Les funérailles de l'ex-chef de guerre libérien Prince Johnson ont rassemblé des milliers de personnes
L'inhumation de samedi marque la fin de cinq jours de funérailles nationales au cours desquelles le corps de Prince Johnson a été exposé devant le Parlement à Monrovia, avant d'être transporté à Ganta, dans son comté natal de Nimba, au nord du pays.
Plusieurs hauts responsables, dont le président Joseph Boakai et le vice-président Jeremiah Koung, avaient fait le déplacement. Dans la foule réunie à Ganta, certains brandissaient de fausses armées taillées en bois, qui selon eux symbolisent la nature de guerrier de Prince Johnson et son rôle dans la défense de Nimba pendant les tueries.
Rendu célèbre par une vidéo le montrant en train de siroter une bière pendant que ses hommes torturaient à mort le président Samuel Doe en 1990, Prince Johnson était toujours un sénateur influent dans son pays. Il n'a jamais exprimé de regret sur son passé et n'a jamais été jugé.
Commission d'enquête
Prince Johnson est l'un des huit chefs de guerre dont la commission Vérité et réconciliation, organe d'enquête non juridique installée en 2006, préconisait en 2009 qu'ils soient jugés par un tribunal spécial.
La commission l'avait alors identifié comme étant l'individu ayant le plus de victimes à son actif pendant les guerres civiles libériennes, l'accusant de meurtres, extorsion, massacres, destructions de propriétés, recrutement forcé, enlèvements, torture, travail forcé et viols.
La mise en oeuvre des recommandations de cette commission se fait toujours attendre.
Influence politique
Prince Johnson "s'est débrouillé pour avoir une telle influence politique lorsqu'il est revenu" de son exil au Nigeria, de 1992 à 2004, "qu'il a en quelque sorte réussi à confisquer ou détourner les efforts de justice" de la commission "Vérité et réconciliation", estime Alain Werner, avocat et directeur de l'ONG Civitas Maxima.
"En un sens, jusqu'à sa mort l'an dernier, il était au-dessus des lois", ajoute-t-il.
Rentré au Libéria en 2004 avec un message de paix et de réconciliation, il était devenu prédicateur dans une église évangélique où il était suivi par de nombreux fidèles, conservant une forte popularité.
rad avec afp
Guerres civiles et virus
La mort du président Samuel Doe fut l'un des premiers épisodes sanglants qui allaient faire basculer le Libéria dans des guerres civiles qui, jusqu'en 2003, ont été marquées par une litanie d'atrocités - massacres de civils, tortures, viols, enrôlement d'enfants soldats à grande échelle et cannibalisme - imputables à toutes les parties.
Elles ont fait quelque 250.000 morts et mis à genoux ce pays parmi les plus pauvres de la planète, ravagé une dizaine d'années plus tard, entre 2014 et 2016, par l'épidémie d'Ebola en Afrique de l'Ouest.
Après les conflits, Prince Johnson était devenu un sénateur influent, agissant comme faiseur de roi aux trois dernières élections présidentielles, jusqu'à sa mort fin novembre près de la capitale à l'âge de 72 ans.