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Une vague de départs à BFM-TV fait craindre une perte d'indépendance de la chaîne

Vague de départs inédite à BFM-TV
Vague de départs inédite à BFM-TV / Forum / 2 min. / le 15 octobre 2024
Les départs se multiplient au sein de la chaîne française BFM-TV depuis son rachat cet été par le milliardaire Rodolphe Saadé. Cette vague de défections suscite des inquiétudes sur l'indépendance éditoriale de la chaîne.

Après son directeur de l'information et son directeur général, c'est au tour du directeur de la rédaction de la première chaîne française d'information en continu et de son adjoint d'avoir annoncé lundi leur départ d'ici la fin de la semaine. Une longue liste de départs, effectifs ou officieux, qui suscitent un sentiment de "débandade" à l'interne, selon des témoins cités par le journal Le Monde.

Ce cas de figure n'est pas nouveau en France, où plusieurs grands médias ont déjà été rachetés par des milliardaires. Classé huitième fortune de France, Rodolphe Saadé est à la tête de la puissante CMA CGM, le troisième transporteur maritime mondial. Et en à peine deux ans, il a rejoint le club très fermé des Vincent Bolloré, Bernard Arnault, Xavier Niel ou Daniel Kretinsky, tous à la tête de plusieurs titres.

Sanction après un traitement critique du président Macron

Déjà propriétaire des journaux La Provence, La Tribune et Corse matin, le Franco-libanais est devenu cet été le principal actionnaire de BFM-TV mais aussi de RMC, deuxième radio du pays. Il participe aussi depuis 2022 au capital de la chaîne M6 et à celui du média en ligne Brut.

>> Lire : En France, les chaînes BFMTV et RMC sont rachetées par l'armateur Rodolphe Saadé

Rodolphe Saadé est peu connu du grand public, mais en parallèle de ses succès économiques, ce proche d’Emmanuel Macron développe et utilise ses réseaux d'influence, notamment politique, pour imposer son agenda. Dans le monde des médias, il a déjà une petite réputation.

En mars, le directeur de la rédaction du quotidien La Provence, principal journal de la région de Marseille, avait par exemple été mis à pied à la suite d'une "Une" jugée trop critique sur un déplacement d'Emmanuel Macron à Marseille. Et si le journaliste a finalement été réintégré après une grève de sa rédaction, le message, lui, est bel et bien passé.

Pressions politiques sur l'actionnaire

Du côté de BFM-TV, la direction invoque l’opportunité offerte par la clause de cession pour justifier les départs en série. En effet, depuis début octobre et faisant suite au rachat, celles et ceux qui souhaitent quitter la rédaction peuvent le faire dans des conditions similaires à celles d'un licenciement. "C'est la vie normale d’une entreprise", balaie le président du groupe dans Le Monde.

Mais si ces conditions pourraient être un bout d’explication, la vague de départs, aussi conséquente chez les cadres que chez les journalistes, le tout à quelques jours des élections américaines, traduit surtout une inquiétude liée à la ligne éditoriale.

>> Lire à ce sujet : "Les médias ne peuvent pas dire pour qui voter, mais suggèrent les enjeux d’une élection", affirme Julien Labarre

Toujours selon Le Monde, un grave désaccord a déchiré la rédaction en fin de semaine dernière autour de la diffusion d’un documentaire sur Rachida Dati pour l'émission de reportage "Ligne Rouge", récompensée mardi d'un Prix Bayeux. Selon la société de journalistes de BFM-TV, il y aurait eu des pressions politiques sur l'actionnaire pour que ce documentaire ne soit pas diffusé. Il l'a finalement été samedi, sans toutefois, apparemment, rassurer les équipes.

Traitement radio: Ariane Hasler

Texte web: Pierrik Jordan

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