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Les "prédateurs de la liberté" mettent en danger le journalisme libre, juge le nouveau directeur de RSF

Le journalisme indépendant est-il en danger? Interview de Thibaut Bruttin
Le journalisme indépendant est-il en danger? Interview de Thibaut Bruttin / La Matinale / 6 min. / le 12 juillet 2024
Le contexte géopolitique mondial et les "prédateurs de la liberté" mettent en péril la sécurité des journalistes et la souveraineté technologique, et donc le journalisme libre, dénonce Thibaut Bruttin, nouveau directeur général de Reporters sans frontières (RSF) vendredi dans La Matinale.

Le journalisme libre "est en danger à cause de plusieurs faisceaux de violence", avertit Thibaut Bruttin au micro de la RTS. "Tout d'abord, il y a la sécurité des journalistes. Mais aussi la perte de souveraineté technologique, un cadre légal parfois qui est menaçant et un climat de défiance à l'égard des journalistes. Ceci est particulièrement préoccupant dans bien des pays du monde." D'où l'importance de RSF de "défendre le journalisme libre".

Beaucoup de gens dans de nombreux pays du monde ne souhaitent pas qu'une information fiable circule et font tout ce qu'ils peuvent pour décrédibiliser la parole des journalistes et porter atteinte à leur intégrité

Thibaut Bruttin, nouveau directeur général de Reporters sans frontières

Le combat pour le journalisme libre est "un combat partagé", se réjouit toutefois Thibaut Bruttin, "y compris dans les pays les plus répressifs", note-t-il.

"Prédateurs de la liberté"

Celui qui a récemment été élu à la tête de l'organisation journalistique accuse aussi les "prédateurs de la liberté". "Cette expression désigne tous ceux, qui qu'ils soient, qui cherchent à faire taire les journalistes", explique-t-il. Et de citer les forces politiques, les militaires et les groupes terroristes ou criminels.

"Beaucoup de gens dans de nombreux pays du monde ne souhaitent pas qu'une information fiable circule et font tout ce qu'ils peuvent pour décrédibiliser la parole des journalistes et porter atteinte à leur intégrité, parfois physique", souligne Thibaut Bruttin.

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L'exemple de Gaza

Un exemple pertinent qui démontre la mise en danger du journalisme libre est la situation à Gaza que connaissent les journalistes. Il s'agit d'une "situation sans précédent", relève le directeur de RSF. "On n'a jamais vu un territoire rester aussi longtemps fermé à la fois aux journalistes palestiniens qui voudraient en sortir et à la fois aux journalistes internationaux qui voudraient y rentrer pour prendre la nécessaire relève de leurs confrères qui prennent des risques, parfois complètement insensés pour nous informer."

>> Pour suivre la situation à Gaza en direct, lire : Une soixantaine de corps découverts dans un quartier de Gaza après une opération israélienne

Il y a toujours des moyens d'action. Même dans les cas les plus désespérés

Thibaut Bruttin, nouveau directeur général de Reporters sans frontières

Là-bas, RSF a donc plusieurs modes d'actions: "Nous continuons à agir auprès des institutions internationales et des chancelleries pour faire évoluer la situation d'un point de vue diplomatique. Nous, avec certains gouvernements, avons aussi procédé à l'exfiltration de journalistes."

Et, malgré la situation "très difficile", que reconnaît Thibaut Bruttin, il reste confiant. "Il y a toujours des moyens d'action. Même dans les cas les plus désespérés", assure-t-il en donnant l'exemple de l'affaire Assange. Le fondateur de WikiLeaks Julian Assange a en effet "enfin" été libéré, cite un article de RSF.

>> Lire : Julian Assange, le fondateur de WikiLeaks, est officiellement libre

Lutter contre l'apparition de médias d'opinions uniquement

Un autre risque pour le journalisme libre est la "transformation des médias historiques en médias d'opinion par les hommes d'affaires, presque qualifiables d'oligarques", s'inquiète le Franco-Suisse. "Bien sûr que cela pose problème!"

Il faut absolument combattre la transformation des médias historiques en médias d'opinions par les hommes d'affaires. Sinon, nous vivrons dans des pays où les réalités factuelles ne seront même plus partagées et où les citoyens n'auront même plus de bases communes pour discuter

Thibaut Bruttin, nouveau directeur général de Reporters sans frontières

En effet, une partie de la presse, y compris dans les démocraties occidentales, devient de plus en plus partisane, orientée idéologiquement et propriété de milliardaires, à l'image de Fox News aux Etats-Unis (propriété de Rupert Murdoch) ou CNews en France (Vincent Bolloré) par exemple.

>> Sur le sujet, lire aussi : En France, la lutte s'organise contre les appétits médiatiques du milliardaire Vincent Bolloré

"Ça ne doit pas être une vérité générale. Il faut absolument combattre cela. Sinon, nous vivrons dans des pays où les réalités factuelles ne seront même plus partagées et où les citoyens n'auront même plus de bases communes pour discuter", conclut-il.

Propos recueillis par Aleksandra Planinic

Article web: Julie Marty

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