Entré au Front national en 1990 et maire de Perpignan (sud-ouest) depuis 2020, Louis Aliot occupe une place importante au sein du Rassemblement national (RN), large vainqueur des élections européennes et donné légèrement en tête des sondages en vue des élections législatives françaises anticipées à la fin du mois.
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Candidat malheureux à la présidence du parti en 2022, l'ex-compagnon de Marine Le Pen a été, à ses côtés, un acteur majeur du regain de respectabilité du parti d'extrême droite dans les médias, en purgeant sa frange la plus ouvertement radicale. "On a exclu tous ceux qui considéraient que la politique était affaire de folklore et qui venaient défendre chez nous des thèses aux antipodes de ce que de ce que l'on pensait", explique-t-il lundi dans La Matinale de la RTS.
Aujourd'hui, le RN n'est plus xénophobe ni antisémite
"Aujourd'hui, le RN n'est plus xénophobe ni antisémite", affirme-t-il ainsi, citant notamment le soutien de l'historien juif Serge Klarsfeld, qui a estimé sur la chaîne israélienne I24 News que le RN était "devenu un parti fréquentable" et un "parti pro-juifs" en raison de son soutien inconditionnel à l'actuel gouvernement israélien. Il a annoncé qu'il voterait Rassemblement national en cas de duel avec la gauche. "C'est un basculement majeur", commente Louis Aliot.
Baisse de la TVA et impôt sur la fortune financière
Depuis plusieurs années, le RN a lissé son image en adoptant une rhétorique axée sur le pouvoir d'achat en plus de l'immigration et l'insécurité. Il s'oppose ainsi aux taxes environnementales, prône une baisse de la TVA, souhaite s'attaquer aux prix de l'énergie et affirme vouloir remplacer l'impôt sur la fortune immobilière par un impôt sur la fortune financière.
Côté salaires, le RN propose aussi d'inciter à les augmenter par des exonérations, dans une certaine mesure, de cotisations patronales. Le parti s'était aussi opposé à la réforme des retraites en 2023, mais reste flou dans son programme sur ses intentions à ce sujet, considéré comme "pas prioritaire". Il s'oppose aussi à la réforme de l'assurance-chômage voulue par Emmanuel Macron.
>> Plus de détail dans ce comparatif des programmes électoraux dressé par le journal Le Monde.
Le RN veut accéder aux responsabilités "en raison de la situation que vivent nos compatriotes, notamment les difficultés en termes de qualité de vie, de prospérité économique et sociale, mais aussi par rapport à un climat insécuritaire qui (...) n'est endigué par aucune politique depuis une vingtaine d'années, qu'elle ait été de droite ou de gauche", lance Louis Aliot.
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L'immigration toujours ciblée
Selon le politicien, le programme de son parti est "finançable, parce qu'il y a des économies à faire qui sortent systématiquement dans tout un tas de rapports d'organismes sérieux, comme la Cour des comptes, dans la fraude sociale, la fraude fiscale ou l'immigration".
Il cite notamment "l'aide médicale d'Etat", qui permet à tout un chacun de se faire soigner gratuitement en cas de besoin. "Que l'on soigne les urgences, je veux bien, mais qu'on vienne en France pour se faire soigner aux frais du contribuable, c'est quand même beaucoup moins intéressant pour les finances publiques", dit-il.
Jordan Bardella aura l'occasion cette semaine de dérouler le programme économique des deux années à venir qui, je pense, permettra de rassurer tout le monde sur notre volonté de gérer les affaires du pays
"On imagine des mesures sociales immédiates pour ce mandat de cohabitation de deux ans avant l'élection présidentielle", poursuit-il. "C'est-à-dire faire baisser le prix du carburant à la pompe, faire baisser le prix des produits de première nécessité. Parce que tout le monde parle des marchés, mais personne ne parle de nos compatriotes qui n'arrivent pas à boucler les fins de mois. Nous, on s'adresse à ces gens-là (...) en attendant de pouvoir mener une réelle politique économique qui permette à la France de redécoller."
"Il va falloir rassurer, c'est ce que nos experts sont en train de mettre sur le papier. Et Jordan Bardella aura l'occasion, cette semaine, de dérouler ce programme économique immédiat des deux années à venir qui, je pense, permettra à tout le monde de pouvoir se rassurer sur notre volonté de gérer les affaires du pays", annonce encore Louis Aliot.
L'exemple des alliés idéologiques européens
"Rassurer", le RN l'a également fait en abandonnant, après l'élection présidentielle de 2017, son discours sur le "Frexit", soit la sortie de la France de l'Union européenne. Il s'appuie notamment sur des alliés européens, comme l'Italie de Giorgia Meloni ou la Hongrie de Viktor Orban, qui veulent "remettre au cœur de l'UE ce que voulait finalement le général de Gaulle: une Europe des peuples et des Etats, c'est-à-dire mettre en commun tout ce qui est dans l'intérêt de nos nations, mais dans le respect de nos identités et de nos souverainetés".
"En Italie, la coalition, disons de droite nationale au sens large, gère non seulement les affaires italiennes, mais parle aussi d'égal à égal avec les institutions européennes. On fera pareil, on ira discuter, on ira négocier et on dira à l'Europe ce que nous voulons dans un certain nombre de domaines, comme la tarification de l'énergie", ajoute-t-il.
Propos recueillis par Pietro Bugnon