Des djihadistes français ont refait surface en Syrie, se mettant en scène dans des vidéos tournées dans des villes récemment prises par les forces rebelles. Bien qu'ils n'occupent qu'un rôle secondaire, ils gravitent autour de Hayat Tahrir al-Sham (HTS), l'organisation islamiste responsable de la chute du président Bachar al-Assad.
Une vidéo obtenue par le journaliste de la chaîne France 24, Wassim Nasr, montre ces djihadistes célébrer leur arrivée dans un ancien bastion du régime al-Assad.
Leur discours propagandiste semble cependant avoir considérablement évolué. Une autre séquence relayée par Wassim Nasr montre un changement dans leur rhétorique à l'égard des minorités, notamment chrétiennes, contrastant avec leurs messages de propagande d'il y a quelques années.
Le groupe HTS, qui aspire à gouverner la Syrie, affirme avoir abandonné l'idée d'un djihad global pour se concentrer sur un agenda strictement national.
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Une dizaine de Français parmi HTS
Dans les médias français, le procureur antiterroriste de Paris Olivier Christen fait état de "deux types de djihadistes français" présents aujourd'hui en Syrie: ceux dans le nord-est du pays, "66 femmes et 65 hommes", actuellement détenus par des groupes kurdes, et ceux dans le nord-ouest, notamment dans la zone d'Idleb, qui compte une "grosse centaine de Français" et "une trentaine de femmes évadées ou réfugiées".
Certains de ces djihadistes opèrent pour le groupe HTS et d'autres seraient affiliés à Al-Qaïda, avec qui Hayat Tahrir al-Sham a officiellement rompu en 2018, explique le magistrat.
Si le nombre exact de combattants français ayant participé à l'assaut de Damas n'est pas connu, l'Agence Radio France a révélé que dix djihadistes français ont été identifiés dans les rangs de la formation HTS.
Selon Wassim Nasr, ces combattants sont "encadrés" par le groupe rebelle. "Ils ne sont pas libres de leurs mouvements et n'ont pas le droit de se battre seuls comme ils veulent", a rapporté le journaliste à France Info.
Quel rôle à l'avenir?
Désormais, la question du rôle que vont jouer ces Français venus initialement en Syrie pour combattre se pose.
"La fonction de chacun est très différente. Il y a un juge islamique, un infirmier, des combattants, un instructeur militaire. Il y a également des individus qui participent à la propagande en ligne", détaille Jean-Charles Brisard, président du Centre d'analyse du terrorisme, jeudi dans La Matinale de la RTS. "Mais globalement, leur rôle dans l'organisation HTS est marginal", estime-t-il.
Un risque "atténué" en Occident
En France, tous ces djihadistes font l'objet de poursuites pour terrorisme. Le risque sécuritaire posé par ces combattants aux pays occidentaux est néanmoins "atténué" aujourd'hui, selon Jean-Charles Brisard.
"Le plus vraisemblable est que le groupe qui a pris le pouvoir à Damas reste sur zone. En revanche, cela peut susciter des vocations pour des individus radicalisés dans nos pays", note-t-il.
Selon des informations du journal Le Figaro, la France s'apprête à envoyer un diplomate en Syrie pour rencontrer les nouveaux chefs du pays. La gestion de la communauté djihadiste française devrait être au menu des discussions.
Sujet radio: Alexandre Habay
Texte web: hkr/iar
Des Belges aussi identifiés parmi les rebelles syriens
Selon l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace (OCAM), organisme belge chargé d'analyser la menace terroriste, "entre cinq et dix Belges sont liés au groupe HTS". Ces personnes "étaient dans la région d'Idleb", bastion de l'organisation rebelle, a indiqué un porte-parole de l'OCAM.
La Belgique compte avec la France parmi les pays européens ayant vu partir le plus grand nombre de combattants dans les rangs islamistes à la suite du déclenchement de la guerre civile en Syrie en 2011. Après avoir recensé plus de 400 départs depuis la Belgique, l'OCAM estime aujourd'hui qu'environ 90 Belges considérés comme des "combattants terroristes étrangers" sont encore potentiellement en vie en Irak et en Syrie.
Parmi eux, une trentaine ont été localisés dans la région d'Idleb, dont les "cinq à dix" liés au groupe HTS, a précisé le porte-parole. "Mais on ne sait pas s'ils ont eu une fonction combattante" et s'ils ont participé au renversement du pouvoir à Damas, a-t-il souligné.