Sans attendre le prochain remaniement ministériel, Alain Joyandet et Christian Blanc, secrétaires d'Etat respectivement à la Coopération et au Grand Paris, ont présenté dimanche leur démission du gouvernement.
Le porte-parole du gouvernement, Luc Chatel, a indiqué à l'AFP que les deux démissions avaient été demandées par Nicolas Sarkozy et par le Premier ministre François Fillon. "Le président de la République et le Premier ministre ont décidé de tirer les conséquences d'événements survenus ces derniers jours, que les Français n'ont ni compris ni acceptés", a déclaré Luc Chatel. "Après mûre réflexion, ils ont demandé à Alain Joyandet et Christian Blanc, après avoir échangé avec eux, de démissionner", a-t-il ajouté.
Les deux hommes avaient été récemment mis en cause dans la presse en raison de leur train de vie. "L'homme d'honneur que je suis ne peut accepter d'être victime d'un amalgame. Après mûre réflexion, j'ai décidé de quitter le gouvernement", a expliqué sur son blog Alain Joyandet, qui était en charge du développement et notamment des relations avec les pays africains.
Cigares et jet privé
Alain Joyandet avait été épinglé à deux reprises, ces derniers mois, par la presse: une première fois en mars pour avoir eu recours à la location d'un avion privé pour 116’500 euros lors d'un déplacement ministériel en Martinique (Antilles), et une autre en juin quand il a été soupçonné d'avoir bénéficié d'un permis de construire illégal pour agrandir la maison qu'il possède près de Saint-Tropez, dans le sud de la France.
"Pas un euro public n'a été détourné pour mon enrichissement personnel ou celui de mes proches", a souligné Alain Joyandet. Pour sa part, le secrétaire d'Etat chargé du développement de la région de Paris, Christian Blanc, avait été sévèrement critiqué pour avoir acheté pour 12’000 euros de cigares cubains sur des fonds publics.
Eric Woerth très exposé
Ces deux démissions s'inscrivent dans une série de polémiques autour du train de vie des ministres français et de leur implication présumée dans des affaires politico-judiciaires, qui ne cesse d'enfler depuis plusieurs semaines. Le ministre du Travail, Eric Woerth, fait figure de principal accusé: il est soupçonné de "conflit d'intérêts" pour avoir été ministre du Budget (2007 à mars 2010) à une époque où son épouse gérait une partie de la fortune de l'héritière du géant des cosmétiques L'Oréal, Liliane Bettencourt, soupçonnée de possibles fraudes fiscales.
Eric Woerth est un ministre clé, chargé de porter la douloureuse et impopulaire réforme des retraites qui doit marquer la fin du mandat de Nicolas Sarkozy.
afp/cab
Une épine pour la présidence Sarkozy
Outre Eric Woerth et les deux démissionnaires, d'autres membres du gouvernement sont en cause pour avoir logé dans des hôtels hors de prix ou fait occuper leur logement de fonction par leur famille.
Ces révélations successives tombent au plus mal pour Nicolas Sarkozy, qui avait promis une République exemplaire, et alors que le gouvernement vient d'adopter des mesures de rigueur budgétaire.
Mercredi, en recevant les députés de son parti, le chef de l'Etat avait promis de tirer "sévèrement" les conséquences de ces affaires, et annoncé qu'il remanierait son gouvernement en octobre.
Son ancienne adversaire socialiste à la présidentielle de 2007, Ségolène Royal, a ainsi jugé que "le système Sarkozy est aujourd'hui corrompu", tandis que la dirigeante du Parti socialiste Martine Aubry a dénoncé "un entrelacs fâcheux entre le pouvoir politique et les intérêts de l'argent".
Et selon un sondage Viavoice à paraître lundi dans le quotidien Libération, près de deux Français sur trois (64%) jugent leurs dirigeants politiques "plutôt corrompus".