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Le sud du Kirghizistan est à feu et à sang

Victimes de violences, des milliers d'Ouzbeks tentaient dimanche de quitter le Kirghizistan.
Victimes de violences, des milliers d'Ouzbeks tentaient dimanche de quitter le Kirghizistan.
Le Kirghizistan a étendu dimanche l'état d'urgence dans le sud de ce pays d'Asie centrale et ordonné à ses forces de "faire feu à volonté" pour endiguer des violences ethniques qui ont fait au moins 104 morts et des dizaines de milliers de réfugiés.

Conséquence de ces affrontements, 32'000 réfugiés adultes ont été enregistrés en Ouzbékistan, pays voisin, la plupart étant accompagnés d'enfants que les autorités ouzbèkes n'ont pas pu comptabiliser, a déclaré un responsable du ministère ouzbek des Situations d'urgence.

Un policier ouzbek au poste-frontière à Iorkichlok a quant à lui indiqué sous couvert de l'anonymat que 125'000 personnes avaient fui les violences entre Kirghiz et Ouzbeks dans le sud du Kirghizistan, après avoir totalisé les réfugiés de plusieurs districts de la région.

Tirs sans sommation

A Bichkek, capitale kirghize, le ministère de la Défense a annoncé la mobilisation des réservistes de l'armée, âgés de 18 à 50 ans, et le début de "l'organisation de la mobilisation partielle de la population civile". Désormais, les policiers doivent "recourir aux armes de service et faire feu à volonté", a renchéri le ministre de l'Intérieur par intérim, Bolot Cher.

Les forces de l'ordre ont été autorisées à tirer sans sommation dès samedi soir pour tenter de rétablir l'ordre après l'escalade des tensions dans cette ancienne république soviétique au bord de la guerre civile. Les affrontements ethniques entre Ouzbeks et Kirghiz y ont gagné en intensité, alors que le bilan provisoire a été porté à 104 morts et plus de 1200 blessés.

Couvre-feu décrété

Signe que la situation se détériorait, un couvre-feu de 24 heures sur 24 à été décrété à Och, deuxième ville du pays, et dans deux districts avoisinants. Cette mesure était auparavant en vigueur seulement la nuit. L'état d'urgence a aussi été étendu à l'ensemble de la région voisine de Djalal-Abad, bastion du président Kourmanbek Bakiev renversé en avril, où les violences se sont propagées samedi depuis Och.

Dans la ville de Djalal-Abad et sa région, des fusillades nourries et des incendies ont éclaté dimanche, selon des témoins et des médias locaux, mais la situation s'est stabilisée dans la soirée, a indiqué le gouverneur de la région. L'ex-président kirghiz Kourmanbek Bakiev, réfugié à l'étranger depuis le soulèvement meurtrier d'avril, a assuré n'avoir aucun lien avec ces nouvelles violences.

afp/dk

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L'ONU, les USA et la Russie inquiets

Dimanche, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est dit "alarmé par l'ampleur des affrontements, la nature interethnique des violences et le nombre de victimes et de déplacés", tandis que le président russe, Dmitri Medvedev, a appelé à "rétablir l'ordre le plus rapidement possible" et à "mettre fin au conflit interethnique".

De son côté, l'ambassade des Etats-Unis au Kirghizistan a de nouveau fait part de "sa vive inquiétude" et appelé les parties "à renoncer à la violence".

La stabilité du Kirghizistan est primordiale pour Washington qui dispose près de Bichkek d'une base importante pour ses troupes en Afghanistan.

La Russie, qui dispose également d'une base à Kant, dans le nord, y a dépêché 150 parachutistes arrivés dimanche pour renforcer la protection des installations et du personnel militaires russes, ont confirmé les autorités russes.

Ces affrontements sont les pires violences depuis la révolte d'avril (87 morts) qui a chassé Kourmanbek Bakiev et porté au pouvoir l'actuel gouvernement provisoire. Des affrontements avaient déjà ensanglanté en mai la région de Djalal-Abad.

Historiquement, les relations entre la minorité ouzbèke (15% à 20% de la population du Kirghizstan) et les Kirghiz sont tendues, notamment en raison de disparités économiques au détriment des Ouzbeks. De puissants groupes mafieux sont également actifs dans cette région.