Résumé de l’article
Elon Musk qualifie Thierry Breton de "tyran de l'Europe", le Français réplique
Fin décembre, Elon Musk avait estimé dans un message sur la plateforme X, dont il est propriétaire, que "seule l'AfD peut sauver l'Allemagne". Le commentaire avait suscité un vif émoi en Europe. Thierry Breton avait alors qualifié la remarque "d'ingérence étrangère".
>> Lire aussi : Le soutien d'Elon Musk à l'extrême droite allemande crée le malaise
"Mec, 'l'ingérence étrangère' américaine est la seule raison pour laquelle tu ne parles pas allemand ou russe aujourd'hui", avait rétorqué Elon Musk, dans une allusion au débarquement américain en France lors la Seconde Guerre mondiale.
Sursaut dans la querelle
La querelle s'est ravivée cette semaine à la suite d'une interview de Thierry Breton à la chaîne BFMTV/RMC, dans laquelle il avait déclaré: "Gardons notre sang-froid et faisons appliquer nos lois en Europe lorsque celles-ci risquent d'être circonvenues [...]. On l'a fait en Roumanie et il faudra évidemment le faire si c'est nécessaire en Allemagne".
>> Sur le sujet, lire également : Le grand nettoyage des réseaux sociaux débute en Europe
Samedi, Elon Musk a répondu sur X en évoquant "l'absurdité stupéfiante de Thierry Breton en tyran de l'Europe".
Proche du président élu américain Donald Trump, qui retrouvera la Maison Blanche le 20 janvier, Elon Musk critique régulièrement les réglementations européennes dans le domaine du numérique, accusant Bruxelles de censure. Mark Zuckerberg, le patron de Meta, s'est aligné sur cette position.
Intimidation
En réponse au message d'Elon Musk, Thierry Breton a écrit également sur X: "Tyran de l'Europe? Ouah! Mais non Elon Musk: l'UE n'a PAS de mécanisme pour annuler quelque élection que ce soit, où que ce soit dans l'UE".
Le réseau X a été mis en cause formellement en juillet pour plusieurs infractions présumées. Pour chacune d'elles, et faute de mise en conformité, la Commission pourrait infliger à Elon Musk une amende allant jusqu'à 6% du chiffre d'affaires mondial annuel de l'ensemble des entreprises qu'il contrôle, soit plusieurs milliards d'euros.
La Commission européenne a annoncé en décembre l'ouverture d'une enquête contre le réseau social d'origine chinoise TikTok, accusé d'avoir manqué à ses obligations et ouvert la porte à de possibles manipulations russes dans l'élection présidentielle annulée en Roumanie par la Cour constitutionnelle roumaine.
>> Pour en savoir plus, lire : En Roumanie, la Cour constitutionnelle annule le résultat du premier tour de la présidentielle
juma/fgn avec l'ats
"Je ne suis pas pour un boycott. Je suis pour me battre, pour dire que la loi doit être respectée"
Invité dans l'émission Forum de la RTS lundi soir, Thierry Breton, qui est aussi l'architecte du Digital Services Act (DSA), soit le règlement européen visant à lutter contre la propagation de contenu illicite en ligne et adopté en octobre 2022, défend la régulation européenne des réseaux sociaux face aux critiques d’Elon Musk.
Il insiste sur le fait que cette régulation vise à protéger la liberté d’expression tout en limitant les abus liés aux algorithmes. "S’ils sont manipulés, ces algorithmes peuvent créer des tsunamis d’informations aux conséquences graves pour les personnes, les enfants et nos démocraties". Selon lui, le DSA n'est pas une censure, mais une garantie de sécurité et de responsabilité dans l'espace numérique. "En Europe, nous ne tolérons pas les discours antisémites, racistes ou l’apologie du terrorisme, ni dans l’espace physique, ni dans le numérique", illustre-t-il.
Concernant les récentes provocations d’Elon Musk, qui l’a qualifié de "tyran de l’Europe", Thierry Breton précise qu’il ne se considère pas comme une "bête noire" du milliardaire américain, mais comme un artisan d’un cadre démocratique approuvé à l’unanimité par les 27 Etats membres.
S’ils sont manipulés, ces algorithmes peuvent créer des tsunamis d’informations aux conséquences graves pour les personnes, les enfants et nos démocraties
Il rappelle qu'Elon Musk, en tant qu’entrepreneur, a le droit d’exprimer ses opinions, même si elles peuvent choquer, tant qu’il respecte les lois européennes, en particulier celles encadrant les plateformes systémiques comme X. "Elon Musk doit donc garantir la transparence sur la manière dont ses algorithmes amplifient les contenus et répondre aux exigences de la loi", poursuit-il.
Interrogé sur la possibilité d’interdire X en Europe, il explique que la loi prévoit des sanctions claires en cas de non-respect, allant d’amendes à une suspension temporaire si les infractions persistent.
A propos de l'annonce par Facebook de la fin du fact-checking aux Etats-Unis, il souligne encore que ce type de décision serait inacceptable en Europe, où des règles strictes s’appliquent. Pour Thierry Breton, boycotter les réseaux sociaux n’est pas une solution : "Je ne suis pas pour déserter, je suis pour me battre, pour dire que la loi doit être respectée car c'est elle qui protège nos enfants, nos concitoyens et nos démocraties."