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Le réarmement nucléaire qui avance à mesure que le monde s'enfonce dans la guerre inquiète

Le réarmement nucléaire avance à mesure que le monde s'enfonce dans la guerre, constate le Sipri. [(Korean Central News Agency/Korea News Service via AP)]
Le réarmement nucléaire avance à mesure que le monde s'enfonce dans la guerre, constate le Sipri / Le Journal horaire / 20 sec. / le 17 juin 2024
Avec l'augmentation des tensions géopolitiques dans le monde, les puissances nucléaires modernisent leurs arsenaux, ont affirmé lundi des chercheurs, exhortant les dirigeants mondiaux à "prendre du recul et réfléchir".

"Depuis la Guerre froide, les armes nucléaires n'ont jamais joué un rôle aussi important dans les relations internationales", a déclaré Wilfred Wan, le directeur du programme sur les armes de destruction massive à l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri).

Les neuf Etats dotés de l'arme nucléaire - la Russie, les Etats-Unis, la France, l'Inde, la Chine, Israël, le Royaume-Uni, le Pakistan et la Corée du Nord - ont tous modernisé leurs arsenaux nucléaires et plusieurs d'entre eux ont déployé en 2023 de nouveaux systèmes.

>> Lire aussi : Quelles seraient les conséquences (épouvantables) d'une guerre nucléaire?

12'121 ogives nucléaires dans le monde

En janvier, sur les 12'121 ogives nucléaires existantes dans le monde, environ 9585 étaient disponibles en vue d'une utilisation potentielle. Quelque 2100 d'entre elles étaient maintenues en état d'"alerte opérationnelle élevée" pour les missiles balistiques.

La quasi-totalité de ces têtes nucléaires appartiennent à la Russie et aux Etats-Unis, qui possèdent à eux seuls 90% des armes nucléaires mondiales.

Pour la première fois, le Sipri estime aussi que la Chine détient "quelques ogives en état d'alerte opérationnelle élevée" - c'est-à-dire prêtes à être utilisées immédiatement.

>> Ecouter aussi l'interview de Marc Finaud dans le 12h30 :

Marc Finaud. [RTS]RTS
Hausse des dépenses en faveur de l’armement nucléaire dans le monde: interview de Marc Finaud / Le 12h30 / 2 min. / le 17 juin 2024

"Une des périodes les plus dangereuses de l'histoire de l'humanité"

"Nous vivons actuellement l'une des périodes les plus dangereuses de l'histoire de l'humanité", a mis en garde Dan Smith, directeur du Sipri.

"Les sources d'instabilité sont nombreuses : rivalités politiques, inégalités économiques, perturbations écologiques, accélération de la course aux armements. L'abîme nous guette et il est temps pour les grandes puissances de prendre du recul et de réfléchir. De préférence ensemble".

En février 2023, la Russie a annoncé suspendre sa participation au traité New START - "le dernier traité de contrôle (...) limitant les forces nucléaires stratégiques de la Russie et des États-Unis".

Le Sipri a également noté que Moscou avait mené en mai 2024 des exercices impliquant des armes nucléaires tactiques à la frontière ukrainienne.

Même si "le nombre total d'ogives nucléaires continue de diminuer à mesure que les armes de l'ère de la guerre froide sont progressivement démantelées", une augmentation du "nombre d'ogives nucléaires opérationnelles" est observée d'année en année de la part des puissances nucléaires, a déploré le directeur du Sipri.

Il a ajouté que cette tendance allait se poursuivre et "probablement s'accélérer" dans les années à venir.

afp/fgn

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Le chef de l'AIEA veut renouer avec la Corée du Nord

Le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) Rafael Grossi a souhaité lundi dans une interview publiée par le journal russe Izvestia reprendre contact avec la Corée du Nord pour veiller à la sécurité de ses installations nucléaires.

Les experts de l'AIEA, qui se rendaient régulièrement en Corée du Nord depuis 1992, avaient été expulsés du pays en avril 2009. Le même mois, Pyongyang s'était retiré des négociations internationales entamées en 2003 sur son programme nucléaire, avant de réaliser son deuxième essai de bombe atomique le mois suivant.

"Le pays a un programme nucléaire très ambitieux qui comprend la production de combustible, le traitement de l'uranium, la régénération et les réacteurs nucléaires. Et je ne parle pas d'armes nucléaires, mais d'un très grand nombre d'installations nucléaires, les seules au monde à ne pas être surveillées", a souligné le patron de l'AIEA. "Et donc personne - ni nous à l'AIEA, ni les pays voisins, y compris la Russie et la Chine - personne ne sait si les normes minimales de sécurité sont respectées", s'est-il inquiété.

"Je commence à promouvoir l'idée d'essayer de regarder l'avenir avec un regard neuf, sans oublier qu'ils ont un programme nucléaire qui va à l'encontre des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU. Il faut parfois prêter attention à des questions pratiques qui sont également importantes", a-t-il estimé.

Rafael Grossi a aussi appelé à ne pas répéter, dans le dossier du nucléaire iranien, les mêmes erreurs qu'avec la Corée du Nord.

Près de 3000 dollars par seconde pour les armes nucléaires

Les neuf Etats dotés de l'arme nucléaire ont dépensé près de 3000 dollars par seconde l'année dernière pour leurs stocks. Le total atteint 91,4 milliards (plus de 81,8 milliards de francs), soit 10,8 milliards en plus sur un an, a annoncé lundi l'ONG ICAN à Genève.

A eux seuls, les Etats-Unis ont investi plus de la moitié de ce financement, avec 51,5 milliards. Avec les Britanniques, ils ont augmenté le plus leurs fonds injectés dans cet armement, précise un rapport de la Campagne internationale pour l'élimination de l'arme nucléaire, prix Nobel de la paix.

400 milliards en cinq ans

La progression du chiffre total s'est elle établie à plus de 13% sur un an. Après les Etats-Unis, la Chine arrive au deuxième rang avec un peu plus de 11 milliards de dollars. Elle devance la Russie.

"Cet argent est dans les faits perdu", a affirmé aux correspondants accrédités à l'ONU à Genève (ACANU) une responsable de l'organisation. Il aurait pu alimenter plus de 12 millions de ménages en énergies renouvelables ou diminuer de plus d'un quart le manque de financement de la lutte contre le changement climatique et la perte de biodiversité.

Depuis cinq ans, les neuf Etats nucléaires ont investi près de 400 milliards de dollars. L'augmentation a atteint plus d'un tiers et même près de 60% au Pakistan.