheuse Judith Götz.

"En Autriche, l'ÖVP joue un rôle important et sous-estimé dans la promotion de l'extrême droite, car il a toujours aidé le FPÖ à accéder aux responsabilités gouvernementales. C’est pourquoi il est, selon moi, tout à fait envisageable que pour rester au pouvoir, l'ÖVP fasse à nouveau une coalition avec lui."

L’actuel chancelier conservateur, Karl Nehammer, a exclu des négociations avec Herbert Kickl, justement en raison de sa radicalité, mais pas avec le FPÖ. Rien n’est certain actuellement, d’autant que d’autres majorités pourraient être possibles. Plus que le scrutin lui-même, ce sont donc les négociations d’après élection qui s’annoncent incertaines.

Sujet radio: Isaure Hiace

Adaptation web: juma

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Le FPÖ en tête des sondages

Les sondages donnent le FPÖ à 27%, contre 25% pour les conservateurs de l'ÖVP qui tombent de haut. Au pouvoir depuis 1987 dans ce pays prospère d'Europe centrale, ils avaient décroché 37% des voix en 2019, emmenés par le jeune Sebastian Kurz.

Leur chef de file Karl Nehammer a d'ailleurs lancé vendredi un appel à voter "contre la radicalité, pour la stabilité, et non le chaos".

Les sociaux-démocrates (20%) et les Verts (8%), affaiblis par leur passage au gouvernement avec l'ÖVP, sont eux loin derrière.