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Qui est Abou Mohammad al-Jolani, le leader des rebelles syriens?

Le leader de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), ex-branche d'al-Qaïda en Syrie, Abou Mohammad al-Jolani. [AFP - OMAR HAJ KADOUR]
Le leader de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), ex-branche d'al-Qaïda en Syrie, Abou Mohammad al-Jolani. - [AFP - OMAR HAJ KADOUR]
Abou Mohammad al-Jolani est le chef islamiste de la coalition rebelle à l'origine de la chute dimanche du président syrien Bachar al-Assad. Issue d'une famille cossue de Damas, il s'est rapidement tourné vers la mouvance djihadiste à partir des années 2000.

Le leader de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), ex-branche d'al-Qaïda en Syrie, s'était fixé comme objectif de renverser le président Assad, au pouvoir depuis 2000. Abou Mohammad al-Jolani a abandonné progressivement le turban des djihadistes dont il se coiffait au début de la guerre en 2011 pour un uniforme militaire et parfois pour un costume civil.

Abou Mohammad al-Jolani, ici en habits civils, lors d'une visite en 2023 dans un village sinistré de la région d'Idleb, après le tremblement de terre qui a notamment touché la Turquie et la Syrie. [AFP - OMAR HAJ KADOUR]
Abou Mohammad al-Jolani, ici en habits civils, lors d'une visite en 2023 dans un village sinistré de la région d'Idleb, après le tremblement de terre qui a notamment touché la Turquie et la Syrie. [AFP - OMAR HAJ KADOUR]

Depuis la rupture avec al-Qaïda en 2016, il tente de lisser son image et de présenter un visage plus modéré, sans trop convaincre les analystes ou encore les chancelleries occidentales qui classent HTS comme un groupe terroriste. Il est passé d'un vocabulaire fondamentaliste à une parole qui se veut modérée pour parvenir à ses fins.

"C'est un radical pragmatique", déclare à l'AFP Thomas Pierret, un spécialiste de l'islamisme en Syrie. "En 2014, il a été au sommet de sa radicalité pour s'imposer face à la frange radicale de la rébellion et de l'organisation (djihadiste) Etat islamique, pour ensuite modérer ses propos", explique ce chercheur au CNRS.

>> Notre suivi de la situation en Syrie : Les rebelles proclament "Damas libre de la tyrannie", le président Bachar al-Assad aurait fui la Syrie

Contacts avec le djihadisme dès 2001

Né en 1982, Ahmed al-Chareh, vrai nom de Jolani, a grandi à Mazzé, un quartier cossu de Damas, dans une famille aisée. A l'époque, il a même commencé des études de médecine. Dans la foulée de l'offensive rebelle lancée le 27 novembre, Abou Mohammad al-Jolani a commencé à signer de son vrai nom.

En 2021, il a expliqué dans une interview à la chaîne publique américaine PBS, que son nom de guerre, Abou Mohammad al-Jolani, était une référence à ses origines familiales dans les hauteurs du Golan (al-Jolan en arabe). Selon lui, son grand-père a été déplacé du Golan après la conquête en 1967 par Israël d'une grande partie de ce plateau syrien.

Une image extraite de la première vidéo, diffusée le 28 juillet 2016, dans laquelle Abou Mohammad al-Jolani dévoile publiquement son visage. [AFP - HO]
Une image extraite de la première vidéo, diffusée le 28 juillet 2016, dans laquelle Abou Mohammad al-Jolani dévoile publiquement son visage. [AFP - HO]

D'après le site Middle East Eye, c'est après les attentats du 11-septembre que "les premiers signes de djihadisme commencèrent à apparaître dans la vie de Jolani, lequel commença à assister à des sermons et des tables rondes secrètes dans les banlieues marginalisées de Damas".

Après l'invasion américaine de l'Irak en 2003, il part combattre dans ce pays voisin de la Syrie, où il rejoint le groupe al-Qaïda en Irak d'Abou Moussab al-Zarqawi avant d'être emprisonné durant cinq ans.

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Retour en Syrie en 2011

Après le début de la révolte contre Bachar al-Assad en 2011, il rejoint son pays natal pour y fonder le Front al-Nosra, qui deviendra HTS. En 2013, il refuse d'être adoubé par Abou Bakr al-Baghdadi, futur chef de l'EI, et lui préfère l'émir d'al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri.

Réaliste selon ses partisans, opportuniste selon ses adversaires, il affirme en 2015 ne pas avoir l'intention de lancer des attaques contre l'Occident, contrairement à l'EI.

Abu Mohamed al-Jolani s'exprime lors d'une conférence de presse dans la zone du passage de Bab al-Hawa dans le nord de la Syrie, le 12 mars 2024. [AFP - OMAR HAJ KADOUR]
Abu Mohamed al-Jolani s'exprime lors d'une conférence de presse dans la zone du passage de Bab al-Hawa dans le nord de la Syrie, le 12 mars 2024. [AFP - OMAR HAJ KADOUR]

Lorsqu'il rompt avec al-Qaïda, il dit le faire pour "ôter les prétextes avancés par la communauté internationale" d'attaquer son organisation.

Depuis, il poursuit "sur une ligne de crête son chemin d'homme d'Etat en devenir", dit Thomas Pierret.

Main de fer dans un gant de velours

Optant pour la main de fer dans un gant de velours, il impose en janvier 2017 aux rebelles radicaux du nord de la Syrie une fusion au sein de HTS. Il met en place une administration civile et multiplie les gestes envers les chrétiens dans la province d'Idleb (nord-ouest) que son groupe contrôle depuis deux ans.

C'est là où HTS a été accusé par des habitants, des proches de détenus et des défenseurs des droits humains, d'exactions qui s'apparentent selon l'ONU à des crimes de guerre, provoquant des manifestations il y a quelques mois.

Plus Jolani apparaîtra comme un acteur responsable plutôt que comme un extrémiste djihadiste toxique, et plus sa tâche sera facile

Aron Lund, chercheur à l’Agence suédoise de recherche sur la défense

Après l'offensive, Abou Mohammad al-Jolani a cherché à rassurer les habitants d'Alep, ville qui compte une importante communauté chrétienne. Et il a appelé ses combattants à préserver "la sécurité dans les régions libérées".

"Je pense que c'est avant tout une question de bonne politique. Moins les Syriens et la communauté internationale auront peur, plus Jolani apparaîtra comme un acteur responsable plutôt que comme un extrémiste djihadiste toxique, et plus sa tâche sera facile", assure le chercheur Aron Lund.

"Est-ce totalement sincère? Certainement pas. Ce type vient d'une tradition fondamentaliste religieuse très dure. Mais ce qu'il fait, c'est la chose intelligente à dire et à faire en ce moment", conclut Aron Lund.

jfe avec ats

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