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Roms: Bruxelles pose un ultimatum à la France

Les expulsions de Roms ne sont pas du goût de Bruxelles. [AFP - PHILIPPE DESMAZES]
Les expulsions de Roms ne sont pas du goût de Bruxelles. - [AFP - PHILIPPE DESMAZES]
La Commission européenne a décidé mercredi d'engager mi-octobre une procédure contre la France pour non respect de la législation de l'UE après les renvois de Roms. C'est la commissaire à la Justice Viviane Reding qui l'a annoncé mercredi sur France 24.

Cette mesure peut être évitée d'ici là si le gouvernement français donne des garanties fermes et montre que ces actions ne sont pas discriminatoires. "La Commission a décidé aujourd'hui d'entamer une procédure d'infraction contre la France (...) car elle prive les citoyens des garanties procédurales essentielles, et cela doit être corrigé", a annoncé, en français, Viviane Reding, la commissaire à la Justice en charge du dossier.

Cette procédure, pouvant éventuellement conduire à une saisine de la Cour de justice européenne, concerne une directive sur la libre circulation des citoyens de l'UE de 2004. Ce texte prévoit des garanties précises pour ceux qui sont expulsés.

Un sursis pour Paris

"Nous avons pris la décision politique aujourd'hui. La France va en être informée et la décision définitive sera prise" mi-octobre, en fonction des réponses de Paris, a-t-elle expliqué à l'issue d'une réunion avec ses collègues commissaires. La France de facto dispose d'un sursis pour éviter cette action, mais "elle est sous le couperet de la guillotine", a résumé un membre de la Commission sous couvert de l'anonymat.

Bruxelles n'a pas ouvert une autre procédure d'infraction envisagée un temps contre la France pour discrimination au sujet des renvois de Roms. Mais Viviane Reding a annoncé avoir "écrit aujourd'hui (mercredi) au gouvernement français pour lui demander d'éliminer les doutes" sur des pratiques discriminatoires lors des expulsions visant les Roms. "J'ai demandé une réponse pour le 15 octobre", a-telle ajouté.

Viviane Reding, commissaire européenne à la Justice, entend mettre ses menaces contre Paris à exécution. [AFP - FREDERICK FLORIN]
Viviane Reding, commissaire européenne à la Justice, entend mettre ses menaces contre Paris à exécution. [AFP - FREDERICK FLORIN]

Viviane Reding a récusé toute reculade face à la France, malgré l'absence d'ouverture immédiate de procédure. "J'aurais reculé si j'avais annoncé que le dossier était clos", a-t-elle assuré. "Une infraction pour discrimination est possible", a-t-elle affirmé.

"Nous avons des affirmations et des garanties politiques données au plus haut niveau qu'il n'y a pas eu de discriminations. Mais nous avons certains doutes et ils doivent être éliminés", a-telle déclaré.

"Nous avons demandé aux autorités françaises de nous fournir des preuves, des documents très précis, comme les dossiers d'expulsions et les documents fournis aux citoyens européens expulsés", a-t-elle ajouté. Dans son collimateur figure une circulaire française du 5 août ciblant les évacuations des Roms.

La fermeté affichée par Viviane Reding, engagée depuis deux semaines dans un bras de fer avec Paris, ne se retrouve toutefois pas dans le communiqué officiel sur le sujet de la Commission, qui cherche manifestement davantage l'apaisement avec la France. Le texte indique simplement que "la Commission enverra une lettre de mise en demeure à la France" pour demander "un projet de mesure de transposition (de la directive de 2004) et un calendrier précis pour son adoption avant le 15 octobre 2010".

"La Commission de façon unanime a suivi à la lettre la proposition de Viviane Reding", a toutefois assuré le président de la Commission européenne José Manuel Barroso en réponse aux interrogations sur ces divergences de présentation des décisions du collège. "L'objectif des décisions prises mercredi est de contraindre la France à se mettre en conformité", a expliqué un membre de la Commission sous couvert de l'anonymat.

Le gouvernement français s'est dit soulagé de ne pas être poursuivi pour discrimination. Les groupes socialiste et Verts du Parlement européen ont salué la fermeté montrée par la Commission avec la décision de lancer une procédure d'infraction et lui ont demandé de ne pas céder sur les "présomptions de violations des directives anti-discrimination". La porte-parole de la Commission européenne a indiqué que Bruxelles analysait la situation dans les autres Etats membres. Selon des sources diplomatiques européennes, cinq pays seraient visés par la possibilité d'une procédure d'infraction.


