Modifié

Plus d'une centaine d'arrestations après de nouvelles manifestations anti-gouvernementales en Géorgie

En Géorgie, de violents affrontements ont opposé la police à des manifestants samedi soir
En Géorgie, de violents affrontements ont opposé la police à des manifestants samedi soir / 12h45 / 2 min. / le 1 décembre 2024
Plus d'une centaine de personnes ont été arrêtées en Géorgie vendredi, au deuxième jour des manifestations déclenchées par la décision du gouvernement de reporter les discussions sur l'adhésion à l'Union européenne. De nouvelles protestations ont eu lieu samedi soir.

Cette ancienne république soviétique du Caucase est dans la tourmente depuis les législatives du 26 octobre remportées par le parti au pouvoir Rêve géorgien, accusé de dérive autoritaire prorusse. Ce scrutin est dénoncé comme entaché d'irrégularités par l'opposition pro-européenne qui boycotte le nouveau Parlement.

Des manifestations nocturnes ont rassemblé plusieurs milliers de personnes jeudi et vendredi soir à Tbilissi pour protester contre la décision des autorités de reporter les discussions d'adhésion du pays à l'UE à 2028. Ces deux rassemblements ont été dispersés par la force par la police.

Des milliers de manifestants pro-européens sont à nouveau descendus samedi dans les rues de Tbilissi.

Quelque 150 arrestations en deux jours

Selon le ministère de l'Intérieur, 107 personnes ont été interpellées vendredi pour "désobéissance à la police" et "vandalisme" et 10 policiers ont été blessés. La veille, 43 manifestants avaient été arrêtés et 32 policiers blessés, selon la même source.

Durant la manifestation de vendredi soir, la police anti-émeute a de nouveau utilisé gaz lacrymogène et canons à eau contre les manifestants, qui de leur côté jetaient des oeufs et lançaient des fusées d'artifice.

Le Premier ministre Irakli Kobakhidzé a remercié samedi les forces de l'ordre, qui ont selon lui "défendu hier l'ordre constitutionnel de la Géorgie et sauvegardé la souveraineté et l'indépendance de la nation".

Des partisans de l'opposition géorgienne brandissent des drapeaux de l'UE et de la Géorgie lors d'une manifestation devant le bâtiment du Parlement à Tbilissi, en Géorgie, le 30 novembre 2024. [KEYSTONE - DAVID MDZINARISHVILI]
Des partisans de l'opposition géorgienne brandissent des drapeaux de l'UE et de la Géorgie lors d'une manifestation devant le bâtiment du Parlement à Tbilissi, en Géorgie, le 30 novembre 2024. [KEYSTONE - DAVID MDZINARISHVILI]

Des manifestations ont également eu lieu dans plusieurs autres villes de Géorgie. Au moins huit manifestants ont été arrêtés dans la deuxième ville de Géorgie, Batoumi, selon les médias locaux.

Mobilisation au-delà de la rue

Le mouvement a commencé à s'étendre au-delà de la rue. Des centaines de fonctionnaires, notamment des ministères des Affaires étrangères, de la Défense et de l'Éducation, ainsi que des juges ont publié des déclarations communes en signe de protestation.

Quelque 160 diplomates géorgiens ont critiqué la décision du gouvernement de reporter le processus d'intégration européenne, estimant qu'elle était contraire à la Constitution et conduisait "à l'isolement international" du pays.

Plus d'une centaine d'écoles et d'universités ont suspendu leurs activités en signe de protestation.

"Chantage" de Bruxelles

Malgré sa décision, le gouvernement assure vouloir poursuivre les réformes et avoir toujours l'intention de rejoindre l'UE en 2030. Le Premier ministre Irakli Kobakhidzé a dénoncé un "chantage" de Bruxelles, alors que le Parlement européen a réclamé de nouvelles élections législatives.

La Géorgie a obtenu officiellement le statut de candidat à l'adhésion à l'UE en décembre 2023, mais Bruxelles a depuis gelé le processus, accusant l'exécutif d'opérer un grave recul démocratique.

La présidente géorgienne Salomé Zourabichvili, en rupture avec le gouvernement mais qui ne dispose que de pouvoirs limités, a soutenu les manifestants et participé au rassemblement de jeudi. Elle a estimé vendred soir que "le mouvement de résistance a commencé".

"Nous resterons unis jusqu'à ce que la Géorgie atteigne ses objectifs: revenir sur la voie européenne et obtenir de nouvelles élections", a déclaré cette ex-diplomate française qui refuse de reconnaître la légitimité du Parlement issu des législatives d'octobre.

cab avec afp

Publié Modifié

Répression condamnée

Le Conseil de l'Europe a condamné la "répression brutale des manifestations", en s'alarmant de la décision du gouvernement de suspendre ses négociations avec l'UE. Amnesty Inernational a dénoncé une volonté de "supprimer toute dissidence".

L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a dénoncé "l'usage disproportionné et indiscriminé de la force" par la police, ce qui constitue selon elle "une grave violation à la liberté de réunion".

Kaja Kallas juge "inacceptable" la violence contre les manifestants

La nouvelle cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas a jugé dimanche "inacceptable" la dispersion par la force par la police en Géorgie des manifestations pro-UE, qui ont eu lieu pour la troisième nuit consécutive.

Lors d'une visite à Kiev, en Ukraine, elle a ajouté que la situation en cours en Géorgie avait "clairement des conséquences" sur les relations avec l'UE.

Kaja Kallas, qui a pris ses fonctions ce dimanche, a affirmé que des "options" avaient été proposées aux 27 Etats membres de l'UE quant à la manière de réagir, y compris via l'imposition de sanctions.

"Nous avons différentes options. Mais bien sûr, nous devons parvenir à un accord", a-t-elle indiqué.