Un an après les séismes en Turquie et en Syrie, des milliers de personnes n'ont pas regagné leurs logements
Le tremblement de terre de l'an dernier a causé la mort de 53'537 personnes en Turquie et plus de 6000 en Syrie, selon un dernier bilan publié vendredi. En 65 secondes, quelque 700'000 bâtiments se sont effondrés sur leurs habitants et d'autres ont été fortement endommagés, faisant de ce séisme l'un des dix plus meurtriers des cent dernières années dans le monde.
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La province de Hatay et la ville d'Adiyaman, en Turquie, font partie des régions les plus touchées par ces séismes. Depuis, rien n'a vraiment changé pour les survivants et survivantes. Près de 330'000 personnes sont toujours logées dans des conteneurs. D’autres ont dû retourner vivre dans leur maison, à moitié détruite et instable, alors que la région subit encore de puissantes répliques.
Comme des millions de personnes, Ezgi Sakuçoglu et sa famille se sont retrouvées sans logement au lendemain des séismes. Interrogée dans la Matinale, l'infirmière de 29 ans s’estime chanceuse d’avoir obtenu rapidement un conteneur. Mais "quand il pleut beaucoup, il y a des fuites", précise-t-elle. "Parfois, les fusibles sautent et on n'a plus d’électricité. Comme on se chauffe avec un radiateur électrique, l’intérieur devient glacial et les enfants tombent malades."
Un important impact psychologique sur les enfants
La réouverture des écoles a contribué à redonner un cadre et une sociabilité aux enfants. Mais le drame a laissé des séquelles psychologiques. Seher Gül, professeure de mathématiques au collège, observe des troubles du comportement chez les élèves. "Ils ont peur de revivre un séisme. Moi-même, je sursaute dès que quelque chose se met à balancer, je suis sur le qui-vive, je le sens même quand je fais cours, alors imaginez dans quel état peuvent être nos élèves", témoigne l'enseignante.
Seher Gül et ses élèves vivent encore avec le traumatisme du séisme et la peur que le drame se reproduise. Mais l’enseignante l’admet avec résignation: elle s’est habituée et, comme beaucoup d'habitants de Hatay, elle n'envisage pas de s'installer ailleurs.
La Syrie, grande oubliée de la reconstruction
Le séisme a également durement touché des localités du nord de la Syrie, de la province d'Idlib. Ces régions étaient et sont encore sous contrôle rebelle, échappant au régime central de Bachar al-Assad. L'acheminement d'aide d'urgence s'était alors révélé extrêmement compliqué.
Depuis, en Syrie, la reconstruction n'a pas avancé et même la situation empire, selon la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. "Au plus fort de la catastrophe, nous manquions à la fois d'engins lourds et de carburant pour sortir les gens des décombres", indique Mads Hansen, le chef de la délégation de la Fédération en Syrie. "Un an plus tard, aucun de ces éléments n'est encore disponible et tous les décombres subsistent."
"La situation est aujourd'hui plus grave que jamais"
Malgré des efforts diplomatiques redoublés depuis une année, le gouvernement central de Bachar al-Assad refuse toujours d'autoriser l'acheminement d'aide humanitaire à travers les frontières internes du pays, vers les zones rebelles. Selon Mads Hansen, l'intégralité de la population syrienne est en train de sombrer.
"Une famille syrienne normale a au mieux une heure d'électricité par jour, si elle a de la chance, précise l'humanitaire. Le terme de 'crise oubliée' qui est parfois utilisé pour la Syrie, est une réalité effroyable pour les gens qui luttent tous les jours pour s'en sortir. La situation est aujourd'hui plus grave que jamais. Même qu'au plus fort de la guerre. Près de 90% de la population syrienne vit aujourd'hui sous le seuil de pauvreté, et 30% d'entre elle vit dans l'extrême pauvreté."
Sujets radio: Céline Pierre-Magnani/Benjamin Luis
Adaptation web: liardeju