Une procédure de longue haleine

La procédure d'infraction est le principal moyen mis à la disposition de l'exécutif européen pour sanctionner les Etats qui ne respectent pas le droit européen. La procédure, qui peut durer des années, suit des étapes très précises et peut aboutir à faire comparaître un Etat devant la Cour européenne de justice de Luxembourg. Celle-ci a la possibilité de le condamner.

La mise en demeure représente la première étape de la procédure. La Commission européenne demande à l'Etat mis en cause de lui faire part, dans un délai déterminé, de ses observations sur un problème d'application du droit de l'Union. A ce stade, l'objectif est la mise en conformité volontaire de l'Etat mis en cause. Durant cette phase, l'Etat a le droit de présenter ses observations et ses arguments.

Si ces observations ne sont pas jugées suffisantes par la Commission, la deuxième étape est l'envoi d'un avis motivé, qui constate l'existence d'une infraction, aux yeux de la Commission, et demande à l'Etat d'y mettre fin dans un délai imparti. L'avis motivé contient un exposé détaillé des raisons ayant amené la Commission à la conviction que l'Etat a manqué à l'une des obligations qui lui incombent en vertu du traité.

Faute de réponse à l'avis motivé ou si elle n'est pas jugée satisfaisante, la Commission peut alors saisir la Cour de justice. Elle n'en a pas l'obligation mais dans la pratique elle considère qu'un Etat qui ne suit pas un avis motivé et ne met pas sa législation en conformité avec le droit européen doit comparaître devant la Cour.

agences/boi/jeh/hof

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Sarkozy ou le nouvel extrémisme européen

Nicolas Sarkozy figure est épinglé en Une de l'hebdomadaire américain Newsweek, consacré au "nouvel extrémisme en Europe".

"En France, le président Nicolas Sarkozy, à la recherche d'un nouvel élan populiste pour relancer une aura politique en berne, a lancé une campagne de violentes accusations et d'expulsions forcées visant la minorité rom", a jugé l'hebdomadaire, dans le numéro de son édition européenne daté du 4 octobre.

"De nombreux partisans de Sarkozy ont été choqués par la brutalité de l'idée de rafler une minorité ethnique pour l'expulser", a ajouté le magazine.

Il ajouté que la commissaire européenne à la Justice, Viviane Reding, avait été "à deux doigts de traiter Sarkozy de nazi".

Le passage consacré par Newsweek à Nicolas Sarkozy ("un centriste qui joue avec l'extrémisme") ne couvre que vingt lignes dans un article de trois pages, consacré principalement aux élections en Suède, qui ont vu l'entrée de l'extrême droite au Parlement, et à une Europe hantée par le repli sur soi.

Mais il s'inscrit dans un contexte d'attaques généralisées contre la France et ses dirigeants, que certains responsables français ont qualifié de "french bashing" (attaques féroces contre les Français).

Le biométrique contre la fraude au renvoi

Alors qu'elle se trouve sur la sellette devant la Commission européenne des droits de l'homme, la France annonce la mise en place à partir de vendredi un fichage biométrique des étrangers bénéficiant du retour aidé dans leur pays.

Les Roms en particulier vont devoir laisser leurs empreintes digitales. Cette procédure, sous le contrôle de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii), doit permettre de lutter contre la fraude aux aides au retour, selon le ministère de l'Immigration.

Les empreintes alimenteront le fichier Oscar (Outil simplifié de contrôle des aides au retour), créé par un décret le 26 octobre 2009, déjà actif sous la forme de bases de données comprenant l'identité des personnes ayant bénéficié des trois types d'aides au retour (humanitaire, volontaire et à l'insertion).

Les Roms, notamment, sont soupçonnés par les autorités d'effectuer des aller-retours vers la France pour bénéficier plusieurs fois, sous une fausse identité, de l'aide au retour humanitaire (ARH) de 300 euros par adulte et de 100 euros par enfant, à laquelle s'ajoute le billet de transport.

15'236 aides au retour ont été délivrées en 2009 pour un budget de neuf millions d'euros, le même montant qu'en 2008.

Oscar est visé par un recours devant le Conseil d'Etat de trois associations, dont la Ligue des droits de l'Homme.

Pour elles, l'ARH est en réalité un dispositif d'éloignement forcé des étrangers en situation irrégulière, essentiellement de Roumanie et de Bulgarie.

Elles en veulent pour preuve le nombre d'ARH accordées aux ressortissants de ces deux pays depuis leur adhésion à l'Union européenne en 2007: moins de 400 en 2005 et 2006, 3000 en 2007, plus de 10'000 en 2008 et plus de 12'000 en 2009.