"Si nous n'arrêtons pas de combattre, nous allons détruire le pays", est-il écrit dans ces tracts rédigés en langues kirghize et ouzbèke. "Que faites-vous? Arrêtez! Ouvrez les yeux! Ce qui est arrivé est arrivé, on ne peut pas le changer. Le Kirghizstan est votre maison, ne cédez pas aux provocations", souligne encore ces tracts qui ont été lâchés par centaines.
Le sud du Kirghizstan est déchiré depuis la nuit de jeudi à vendredi par des violences interethniques qui ont fait au moins 124 morts et plus de 1600 blessés. Le Kirghizstan a étendu dimanche l'état d'urgence dans le sud et ordonné à ses forces de "faire feu à volonté" pour endiguer les violences entre les Kirghiz et la minorité ouzbèke.
Les combats continuent
De nouveaux affrontements ont éclaté lundi dans le sud du Kirghizstan, chassant vers l'Ouzbékistan tout proche des flots de réfugiés, dont beaucoup accusent les forces régulières d'aider des bandes armées à commettre des massacres. A Och, la deuxième ville du Kirghizstan, des coups de feu sporadiques claquaient dans les rues où des corps calcinés et des maisons incendiées témoignent de la violence des combats, a rapporté un journaliste de l'AFP.
A Djalal-Abad, une autre ville proche de la frontière ouzbèke, la situation restait aussi tendue et, comme à Och, des incendies faisaient rage, selon l'agence kirghize AKIpress.
Les violences interethniques avaient éclaté dans la nuit du 10 au 11 juin à Och entre des Kirghiz et la minorité ouzbèke. Le gouvernement provisoire kirghiz a admis lundi qu'il peinait à contrôler la situation dans le sud de ce pays d'Asie centrale malgré la mobilisation de l'armée, l'instauration d'un couvre-feu et l'ordre donné aux forces régulières de tirer sans sommation.
Frontière avec l'Ouzbékistan fermée
L'Ouzbékistan fermera lundi sa frontière aux réfugiés du Kirghizstan et a lancé un appel à l'aide internationale pour les 45'000 réfugiés et leurs enfants qui ont déjà été accueillis, a indiqué le vice-Premier ministre ouzbek, Abdoullah Aripov.
"Aujourd'hui (lundi), nous allons cesser d'accepter des réfugiés du Kirghizstan car nous ne pouvons pas les loger et n'avons pas les capacités pour les accueillir", a déclaré M. Aripov au camp de réfugiés de Iorkichlok, à la frontière ouzbeko-kirghize. L'Ouzbékistan n'a pour l'instant comptabilisé que les adultes fuyant les violences ethniques au Kirghizstan, mais il s'agit pour la plupart de femmes accompagnées d'enfants
Le Kirghizstan, Etat pauvre mais stratégique d'Asie centrale, accueille à la fois une base militaire russe et une base militaire américaine cruciale pour le déploiement de troupes en Afghanistan. En avril, un soulèvement qui avait fait 87 morts avait chassé le président Kourmanbek Bakiev, portant au pouvoir l'actuel gouvernement provisoire qui a prévu d'organiser un référendum sur une nouvelle constitution le 27 juin. Historiquement, les relations entre la minorité ouzbèke (15 à 20% de la population) et les Kirghiz sont tendues, notamment en raison de disparités économiques.
agences/lan
L'OSCE sur place
Deux envoyés spéciaux de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) se trouvent actuellement au Kirghizstan, a annoncé lundi l'organisation.
A Vienne, au siège de l'OSCE, le conseil permanent des représentants des 56 Etats membres de l'organisation devait se réunir lundi après-midi en session spéciale pour examiner la situation et éventuellement décider une série de mesures pour contribuer à la solution de ce conflit.
L'OSCE dispose de bureaux à Bichkek et Och, la deuxième ville du pays où les combats ont été particulièrement violents ces derniers jours.
Mobilisation internationale
La communauté internationale commençait à se mobiliser pour trouver un moyen de ramener la paix et livrer de l'aide humanitaire, à l'instar de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton qui a décidé d'envoyer un émissaire en Asie centrale.
Par ailleurs, selon les agences russes, l'Organisation du traité de sécurité collective (ODKB), une alliance militaire de pays d'ex-URSS dont le Kirghizstan est membre, s'est réunie lundi à Moscou et devait notamment discuter de l'envoi d'une force de réaction rapide.