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Le Premier ministre français Michel Barnier annonce un gouvernement marqué à droite

Le Premier ministre français Michel Barnier lors de la cérémonie de passation des pouvoirs au nouveau Premier ministre dans la cour de l'Hôtel de Matignon à Paris le 5 septembre 2024. [Hans Lucas via AFP - AMAURY CORNU]
Le Premier ministre français Michel Barnier lors de la cérémonie de passation des pouvoirs au nouveau Premier ministre dans la cour de l'Hôtel de Matignon à Paris le 5 septembre 2024. - [Hans Lucas via AFP - AMAURY CORNU]
Le Premier ministre français Michel Barnier a annoncé la composition de son nouveau gouvernement samedi soir, plus de deux mois après des élections législatives remportées sans majorité absolue par la coalition de gauche. Marqué à droite, l'exécutif sera en majorité composé de députés macronistes, ainsi que plusieurs membres des Républicains et un député du Mouvement démocrate.

Le secrétaire général de l'Elysée Alexis Kohler a annoncé samedi soir sur le perron de la présidence la composition du nouvel exécutif. Le premier Conseil des ministres se tiendra lundi après-midi. Michel Barnier a prévu de faire son discours de politique générale le 1er octobre.

La première tâche de son gouvernement sera de faire adopter le budget, au moment où la France est confrontée à une dette abyssale et visée par une procédure européenne pour déficit excessif.

Le Premier ministre Michel Barnier, lui-même nommé après de rocambolesques manoeuvres politiques, a consulté pendant 15 jours pour composer ce gouvernement de 39 membres, dont 19 ministres de plein exercice. Il avait transmis vendredi soir une liste de noms finalisée au président Emmanuel Macron.

>> Le point dans le 19h30 :

La France annonce son nouveau gouvernement
La France annonce son nouveau gouvernement / 19h30 / 2 min. / samedi à 19:30

Une longue attente

Trois mois et demi après la dissolution controversée de l'Assemblée nationale, quasiment onze semaines après le second tour de législatives qui ont débouché sur un pays sans majorité, et 67 jours après la démission de l'équipe de Gabriel Attal dont les ministres restaient chargés des affaires courantes, la France a donc enfin un gouvernement de plein exercice.

Le gouvernement Barnier devra réussir à s'imposer face à l'Assemblée issue des législatives anticipées, fragmentée en trois blocs irréconciliables: la gauche, arrivée première aux élections mais absente du gouvernement, le centre droit macroniste et l'extrême droite, en position d'arbitre. Or, la nouvelle équipe est déjà sous le feu des critiques.

>> Lire à ce sujet : "Aucun avenir", "bras d'honneur à la démocratie"; les réactions ulcérées au gouvernement Barnier

Un conservateur dur à l'Intérieur

La couleur de l'équipe penche nettement vers la droite, famille politique dont est issu Michel Barnier. La seule "prise" venue de la gauche est le nouveau ministre de la Justice, Didier Migaud, ancien socialiste en retrait de la politique active et inconnu du grand public.

Le chef des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau est nommé ministre de l'Intérieur. [KEYSTONE - ANDRE PAIN]
Le chef des sénateurs Les Républicains Bruno Retailleau est nommé ministre de l'Intérieur. [KEYSTONE - ANDRE PAIN]

Parmi les figures saillantes du nouveau gouvernement, le nouveau ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, fait déjà figure d'épouvantail pour la gauche et des centristes, y compris macronistes.

Figure d'une droite libérale-conservatrice inflexible, chantre de l'"ordre", l'autorité" et la "fermeté", le chef des sénateurs Les Républicains entend notamment mettre en oeuvre une politique dure sur l'immigration, sujet de préoccupation des Français qui enflamme régulièrement la classe politique.

Du côté des "macronistes", le centriste Jean-Noël Barrot a été nommé aux Affaires étrangères. Ancien ministre délégué aux Affaires européennes, ce jeune responsable de 41 ans va devoir s'imposer rapidement et se faire connaître sur une scène internationale explosive, marquée par deux conflits majeurs, en Ukraine et au Proche-Orient.

Sébastien Lecornu et Rachida Dati reconduits

Le ministre des Armées Sébastien Lecornu, fidèle du chef de l'Etat, est l'un des rares à conserver son poste et son ministère sera l'un des seuls à bénéficier d'un budget en forte hausse dans ce contexte de crises internationales.

Rachida Dati, tout juste nommée ministre, confirme sa candidature à la mairie de Paris en 2026. [AFP - LUDOVIC MARIN]
Rachida Dati, tout juste nommée ministre, confirme sa candidature à la mairie de Paris en 2026. [AFP - LUDOVIC MARIN]

Rachida Dati, figure clivante de la droite, conserve aussi son portefeuille de ministre de la Culture.

Marc Ferracci, député des Français de la Suisse et du Liechtenstein et réputé très proche du président, a lui été nommé ministre délégué chargé de l'Industrie.

Michel Barnier a préféré tenir à l'écart les potentiels candidats à la présidentielle de 2027, dont le ministre sortant de l'Intérieur Gérald Darmanin et le chef des députés LR Laurent Wauquiez.

