Résumé de l’article
2024, une année électorale record marquée par l'affaiblissement des partis au pouvoir
Pour la première fois depuis plus d’un siècle, tous les partis au pouvoir dans les 12 pays occidentaux qui ont voté en 2024 ont subi des revers. Le Financial Times a relevé un recul historique du score électoral des partis sortants de 7% en moyenne.
On assiste à une sorte d'affaiblissement général du pouvoir politique et donc de la capacité des gouvernements à répondre aux problèmes auxquels les citoyens sont confrontés
Selon Mathieu Gallard, directeur d’études à Ipsos, on retrouve cette tendance dans "l'ensemble des grandes démocraties". "Même en Inde ou en Afrique du Sud, les partis au pouvoir sont restés en place mais ont quand même subi une très nette érosion", illustre-t-il dans l'émission Tout un monde.
>> En Inde, le Premier ministre a été réélu mais a perdu des sièges et sa majorité absolue, lire : Une troisième victoire électorale pour Narendra Modi en Inde, mais moins de sièges
Des "facteurs nationaux liés à des situations locales" et "la crise de l'inflation qui pèse sur le bilan des sortants" expliquent les raisons de ce déclin des partis au pouvoir, selon Mathieu Gallard.
Incapacité à gérer les crises
Loïc Blondiaux, professeur de sciences politiques à l’Université Paris-I Panthéon Sorbonne, estime pour sa part que cette évolution provient aussi de l'incapacité des gouvernements sortants à gérer les crises. "Il n'est pas du tout surprenant que les gouvernements au pouvoir ne parviennent pas à se faire réélire là où il y a une possibilité d'alternance tant leurs capacités à résoudre ces crises sont limitées", considère-t-il. "De mon point de vue, on assiste à une sorte d'affaiblissement général du pouvoir politique et donc de la capacité des gouvernements à répondre aux problèmes auxquels les citoyens sont confrontés."
Et la tendance va sans doute continuer en 2025, avec par exemple la possible non-réélection du chancelier allemand Olaf Scholz en février.
>> Sur le sujet, lire : Dissolution du Parlement allemand, les élections anticipées sont fixées au 23 février
Avancée de la droite populiste
Cet affaiblissement a profité aux formations nationalistes et populistes, comme le Rassemblement national en France, qui a joué la carte de l'immigration, thématique présente dans de nombreuses autres élections dans le monde. C'est d'ailleurs cette même carte qui a favorisé l'élection de Donald Trump aux Etats-Unis.
Le Financial Times observe aussi que le vote des jeunes hommes dont le statut socio-économique est fragilisé a participé à cette ascension des partis de droite populiste. "Les jeunes hommes, y compris dans les minorités ethniques, latinos ou noires, ont voté pour Donald Trump", constate Loïc Blondiaux. "Cela traduit à la fois la séduction de l'archétype viriliste que Donald Trump représente, mais aussi une crainte profonde vis-à-vis de l'évolution des rapports de genre. L'extrême droite parvient parfaitement, me semble-t-il, à adresser ses peurs et ses angoisses et à les représenter politiquement", conclut-il.
>> Pour aller plus loin, lire aussi : La percée de l'extrême droite est le résultat des crises qui traversent l'Europe, estime l'ex-ministre espagnole Arancha Gonzalez
Sujet radio: Patrick Chaboudez
Texte web: Julie Marty
"Le fonctionnement de la démocratie en question, pas la démocratie"
Les populations bénéficiant d'un système démocratique ne souhaitent pas changer de régime, au profit par exemple d'un régime autoritaire, souligne Mathieu Gallard, en se basant sur des sondages internationaux.
"ll n'y a non pas tant une perte de confiance dans la démocratie en elle-même qu'une perte de confiance dans le fonctionnement de la démocratie", détaille-t-il. "Les citoyens de la plupart des pays aimeraient que la démocratie fonctionne de manière plus efficace, que les élus soient plus représentatifs, voire que la voix des citoyens soit plus directement entendue et prise en compte dans le système démocratique, par exemple à travers des référendums et des conventions citoyennes."
>> Pour aller plus loin, lire : Les démocraties continuent de reculer dans le monde, selon un rapport