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Des législatives dans le sang en Afghanistan

Les électeurs étaient plus nombreux aux urnes que lors de l'élection présidentielle en 2009.
Les électeurs étaient plus nombreux aux urnes que lors de l'élection présidentielle en 2009.
Les législatives en Afghanistan ont été émaillées samedi d'attaques de talibans qui ont fait quatorze morts, mais le taux de participation au scrutin a malgré tout atteint 40%, soit davantage que pour la présidentielle de l'an dernier. L'ampleur des fraudes marquera ou non l’échec de ces élections.

Outre la menace des talibans d'attaquer bureaux de vote, candidats, et tout électeur qui n'aura pas obéi à leur ordre de boycotter le scrutin, deux sujets inquiétaient la communauté internationale pour juger de la légitimité des résultats: le taux de participation - à comparer à un piteux 30% à la présidentielle d'août 2009- et les fraudes. Au terme de l'élection, la participation est estimée à 40%, selon Fazil Ahmad Manawi, le président de la commission électorale nommé par Hamid Karzaï.

Durant la journée de scrutin, "trois policiers ont été tués et treize autres blessés, onze civils ont été tués et 45 blessés", a déclaré le ministre de l'Intérieur Besmullah Mohammadi. Sept personnes, dont au moins cinq civils, ont été tuées dans des tirs de roquettes visant des bureaux de vote dans la province de Nangarhar (est).

Trois autres personnes ont été tuées dans trois tirs de roquettes distincts dans la province de Kunar (est). Les talibans ont revendiqué 150 attaques de bureaux au total, mais ils ont pour habitude d'exagérer le bilan de leurs opérations. Plus de 10,5 millions d'Afghans devaient choisir leurs 249 députés à l'Assemblée nationale parmi plus de 2’500 candidats. 68 sièges sont réservés à des femmes.

Bilan contrasté selon l’ONU

Le gouverneur de la province de Kandahar, Tooryali Vesa, a réchappé de peu à un attentat. [KEYSTONE - MATIULLAH ACHAKZAI]
Le gouverneur de la province de Kandahar, Tooryali Vesa, a réchappé de peu à un attentat. [KEYSTONE - MATIULLAH ACHAKZAI]

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-Moon a salué "le courage et la détermination" des électeurs. Il a appelé "toutes les parties à utiliser les voies légales qui conviennent pour déposer leurs recours et a demandé de la patience pour que les instances électorales achèvent le processus en conformité" avec la loi".

Le chef de la mission de l'ONU en Afghanistan, Staffan de Mistura, a estimé pour sa part qu'il fallait tirer un "bilan mitigé" des élections et que la sécurité n'avait pas été "bonne". Le commandant des forces internationales en Afghanistan, le général américain David Petraeus, a lui aussi salué la participation des Afghans, y voyant "un message puissant" quant à l'avenir du pays.

"Les électeurs afghans et les candidats ont une fois de plus montré leur détermination à résister à l'intimidation, en choisissant leurs propres leaders et la voie qu'ils souhaitent pour leur pays", a de son côté déclaré le secrétaire général de l'Otan Anders Fogh Rasmussen.

Le commandement de l'Otan a relevé qu'il y avait eu moins d'actes de violences durant les législatives que lors de la présidentielle, même s'ils ont été plus meurtriers.

La crainte de fraudes massives

La Commission des plaintes électorales (ECC) a indiqué avoir déjà reçu des "plaintes après des accusations d'ouvertures tardives de bureaux de vote, des cas de menaces et d'intimidation, des cas de personnes non autorisées à voter, des cas d'utilisation illégale de cartes d'électeur, de mauvaise qualité de l'encre indélébile et de manque de bulletins de vote".

Les services secrets afghans ont annoncé avoir saisi 22’000 fausses cartes d'électeurs lors des trois derniers jours.

De nombreuses manipulations des urnes sont redoutées par les observateurs internationaux. [REUTERS - � Omar Sobhani / Reuters]
De nombreuses manipulations des urnes sont redoutées par les observateurs internationaux. [REUTERS - � Omar Sobhani / Reuters]

Les résultats définitifs officiels ne sont pas attendus avant le 31 octobre. Ces secondes législatives au suffrage universel depuis la chute du régime des talibans fin 2001 ne présentaient pas un grand enjeu, le pouvoir réel étant concentré dans les mains du président Hamid Karzaï.

Ce dernier a été installé à la tête du pays par la communauté internationale fin 2001 et y est maintenu depuis grâce à elle, malgré la corruption dont est accusé son gouvernement et des fraudes massives qui ont permis sa réélection lors d'une présidentielle calamiteuse en août 2009.

afp/os

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Un réel enjeu pour les Occidentaux

La bonne tenue du scrutin est plus important pour les puissances occidentales au moment où, face à des opinions publiques réticentes à l'envoi de leurs soldats dans ce qui apparaît de plus en plus comme un bourbier, elles envisagent un début de retrait de leurs quelque 150’000 militaires dès juillet 2011 pour les Etats-Unis.

Les pertes parmi les soldats étrangers atteignent des niveaux record, avec 512 militaires tués depuis le début de l'année, alors que l'année 2009 était déjà de très loin la plus meurtrière depuis fin 2001, avec 521 morts.