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Grèves en France: bataille de chiffres

Les syndicats sont à nouveau dans la rue après les premières manifestations du 7 septembre dernier (photo). [Keystone]
Les syndicats étaient à nouveau dans la rue après les premières manifestations du 7 septembre dernier (photo). - [Keystone]
Les syndicats français ont proclamé jeudi un succès, revendiquant trois millions de manifestants au cours de la nouvelle journée d'action nationale contre la réforme des retraites, sur fond de bataille de chiffres avec le gouvernement qui en a compté moins d'un million.

Pour la deuxième fois en un peu plus de deux semaines, les salariés français étaient appelés à une journée nationale de grève et de manifestations contre le projet phare de la deuxième partie du mandat de Nicolas Sarkozy.

Alors que le texte de la réforme a déjà été adopté en première lecture à l'Assemblée nationale et doit être examiné le 5 octobre au Sénat, les syndicats espéraient faire mieux que le 7 septembre, lorsque plus d'un million de personnes étaient descendues dans les rues de France selon la police et jusqu'à 2,7 millions selon la CGT.

Fortes divergences

Ils estiment avoir réussi leur pari en mobilisant davantage de personnes qu'il y a deux semaines: 2,9 millions de manifestants selon la CFDT (réformiste) et 3 millions pour la CGT (gauche), les deux principaux syndicats français. Mais la police n'a dénombré que 997'000 personnes dans les rues de France contre le projet de réforme des retraites.

A Paris, les manifestants brandissaient des pancartes, "prisonniers du boulot" ou "à la retraite Sarkozy, raciste !", une allusion au récent débat sur les expulsions de Roms. Ce défilé, le principal des 231 organisés en France, a rassemblé 300'000 personnes, soit 30'000 de plus que le 7 septembre, selon les syndicats. La police n'a compté que 65'000 manifestants, soit 15'000 de moins qu'il y a deux semaines.

Les importantes divergences dans les chiffres expliquent les appréciations très différentes de l'ampleur du mouvement par les syndicats et le gouvernement. Face à la victoire proclamée par les syndicats, l'Elysée a ainsi souligné une baisse "sensible" du nombre des grévistes. "En première analyse, cela signifie que soit les Français considèrent que tout cela est déjà derrière eux, soit qu'ils adhérent davantage" au projet de réforme, disait-on à la présidence.

Avions et trains perturbés

Réforme emblématique de la seconde partie du mandat du président Nicolas Sarkozy, le projet de loi controversé sur les retraites prévoit notamment le relèvement de 60 à 62 ans, à l'horizon 2018, de l'âge minimal de départ à la retraite. Le gouvernement considère que faire travailler les Français plus longtemps, à l'instar de leurs voisins européens, est la meilleure option pour répondre à des besoins de financement évalués à 70 milliards d'euros d'ici à 2030.

Dans le pays, les perturbations affectaient essentiellement la circulation des trains et des avions, ainsi que le fonctionnement d'écoles, certaines restant fermées. Dans les aéroports, les voyageurs connaissaient une journée noire, avec généralement l'annulation de 40% des vols, jusqu'à 50% à l'aéroport parisien d'Orly (contre 25% le 7 septembre).En revanche, le rail était moins touché : la société SNCF prévoyait de faire rouler un train à grande vitesse (TGV) sur deux, mais le trafic international était quasi-normal.

Les syndicats ont prévu de se retrouver vendredi pour décider de la suite à donner à leur mouvement. Nicolas Sarkozy, qui avait déjà concédé quelques aménagements après les manifestations du 7 septembre, pourrait à nouveau faire un geste, en faveur des handicapés, des femmes ou des chômeurs âgés.

afp/lds

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Réactions très contrastées

Le secrétaire général du syndicat CFDT (réformiste) François Chérèque a estimé le pari "gagné": "Ce qu'on attend, c'est que le gouvernement décide de revoir sa réforme".

La CGT (gauche) a demandé à l'exécutif "d'ouvrir une réelle négociation", mettant en garde contre "une crise sociale de grande ampleur".

"La tendance, c'est qu'il y a aujourd'hui une diminution à la fois du nombre de grévistes et du nombre de manifestants", a au contraire assuré le porte-parole du gouvernement Luc Chatel.

"S'il y a une décélération de la mobilisation, c'est parce qu'on a expliqué, parce que notre réforme est juste et efficace", a jugé jeudi soir le ministre du Travail Eric Woerth chargé de cette réforme.

Jugeant "pitoyable" l'appréciation "à la baisse" de l'Elysée, la première secrétaire du Parti socialiste (opposition), Martine Aubry, a affirmé au contraire que le mouvement était en train de s'étendre.

La candidate socialiste à la présidentielle de 2007 Ségolène Royal a dénoncé une "manipulation" des chiffres.