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Sabotage, origine naturelle ou humaine non malveillante: les causes possibles du sectionnement des câbles en mer Baltique

Camille Morel, autrice du livre "Les câbles sous-marins. Enjeux et perspectives au XXIe siècle". [Linkedin - Camille Morel]
Rupture de câbles sous-marins: une forme de "guerre hybride"? Interview de Camille Morel / Tout un monde / 6 min. / le 20 novembre 2024
Le sectionnement en 48 heures de deux câbles sous-marins en mer Baltique ravive les soupçons de sabotage par la Russie dans le cadre d'une "guerre hybride". Camille Morel, chercheuse, qui n'en a "aucune certitude", insiste sur la possibilité d'une d'origine "naturelle" ou "humaine non malveillante".

Le "C-Lion1", câble sous-marin de 1172 kilomètres reliant Helsinki (Finlande) à Rostock (Allemagne) a été rompu lundi, selon son opérateur, le groupe technologique finlandais Cinia. Dimanche matin, un autre câble de télécommunication, le "Arelion", reliant l'île suédoise de Gotland à la Lituanie, avait aussi été endommagé, poussant les Européens à soupçonner la Russie.

Ils l'accusent de mener "une guerre hybride", dans le contexte de l'offensive de Moscou en Ukraine, soutenue financièrement et militairement par l'UE. Le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a affirmé mardi qu'un "sabotage" était certainement à l'origine des dégâts.

Enquête en cours

Les quatre pays concernés par les incidents (Finlande, Suède, Allemagne et Lituanie) ont ouvert une enquête et les forces de défense danoises ont annoncé mercredi suivre un bateau chinois, le Yi Peng 3. "Nous sommes présents dans la zone proche du navire chinois Yi Peng 3", a écrit à l'AFP la Défense danoise, précisant qu'elle ne ferait aucun autre commentaire dans l'immédiat.

Le vraquier, construit en 2001, était proche de la zone où le câble "C-Lion1", reliant la Finlande à l'Allemagne, a été endommagé lundi, sans toutefois qu'aucun élément ne l'incrimine directement pour le moment, selon le site spécialisé Marinetraffic.

Le conflit en Ukraine laisse toujours planer cette question de 'qui est à l'origine de la coupure?' (...) Mais ces coupures peuvent être liées à des causes naturelles (...) ou être d'origine humaine non malveillante

Camille Morel, chercheuse associée à l’IESD

"Aucune certitude"

Mais Camille Morel, chercheuse associée à l’IESD (l’Institut d’Etude stratégique et de défense) assure mercredi dans Tout Un Monde qu'il n'y a "vraiment aucune certitude", tant que l'enquête diligentée n'a pas donné sa réponse. Elle conçoit toutefois que l'on puisse "tout à fait imaginer plein de causes différentes".

Pour elle, l'hybridation de la guerre signifie que l'on n'est "pas dans des formes traditionnelles de conflit ouvert", mais qu'il y a la volonté d'"agir sur les infrastructures de manière à perturber, peut-être temporairement ou localement, un certain nombre d'activités d'économie, pour ensuite passer à l'étape d'après avec des conflits plus ouverts ou des actions plus directes sur les pays".

Accusations exacerbées "par le conflit en Ukraine"

La guerre entre la Russie et l'Ukraine n'améliore en rien ces inquiétudes, ajoute-t-elle. "Tout est possible. Surtout dans un contexte de tensions croissantes entre notamment la Russie et les pays de la Baltique (...) Le conflit en Ukraine laisse toujours planer cette question de 'qui est à l'origine de la coupure?'."

>> Suivre la guerre entre la Russie et l'Ukraine en direct : L'ambassade américaine à Kiev met en garde contre une "possible attaque aérienne significative"

Camille Morel rappelle cependant qu'il y a un historique de ce type de coupures et que les "causes naturelles", comme les "séismes sous-marins" existent. Ça peut aussi "ne pas être malveillant, mais d'origine humaine", ajoute-t-elle en citant par exemple "les accidents avec des chaluts de pêche ou des ancres de navires".

On est loin d'un black out à chaque fois puisqu'il faudrait la coupure de plusieurs câbles simultanés pour que l'on soit vraiment en capacité d'isoler un pays ou un territoire du reste du globe

Camille Morel, chercheuse associée à l’IESD

"Pas de risque de black out"

Les conséquences de l'endommagement d'un câble sont limitées, note la chercheuse. Il "provoque la perte de trafic sur ce câble. Et ça se limite à cela puisque dans des pays comme l'Allemagne ou la Finlande, les communications peuvent être transférées par d'autres voies que sont soit d'autres câbles sous-marins, soit des câbles terrestres ou des satellites."

Il est en revanche "difficile de chiffrer l'impact financier", souligne-t-elle.

"Ce qui est sûr, c'est qu'on est loin d'un black out à chaque fois puisqu'il faudrait la coupure de plusieurs câbles simultanés pour que l'on soit vraiment en capacité d'isoler un pays ou un territoire du reste du globe", rassure Camille Morel. Les territoires "reliés par un ou deux câbles" pourraient, eux, être plus facilement coupés du monde, poursuit-elle. Dans ce cas, les "pertes sociales et économiques" seraient "importantes": il serait alors "impossible d'aller sur les réseaux sociaux, consulter ou envoyer des mails, ou même faire des retraits bancaires".

L'Europe est plus à l'abri, détaille-t-elle. "Vous n'aurez pas cette perturbation totale des populations" grâce à, selon elle, "une connectivité largement suffisante". "Le système peut continuer à fonctionner", assure-t-elle.

Propos recueillis par Patrick Chaboudez

Article web: Julie Marty

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Le Kremlin juge cette accusation "absurde"

Le Kremlin a jugé mercredi "risible" et "absurde" les accusations portées envers la Russie.

"C'est risible étant donné l'absence de réaction face aux activités de sabotage de l'Ukraine dans la mer Baltique", a raillé le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, faisant référence au sabotage des gazoducs Nord Stream en septembre 2022 pour lequel Moscou a accusé Kiev.

L'Ukraine a toujours nié sa participation, mais la justice allemande a émis un mandat d'arrêt européen contre un moniteur de plongée ukrainien, soupçonné d'être impliqué dans le sabotage. L'implication de l'Etat ukrainien n'a, lui, pas été confirmée à ce stade par les multiples enquêtes en cours.

Au sujet des deux câbles de télécommunications abîmés en mer Baltique, Dmitri Peskov a affirmé mercredi que "c'est assez absurde de continuer à accuser la Russie de tout, sans aucun fondement".