En s'installant à la Maison Blanche en janvier 2009, Barack Obama a hérité de la reconstruction de La Nouvelle-Orléans, ville à 80% inondée après le passage de Katrina le 29 août 2005 où plus de 1600 personnes ont péri. A l'époque, la réaction de l'administration Bush avait été sévèrement critiquée, car jugée trop tardive et insuffisante.
Hommage aux victimes
Dimanche, son successeur devra rendre hommage à la ville martyr, tout en essayant de convaincre ses habitants que le gouvernement ne les a pas abandonnés, que ce soit au moment de Katrina ou de la marée noire dans le golfe du Mexique.
"Avec la reconstruction de La Nouvelle-Orléans, il a hérité d'un problème, comme pour les autres importantes difficultés économiques", explique Beth Galante, directrice de l'antenne néo-orléanaise de Global Green USA, une organisation de reconstruction active dans la ville depuis le passage de Katrina. "Ça l'oblige à reconnaître les échecs tout en garantissant un engagement sérieux et continu de la part du gouvernement fédéral pour résoudre ces problèmes".
Au cours des quelques heures qu'il passera à La Nouvelle-Orléans, Barack Obama prononcera un discours à l'université Xavier, un établissement traditionnellement noir et catholique, inondé en août 2005.
Selon le porte-parole adjoint de la Maison Blanche Bill Burton, il rendra hommage aux victimes de l'ouragan, vantera les progrès accomplis dans la reconstruction et "réaffirmera l'engagement de la nation envers la région du golfe et tous ceux qui continuent à travailler pour reconstruire les vies et les communautés". Le président devrait également aborder la récente marée noire et ses conséquences sur l'industrie pétrolière et touristique de la région.
Visite délicate
Cette visite intervient à un moment délicat pour Obama, occupé à caler un programme de rentrée qui devra le mener aux très importantes élections de mi-mandat, en novembre. Le chef de la Maison Blanche doit également s'adresser mardi à la nation, depuis le Bureau ovale, sur la fin des opérations de combat en Irak, un dossier là aussi hérité de George W. Bush.
Si les habitants de La Nouvelle-Orléans se félicitent qu'une visite présidentielle honore les commémorations de Katrina, beaucoup lui reprochent également les pertes d'emplois dues au moratoire sur les forages pétroliers off-shore décidé après le début de la marée noire au large de la Louisiane, le 20 avril.
Ils attendent également un nouvel engagement fédéral pour la protection des zones marécageuses censées servir de rempart contre les catastrophes maritimes, et dont la disparition a été accélérée par la marée noire. L'auditoire de Barack Obama sera donc très attentif.
"La Nouvelle-Orléans n'a pas besoin d'un discours pour lui remonter le moral", prévient l'historien Douglas Brinkley, qui habitait la ville lors de Katrina. "On a eu George W. Bush qui est venu à Jackson Square (célèbre place de la ville) faire des promesses qui n'ont jamais été tenues. Donc je pense que ça serait bien s'il nous expliquait son plan".
Convaincre de l’efficacité du gouvernement
Pour sa dixième visite dans le golfe du Mexique depuis sa prise de fonctions (dont six depuis l'explosion de la plate-forme de BP le 20 avril), Barack Obama ne devrait faire aucune annonce particulière, selon Bill Burton. Il s'attellera à défendre la réponse de son administration à la marée noire, jugée parfois trop lente et angélique, et à faire le point sur la reconstruction de la région.
Il devrait rappeler les 2,25 milliards de dollars (2,3 milliards de francs) de fonds publics déjà débloqués pour la Louisiane et la réparation de plus de plus de 350km de digues et de barrages, ainsi que le 1,8 milliard de dollars (1,84 milliard de francs) supplémentaires annoncés vendredi pour les écoles de La Nouvelle-Orléans.
Il pourra également s'appuyer sur une étude de la Brookings Institution selon laquelle la région de La Nouvelle-Orléans a recouvré 90% de sa population et 85% de ses emplois pré-Katrina.
agences/bkel
"L’énergie est revenue"
Les rues historiques du quartier français de La Nouvelle-Orléans résonnent du son des cuivres et du piano: cinq ans après les horreurs de Katrina, la scène musicale de la ville, plus vivante que jamais, attire des hordes de musiciens et de touristes.
Des dizaines de clubs de jazz rivalisent dans tout le "French Quarter" en cette fin d'été. Dans une autre partie de la ville, les pelouses et les rues sont envahies de festivaliers venus célébrer l'anniversaire du grand Louis Armstrong.
Leroy Jones, trompettiste et personnalité de la scène jazz de la ville, joue un mélange de vieux standards et de morceaux de sa composition devant une foule enthousiaste malgré la chaleur écrasante. "L'énergie est revenue", dit-il en épongeant la sueur de son visage. "La créativité est peut-être encore plus grande aujourd'hui". "On dit souvent qu'on ne peut pas jouer du blues si on n'a pas vécu le blues. Eh bien la majorité des gens ici - moi compris - en a fait l'expérience", raconte le musicien.
La scène musicale a été réduite à néant par la catastrophe, et beaucoup de ses membres n'ont que depuis peu l'impression d'un retour à la normale. "Nous avons eu une très bonne année, mais il a fallu attendre cette année" pour que les affaires reprennent vraiment, souligne Kathy Edegran, gérante du club de jazz le Palm Court, l'un des clubs huppés de la ville, qui a été parmi les premiers à rouvrir, moins de deux mois après les inondations.
La solidarité qui s'est manifestée et la volonté de remettre la cité sur les rails ont frappé Kathy Edegran depuis le début. Certains musiciens réguliers sont venus jouer en renonçant à leur cachet pendant des mois, parfois devant une salle vide, raconte-t-elle à l'AFP. "Ils avaient tout simplement besoin de consacrer leur esprit à autre chose qu'à Katrina".
Mais lorsque la ville a recommencé à fonctionner, ce qui a le plus manqué, ce sont les musiciens qui ne sont jamais revenus et dont certains sont morts loin de leur ville, souligne le percussionniste Lawrence Batiste. Certaines mesures ont été prises pour aider les musiciens à se réinstaller dans une ville dont l'identité est marquée par la musique.
L'organisation à but non lucratif Habitat for Humanity a par exemple construit 72 maisons neuves dans le "village des musiciens", situé dans le Lower Ninth Ward. Ce quartier durement frappé abritait de nombreux artistes avant l'ouragan. Il ne compte aujourd'hui qu'un quart de la population qui y vivait avant Katrina, selon des statistiques locales.