Mussolini prononçait il y a 100 ans un discours plongeant l'Italie dans la dictature fasciste
Il ne reste pas de trace sonore du discours de Benito Mussolini dans les archives, mais son texte existe toujours. Le leader fasciste y assume la responsabilité politique de l’assassinat d’un député de l’opposition, mais aussi l'usage de la violence pour diriger et contrôler l'Italie.
"On dit que le fascisme est une horde de barbares qui s'est emparée de la Nation. Eh bien j'assume la responsabilité politique, morale et historique de tout ce qui s'est passé", avait alors clamé le Duce devant le Parlement italien. Pas plus de 48 heures plus tard, Benito Mussolini musèle la presse et les partis d'opposition et fait arrêter des centaines de personnes.
Une ignorance de la réalité du fascisme
Cent ans plus tard, ce discours a une résonance particulière en Italie et en Europe, estime dans Forum Marie-Anne Matard-Bonucci, historienne et spécialiste du fascisme et de l'antisémitisme.
"Ce discours intervient à un moment où l'Italie est dirigée par Giorgia Meloni, qui est elle-même issue d'une formation néo-fasciste, et dans un contexte où on voit que l'extrême droite a le vent en poupe partout en Europe et où le fascisme est réhabilité par certains", commence par rappeler Marie-Anne Matard-Bonucci.
Selon l'historienne, "il y a toujours eu une forme de nostalgie du fascisme. Ce qui fait peut-être la différence aujourd'hui, c'est qu'il y a de nouvelles générations qui n'ont pas connu le régime ou qui n'ont pas la mémoire de ce qu'était le fascisme. Ils sont prêts à croire les partis qui cherchent à le promouvoir. Il y a une grande ignorance de ce qu'a été la réalité du fascisme."
L'autrice de "Totalitarisme fasciste" estime que cela favorise une forme de levée d'inhibition. "Jusqu'aux années 80-90, il y avait une conscience antifasciste, mais elle a peu à peu disparu. Aujourd'hui, il est plus facile qu'il y a trois décennies de faire des saluts fascistes dans les stades et d'acclamer la mémoire de Mussolini."
Enseigner précisément l'histoire
Certaines personnes âgées en Italie éprouvent une forme de nostalgie pour l'époque de Mussolini, estimant que le pays se portait mieux alors. Pour Marie-Anne Matard-Bonucci, il s'agit d'un fantasme. "La population italienne, dans sa majorité, a souffert sur un plan économique et social, aussi parce que ce régime a entraîné le pays dans la guerre. Donc l'idée que c'était le bon temps est une idée qui relève d'une forme de falsification."
Elle poursuit: "Les personnes âgées ont quelquefois tendance à regretter une époque qui était celle de leur jeunesse, ce qui peut expliquer pourquoi on entend ce discours. La mémoire du fascisme se perd aussi aujourd'hui. D'où l'intérêt et l'importance à enseigner cette histoire précisément", conclut la chercheuse.
Interview radio: Coralie Claude
Texte web: Antoine Schaub