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Sous pression, la Première ministre du Bangladesh démissionne et fuit la capitale

Sous la pression de nouvelles manifestations, la Première ministre du Bangladesh Sheikh Hasina a démissionné.
Sous la pression de nouvelles manifestations, la Première ministre du Bangladesh Sheikh Hasina a démissionné. / 19h30 / 1 min. / le 5 août 2024
La Première ministre du Bangladesh Sheikh Hasina a démissionné, selon le chef de l'armée. Sous la pression de nouvelles manifestations, qui ont fait au moins 56 morts lundi, la dirigeante a fui la capitale Dacca. Le général Waker-Uz-Zaman déclare qu'il va "former un gouvernement intérimaire".

Des milliers de manifestants antigouvernementaux ont pris d'assaut le palais de la Première ministre du Bangladesh lundi dans la capitale Dacca. Sur des images diffusées par la chaîne bangladaise Channel 24, on voit une foule de personnes en train de rentrer dans la résidence de Sheikh Hasina.

Au moins 56 personnes sont mortes lundi à Dacca, selon des informations de la police et des hôpitaux. Des témoins et d'autres policiers ont rapporté des affrontements entre groupes rivaux.

Le chef de l'armée du Bangladesh, le général Waker-Uz-Zaman, a déclaré, lors d'une adresse à la nation diffusée par la télévision d'Etat, qu'il allait former un gouvernement intérimaire.

Il a également affirmé être déjà entré en contact avec les principaux partis d'opposition et des membres de la société civile, mais pas avec la Ligue Awami dirigée par Sheikh Hasina. "Le pays a beaucoup souffert, l'économie a été touchée, de nombreuses personnes ont été tuées, il est temps de mettre fin à la violence", a-t-il déroulé.

>> Les explications dans Forum :

Bangladesh: la première ministre en fuite après les manifestations. [Keystone - EPA/Monirul Alam]Keystone - EPA/Monirul Alam
Bangladesh: la Première ministre est en fuite après les soulèvements dans le pays / Forum / 3 min. / le 5 août 2024

Fuite en hélicoptère

Un peu plus tôt, une source proche de la dirigeante avait indiqué que Sheikh Hasin et sa soeur avaient "quitté Ganabhaban (la résidence officielle de la Première ministre, ndlr) pour un lieu plus sûr". La Première ministre "voulait enregistrer un discours. Mais elle n'a pas pu avoir l'occasion de le faire".

La dirigeante a fui lundi la capitale Dacca par hélicoptère, a indiqué une source proche de la dirigeante.

"Son équipe de sécurité lui a demandé de partir, elle n'a pas eu le temps de se préparer", a déclaré cette même source, ajoutant qu'elle était d'abord partie au sein d'un cortège de véhicules, puis "évacuée en hélicoptère".

>> Voir les images de la foule qui marche dans les rues de Dacca après l'annonce de la démission de la Première ministre :

Scènes de liesse après la démission de Sheikh Hasina
Scènes de liesse après la démission de Sheikh Hasina / L'actu en vidéo / 49 sec. / le 5 août 2024

Membres de l'opposition libérés

Le président Mohammed Shahabuddi a ordonné lundi la libération de l'ex-Première ministre et cheffe de l'opposition Khaleda Zia, ainsi que des personnes arrêtées lors des manifestations.

Une réunion dirigée par Mohammed Shahabuddin a "décidé à l'unanimité de libérer immédiatement [...] toutes les personnes arrêtées lors des manifestations d'étudiants", selon un communiqué publié par les services du chef de l'Etat.

Sous pression

Depuis juillet, elle était confrontée à des manifestations de masse qui ont commencé par des rassemblements contre les quotas d'emploi dans la fonction publique, puis se sont transformées en une crise parmi les plus graves de ses 15 années de mandat, les opposants exigeant sa démission.

Dimanche, au moins 91 personnes sont mortes et des centaines d'autres ont été blessées lors de manifestations où la police a fait usage de gaz lacrymogène et de grenades assourdissantes pour tenter de disperser des dizaines de milliers de manifestants.

>> Lire aussi à ce sujet : Le bilan des manifestations au Bangladesh grimpe à au moins 300 morts

Fille du père fondateur du pays

La dirigeante de 76 ans, à l'histoire personnelle indissociable des remous du pays, avait remporté en janvier un cinquième mandat lors d'une élection controversée boycottée par l'opposition.

Fille aînée de Sheikh Mujibur Rahman, le père fondateur du Bangladesh qui a pris son indépendance du Pakistan en 1971, Sheikh Hasina était au pouvoir depuis 2009, après un premier mandat entre 1996 et 2001.

La Première ministre du Bangladesh, Sheikh Hasina, entourée de sa fille et de sa sœur, s’adresse aux médias le 7 janvier 2024. [KEYSTONE - ALTAF QADRI]
La Première ministre du Bangladesh, Sheikh Hasina, entourée de sa fille et de sa sœur, s’adresse aux médias le 7 janvier 2024. [KEYSTONE - ALTAF QADRI]

Sous sa direction, le pays de 170 millions d'habitants, naguère l'un des plus pauvres au monde, a bénéficié d'un net essor économique grâce notamment au développement de son industrie textile.

Le Bangladesh a enregistré une croissance annuelle de plus de 6% en moyenne depuis 2009 et a dépassé l'Inde en revenu par habitant en 2021, malgré la persistance de fortes inégalités. Quelque 95% de la population y a désormais accès au réseau d'électricité.

Liberté d'expression réduite

Cependant, parallèlement, la quasi-totalité des dirigeants du principal parti d'opposition, le Parti nationaliste du Bangladesh (BNP) et des milliers de ses partisans avaient été arrêtés et la liberté d'expression drastiquement réduite.

En 2021, les États-Unis ont imposé des sanctions à une branche d'élite des forces de l'ordre du Bangladesh, le RAB, en raison de violations répétées des droits humains.

L'ONG Human Rights Watch a elle affirmé en novembre avoir des preuves de "disparitions forcées, de torture et d'exécutions extrajudiciaires".

agences/miro

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Appels au calme et à une "transition ordonnée"

L'Union européenne a jugé lundi "essentiel qu'une transition ordonnée et pacifique vers un gouvernement démocratiquement élu soit assurée" au Bangladesh. Une position partagée par le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, qui appelle à une "transition pacifique, ordonnée et démocratique"

"Nous exhortons toutes les parties à s'abstenir de recourir à davantage de violence. Trop de vies ont été perdues ces dernières semaines et nous appelons au calme et à la retenue pour les prochains jours", a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine.

"Nous saluons l'annonce (par le chef de l'armée) d'un gouvernement provisoire et nous appelons à ce que toute transition se fasse dans le cadre juridique bangladais", a-t-il ajouté.

Le Royaume-Uni a lui aussi appelé au retour au "calme" et à la "désescalade.