Neuf morts et près de 3000 blessés au Liban dans l'explosion de bipeurs de membres du Hezbollah
Les explosions de ces systèmes de radiomessagerie sont essentiellement survenues dans plusieurs places fortes du Hezbollah, soutenu par l'Iran, quelques heures après l'annonce par Israël qu'il étendait les objectifs de guerre à sa frontière nord avec le Liban.
Les déflagrations ont provoqué la mort d'au moins trois enfants et de six autres personnes, selon le ministère de la Santé libanais. Les fils de deux députés du Hezbollah et une fillette de dix ans figurent parmi les victimes.
Israël "entièrement responsable"
L'ambassadeur de l'Iran à Beyrouth a aussi été touché, mais selon la télévision d'Etat iranienne, le diplomate serait conscient et hors de danger. Quatorze membres du Hezbollah ont aussi été blessés en Syrie.
D'abord prudent, le Hezbollah a ensuite affirmé qu'Israël était "entièrement responsable" de ces explosions. Dans un communiqué, le mouvement a assuré qu'Israël allait "recevoir son juste châtiment" à la suite de "cette agression criminelle". Le Hamas palestinien, de son côté, a dénoncé une "agression terroriste sioniste".
Selon des experts ainsi que le New York Times, Israël est bel et bien à l'origine de ces attentats meurtriers. D'après le journal, qui cite des responsables américains et d'autres nationalités sous couvert d'anonymat, les services secrets israéliens seraient parvenu à cacher des petits explosifs dans des bipeurs récemment achetés par le Hezbollah à Taïwan, soit plus de 3000 appareils, et les a déclenchés à distance [lire encadré]. L'armée israélienne n'a pas commenté dans l'immédiat ces informations.
Des blessés qui affluent dans les hôpitaux
Des dizaines d'ambulances ont transporté les blessés vers les hôpitaux, notamment l'hôpital privé américain de Beyrouth, l'un des plus importants de la capitale. Des vidéos montrant des blessés allongés en pleine rue au milieu des embouteillage ou à même le sol dans un hôpital ont été diffusées dans les médias.
Selon le ministre de la Santé, la plupart des victimes ont été blessées "au visage, à la main, au ventre et même aux yeux".
Le ministère a aussi demandé "à tous les professionnels de la santé de se rendre immédiatement sur leur lieu de travail afin de contribuer aux soins d'urgence pour le grand nombre de blessés" et lancé un "appel à la coordination avec la Croix-Rouge libanaise pour organiser des dons de sang".
Le ministre de l'Education libanais a annoncé la fermeture mercredi des écoles et des universités pour condamner "cet acte criminel commis par l'ennemi israélien".
Pour remplacer les téléphones portables
Le Hezbollah avait demandé à ses membres de ne plus utiliser les téléphones portables pour éviter les piratages israéliens. Le puissant parti a mis en place un système de bipeurs par lequel ses membres sont appelés à rejoindre leurs unités [lire encadré].
Washington, de son côté, a affirmé n'être au courant de rien concernant ces explosions. "Je peux vous dire que les Etats-Unis n'ont pas été impliqués là-dedans, qu'ils n'étaient pas au courant de cet incident à l'avance. A ce stade, nous collectons de l'information", a déclaré à la presse le porte-parole du Département d'Etat. Il a refusé de s'exprimer sur l'attribution de cette attaque.
ther/boi avec afp
Une cargaison de bipeurs piégés venus de Taïwan
Rapidement après les faits, une source proche du Hezbollah a indiqué que "les bipeurs qui ont explosé concernent une cargaison récemment importée par le Hezbollah de 1000 appareils", commandés à une entreprise de Taïwan et qui semblent avoir été "piratés à la source".
D'autres experts ont confirmé qu'un explosif "de type plastic" avait sans doute été dissimulé dans l'appareil, laissant effectivement penser que le Mossad, le service secret extérieur israélien, a infiltré la chaîne d'approvisionnement pour réaliser cette attaque, planifiée plusieurs mois en amont.
Interceptés avant la livraison
Selon un article du New York Times, les petits appareils auraient été interceptés par les services israéliens avant leur arrivée au Liban. Il s'agirait de bipeurs de la marque Gold Apollo, mais fabriqués sous licence par une entreprise européenne, a précisé l'entreprise taïwanaise mercredi. Quelques dizaines de grammes de matériel explosif ont été insérés à côté de la batterie avec un déclencheur, précise le quotidien.
A 15h30 mardi au Liban, un message apparaissant comme venant de la direction du Hezbollah a fait biper l'appareil pendant plusieurs secondes avant de déclencher l'explosif, selon le quotidien américain, citant toujours plusieurs sources anonymes.
De 1000 à 5000 exemplaires de bipeurs selon les sources, essentiellement du modèle AP924, avaient été commandés par le Hezbollah à l'entreprise taïwanaise.
Le bipeur, un ancêtre du téléphone mobile réputé pour sa fiabilité
La prolifération des portables a quasiment provoqué leur extinction mais les bipeurs ou "pagers" continuent d'être employés pour communiquer dans certains secteurs, notamment les hôpitaux, en raison de leur fiabilité.
Ces petits boîtiers permettent de recevoir des messages, alertes sonores ou numéros de téléphone en utilisant leur propre fréquence radio et donc sans passer par les réseaux de téléphonie mobile, qui peuvent connaître interruptions, problèmes de connections ou interception des communications. C'est d'ailleurs un des arguments de vente des entreprises qui en fabriquent encore.