Plus d'un siècle après la création des JO, les femmes ont fait leur place dans le monde du sport olympique et fait mentir Pierre de Coubertin. Le père des Jeux olympiques modernes et président du Comité international olympique (CIO) jusqu'en 1925 était en effet opposé à "la participation des femmes à des concours publics", estimant qu'"aux Jeux olympiques, leur rôle devrait être surtout de couronner les vainqueurs".
Au début du XXe siècle, la pratique de certains sports par les femmes était jugée "peu féminine", notamment en raison du développement de la musculature. Elle était également vue comme un obstacle à la capacité d'avoir des enfants. Par ailleurs, de nombreux préjugés entouraient les performances féminines, considérées comme inférieures à celles de leurs collègues masculins.
"Une petite olympiade femelle à côté de la grande olympiade mâle. Où serait l'intérêt? Inintéressante, inesthétique et nous ne craignons pas d'ajouter: incorrecte", affirmait Pierre de Coubertin en 1912 dans la Revue olympique. "Telle serait à notre avis cette demi-olympiade féminine".
Un combat de longue haleine
Ainsi, les premiers Jeux de l'ère moderne, en 1896, n'ont pas été ouverts aux femmes. Quatre ans plus tard, elles peuvent toutefois participer à deux épreuves, le tennis et le golf, ainsi qu'à trois sports mixtes, la voile, le croquet et l'équitation. Cette année-là, vingt-deux femmes prennent part à ces Jeux, pour 975 hommes.
Si la porte leur a été entrouverte en 1900, ce n'est qu'en 1910 que le CIO vote officiellement l’admission des femmes aux Jeux olympiques et les autorise à participer à deux épreuves de natation et une de plongeon aux JO de Stockholm de 1912. Elles sont cette fois 48 pour 2359 hommes.
En coulisse, de nombreuses femmes se battent pour se faire une place dans la compétition, notamment la Française Alice Milliat, la pionnière de l'olympisme féminin. Présidente de la Fédération des sociétés féminines sportives de France (FSFSF), puis fondatrice de la Fédération sportive féminine internationale (FSFI), elle veut que l'athlétisme féminin soit présent aux JO de 1920 à Anvers.
Face aux refus du CIO et de Pierre de Coubertin, elle organise en 1922 les premiers Jeux olympiques féminins qu'elle sera contrainte de renommer "Jeux mondiaux féminins". Grâce à son obstination, combinée à la démission de Pierre de Coubertin en 1925, la discipline reine des JO, l'athlétisme, accueille des femmes aux Jeux d'Amsterdam en 1928.
Les réticences persistent toutefois. Le CIO prend pour prétexte la "grande fatigue" de certaines athlètes à l'arrivée du 800m pour supprimer l'épreuve, qui ne fera son retour qu'en 1960.
Paris 2024, premiers JO paritaires
La présence des femmes aux JO s'est accrue au fil des ans. Si elles ne représentaient que 2,2 % du nombre total des concurrents en 1900 et même 2% en 1912, elles étaient 9,6% à Amsterdam en 1928, 22,9% à Los Angeles en 1984, puis 47,8% à Tokyo en 2020.
En 2024, les Jeux de Paris sont les premiers à être parfaitement paritaires, présentant autant de femmes que d'hommes sur les 10'500 athlètes engagés. Cette parité est cependant globale, chaque délégation n'étant pas tenue de l'appliquer en son sein.
Par ailleurs, dans quelques sports, certaines épreuves restent exclusivement masculines, comme la lutte gréco-romaine, ou féminines, comme la gymnastique rythmique. Mais cette année, des hommes seront pour la première fois autorisés en natation synchronisée dans le cadre de l'épreuve par équipes.
Le nombre d'épreuves ouvertes aux femmes a également nettement évolué. Petit à petit, des disciplines se sont ajoutées, mais il faudra attendre les Jeux de Londres en 2012 et l'ajout de la boxe féminine pour voir les femmes autorisées dans tous les sports.
Depuis 1991, tout nouveau sport souhaitant être inclus au programme olympique doit obligatoirement comporter des épreuves féminines.
Engagement du CIO
Depuis plusieurs années, le CIO affiche sa volonté de renforcer l'égalité des genres dans le sport. En 1996, le comité modifie notamment la Charte olympique et ajoute la promotion des femmes dans le sport à ses missions.
Il est ainsi précisé au chapitre 1, règle 2.8 de la charte, que le rôle du CIO est "d’encourager et soutenir la promotion des femmes dans le sport, à tous les niveaux et dans toutes les structures (...) dans le but de mettre en œuvre le principe d’égalité entre hommes et femmes".
Par ailleurs, la part des femmes a augmenté dans les instances olympiques. On compte désormais 41% de femmes parmi les membres du CIO, mais la présidence du Comité n'a connu que des hommes.
Cet été, le calendrier entend également valoriser les épreuves féminines. Traditionnellement programmé lors du dernier jour de compétition, le marathon masculin sera couru la veille et c'est le marathon féminin qui aura cet honneur le 11 août, quelques heures avant la cérémonie de clôture.
Emilie Délétroz avec afp