La nouvelle équipe est strictement paritaire entre hommes et femmes, composée de 19 ministres de plein exercice, 15 ministres délégués et cinq secrétaires d'Etat.

agences/rad

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Les principaux noms du nouveau gouvernement français

Bruno Retailleau, un conservateur radical à l'Intérieur

Figure d'une droite libérale-conservatrice inflexible, Bruno Retailleau, 63 ans, prend un ministère clé avec lequel il entend bien mettre en oeuvre son triptyque favori: "ordre", "autorité" et "fermeté".

Sénateur de Vendée (ouest), terre conservatrice et catholique par excellence, Bruno Retailleau affiche des convictions très droitières, sur le mariage homosexuel, l'avortement ou la fin de vie. Concernant l'immigration, un de ses chevaux de bataille, il est partisan d'une politique dure.

"Il n'y va pas (au ministère de l'Intérieur, ndlr) pour faire une politique centriste, c'est sûr. Il va y aller franco", prévient un sénateur centriste. Ses compagnons de droite assurent cependant que l'homme "sait s'arrondir" et être "à l'écoute".

Jean-Noël Barrot, la fulgurante ascension

Le nouveau chef de la diplomatie française, 41 ans, connaît une ascension rapide, après être passé du Numérique à ministre délégué à l'Europe. Fils de l'ancien ministre et commissaire européen Jacques Barrot, il a reçu en héritage d'être "un Européen convaincu".

Si certains diplomates estiment qu'il "vit sur la réputation de son père", d'autres concèdent qu'il a su imprimer discrètement sa marque notamment au moment de la campagne des élections européennes, au printemps dernier.

Au Quai d'Orsay, il "va devoir travailler beaucoup de dossiers en un temps record", prédit un diplomate. Et "s'imposer", car "c'est un poids plume dans la jungle des relations internationales".

Rachida Dati, l'insubmersible

Très connue dans l'opinion publique en raison de son langage fleuri et ses piques mordantes, Rachida Dati, ex-protégée de l'ancien président de droite Nicolas Sarkozy, est une figure insubmersible de la scène politique française.

Le président Macron avait fait un "coup" médiatique et politique en la faisant revenir sur la scène nationale au poste de ministre de la Culture dans le gouvernement de Gabriel Attal. Elle est l'une des deux seules personnalités du précédent gouvernement à conserver son poste.

Lecornu, le soldat de Macron

Discret mais fin politique, fidèle du président, le ministre des Armées Sébastien Lecornu conserve son portefeuille auquel viennent s'ajouter les Anciens combattants, et reste un des rares à bénéficier d'un budget en forte hausse, sur fond de tensions internationales.

"Lecornu, c'est le bon soldat qui par ailleurs n'a pas trop de charisme ni d'avenir présidentiel" susceptible de faire de l'ombre à Emmanuel Macron, dont il a activement animé la campagne présidentielle de 2022, relevait en début d'année un conseiller ministériel.

Propulsé au gouvernement en 2017 à seulement 31 ans, l'homme politique issu du camp de droite est passé par l'Ecologie, les Collectivités, l'Outre-mer, avant d'hériter du portefeuille stratégique des Armées.

Anne Genetet, la surprise à l'Education nationale

La députée macroniste Anne Genetet, jusqu'ici connue pour ses travaux sur la défense et la diplomatie, a été propulsée à la tête du ministère de l'Education nationale, la sixième titulaire du portefeuille en sept ans.

Médecin puis journaliste, employée dans le privé puis députée: à 61 ans, Anne Genetet, inconnue du grand public et des enseignants, s'apprête à découvrir l'une des administrations les plus exigeantes de l'Etat.

Un duo de macronistes pour Bercy

Pour le poste le plus exposé du gouvernement, à l'heure où la France est visée par une procédure européenne pour déficit excessif, Michel Barnier a choisi un duo inconnu du grand public: Antoine Armand pour l'Economie, les Finances et l'Industrie d'un côté; Mathieu Lefèvre de l'autre pour le Budget.

Manifestations contre le gouvernement Macron-Barnier

L'appel à la mobilisation contre le "gouvernement Macron-Barnier" lancé par la gauche a peu mobilisé samedi réunissant quelque milliers de personnes de Paris à Marseille s'interrogeant sur l'utilité d'être allés voter aux législatives.

Une soixantaine de rassemblements étaient annoncés en France, selon le site de LFI, au moment où Michel Barnier, désigné Premier ministre par Emmanuel Macron, finalisait la composition de son gouvernement, plus de deux mois après des élections législatives remportées sans majorité absolue par la coalition de gauche.

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En France a eu lieu une soixantaine de manifestations à travers le pays
En France a eu lieu une soixantaine de manifestations à travers le pays / 19h30 / 16 sec. / samedi à 19:30

Mais les appels ont été peu suivis en régions: ils étaient 2200 à Marseille, selon la préfecture de police (contre 3500 lors de la précédente journée de contestation du 7 septembre), 400 à Bordeaux, quelque 200 à Angoulême et Nantes, une centaine à Strasbourg...

A Paris ils étaient 3200, selon la préfecture de police. Le 7 septembre ils étaient 26'000, selon le ministère de l'Intérieur, et 160'000 manifestants, selon LFI .

LFI avait pour ambition d'"augmenter la pression populaire" après la journée du 7 septembre, qui avait réuni dans toute la France entre 110'000 manifestants de gauche, selon les autorités, et 300'000, selon les organisateurs.

>> Lire à ce sujet : Des milliers de manifestants de gauche déçus dans les rues de France